LaMCoS

17 nov
Du 17/11/2022
au 18/11/2022

Sciences & Société

Journées Jeunes Chercheurs/Chercheuses en Acoustique Vibrations et Bruit (JJCAB)

Les JJCAB sont un événement du Groupe Vibroacoustique et contrôle du Bruit, groupe thématique de la SFA réalisées en partenariat avec le GST14 de l'Association Française de Mécanique.

Les Journées Jeunes Chercheurs/Chercheuses en Acoustique Vibrations et Bruit (JJCAB) sont l'occasion de venir rencontrer les doctorants et post-doctorants de France travaillant dans le domaine vibro-acoustique à travers des présentations flash (3 minutes) et des sessions posters.

C'est aussi l'opportunité de découvrir les installations des Laboratoire de Mécanique des Contacts et des Structures (LaMCoS) et Laboratoire Vibrations Acoustique (LVA) et de découvrir la merveilleuse ville de Lyon.

Informations complémentaires

08 sep
08/sep/2022

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Un lubrifiant solide adapté à l’air comme au vide spatial

Il n’existait jusqu’alors aucun lubrifiant capable de protéger les mécanismes spatiaux en toutes circonstances. Après plus de dix ans de travaux collaboratifs avec plusieurs acteurs impliqués dans la tribologie en ambiance spatiale dont le CNES1, des chercheurs du LaMCoS2 de l’INSA Lyon ont vu leurs résultats de recherche prendre forme. Du décollage à la mise en orbite, en passant par l’air et le vide, leur prototype semble résister à toutes les conditions. Explications. 

Dans l’espace, l’énergie est une denrée rare. Puisqu’il n’existe pas de moyen de faire le plein de son engin et que les panneaux solaires ont une capacité limitée, l’énergie utilisée pour chaque mouvement compte. Pour minimiser sa consommation, la lubrification de ces mécanismes est alors optimisée. Seulement, dans le vide spatial, les matériaux utilisés à cette fin n’ont pas le même comportement que sur Terre. Un lubrifiant insuffisamment maîtrisé sous air et sous vide peut même faire échouer toute une mission. « Dans les années 80, des satellites ont été lancés dans l’espace sans jamais n’avoir pu déployer leurs panneaux solaires car le lubrifiant n’avait pas supporté l’enchaînement des tests en salle blanche sur Terre, puis les vibrations du lancement et enfin les conditions de l’espace. Ces satellites se sont alors avérés inutilisables ! », explique Aurélien Saulot, professeur des universités au LaMCoS.

Le MoS2 est le lubrifiant de référence dans le domaine. Également appelé « bisulfure de molybdène », ce matériau (poudre ou dépôt mince) utilisé comme « troisième corps » solide, n’est en réalité pas le plus fiable qui soit. « Le MoS2 perd significativement ses propriétés lubrifiantes en présence d’humidité. Cette dernière est difficile à contrôler par exemple lors des phases d’assemblage et d'essais en salle blanche. Nous avons donc cherché à synthétiser un troisième corps plus stable quel que soit l’environnement (air humide, ultra-vide..) : une solution avec un coefficient de frottement maîtrisé et stable, pour minimiser la consommation d’énergie des mécanismes spatiaux et ainsi accroître leur durée de vie », ajoute le chercheur. 

Alors comment améliorer les propriétés de ce bisulfure pour qu’il résiste aux conditions extrêmes du vide spatial ? Les chercheurs, réunis sur le projet, ont parié sur le dopage du MoS2 par un additif métallique inédit au vu de ses propriétés tribologiques. « Tous les matériaux qui avaient été testés avaient de bons résultats soit sous air, soit sous vide. Nous avons misé sur le dopage du MoS2 par du tantale (Ta) dont le comportement s’est avéré particulièrement homogène dans les deux conditions. » Déposé en couches successives sur une épaisseur micrométrique et grâce à un procédé en phase vapeur (PVD), les chercheurs trouvent la composition et la microstructure optimale. Le premier prototype, testé sur des mécanismes réels, a déjà montré son efficacité pendant toutes les phases d’utilisation. Les résultats ont d’ailleurs été publiés dans la revue internationale Advanced Functional Materials et fait l’objet d’un dépôt de brevet. 

Avant d’être véritablement utilisé dans l’espace, le nouveau lubrifiant devra passer encore quelques tests, pour s’assurer de son comportement en conditions réelles. L’équipe s’attachera à trouver un « optimum », notamment grâce au tribomètre « Pedeba » du LaMCoS, un appareil capable de recréer des conditions spatiales, depuis le campus de la Doua. « Ce nouveau lubrifiant, déposé grâce à nos collègues du LIST au Luxembourg, sera testé et caractérisé à l’échelle élémentaire au LaMCoS et au Femto-ST puis sur des composants standards tels que des roulements à billes au CNES en France. Ces derniers sont souvent utilisés, par exemple sur les antennes de pointage de communication de satellites qui sont en perpétuel mouvement, et ont besoin d’une durée de vie très longue. Ça sera donc un bon indicateur d’efficience tribologique. »

Il faudra donc encore quelques années avant de voir les mécanismes spatiaux équipés de ce nouveau lubrifiant révolutionnaire. L’aventure continue pour les chercheurs du LaMCoS, du CNES, du LIST, de l’Institut FEMTO-ST et de l’Université de Toronto, toujours en lien étroit. « Le tissu collaboratif est capital dans la conquête spatiale et pour la partie tribologique, le LaMCoS peut apporter sa pierre à l’édifice », conclut Aurélien Saulot.

 

Contributeurs : G. Colas (Femto-ST, France), Y. Berthier, C. Godeau, D. Leveque, A. Paquet et A. Saulot (LaMCoS, France), Y. Michel (CNES, France), P. Choquet et J-B. Chemin (LIST, Luxembourg), P. Serles, E. Nicholson, J. Tam, N. Bassi, G. Wang, C. Veer Singh et T. Filleter (Université de Toronto, Canada) 

 

[1] Centre National des Études Spatiales
[2] Laboratoire de Mécanique des Contacts et des Structures (CNRS/INSA Lyon/UdL)

 

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10 fév
10/fév/2022

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Gynécologie : la toxicité des implants Essure désormais prouvée

Le petit implant, lancé sur le marché des dispositifs médicaux en 2002, était proposé aux femmes de plus de 45 ans ayant déjà eu des enfants et souhaitant s’orienter vers une contraception définitive. Sans chirurgie, l’implant Essure® était présenté comme une alternative à la technique de ligature des trompes par cœlioscopie. Seulement, le dispositif médical a depuis laissé des séquelles à quelques milliers de patientes dont le quotidien se trouve désormais marqué par des effets indésirables invalidants : troubles du système nerveux, cardiovasculaires, endocriniens, musculo-squelettiques… Cet implant a été retiré de la vente en 2017.

Ana Maria Trunfio Sfarghiu est chargée de recherche CNRS au laboratoire LaMCoS1. Spécialiste de la bio-ingénierie, elle s’intéresse aux particules d’usure des dispositifs médicaux et à leurs potentiels effets toxiques sur la santé. Il y a deux ans, avec une équipe de chercheurs impliquant la société Minapath, le laboratoire IRCELyon2, le laboratoire de géologie3 et de l’hôpital privé Natecia, elle soupçonnait l’origine des souffrances des victimes de l’implant. En cause : l’étain utilisé pour la soudure intoxiquerait les organismes des patientes. Après un an d'expertises cliniques, un article paru4 dans la revue Journal of Trace Elements in Medicine in Biology, vient confirmer l’hypothèse. Très attendu par les patientes qui avaient parfois vu leur vie basculer à cause du dispositif médical, le résultat de ces recherches a déjà aidé les victimes américaines à faire reconnaître par la justice le préjudice porté par la défectuosité des implants Essure®.

Des effets secondaires invalidants
Près d’un million de femmes dans le monde avaient opté pour cette solution d’implantation par voie naturelle, par hystéroscopie. C’est souvent quelques mois après la pose que certaines patientes développaient des signes locaux et généraux invalidants, conduisant à l’explantation après plusieurs années. Hémorragies, douleurs, fatigue, myalgies… Les effets s’aggravaient avec le temps. Ce sont ces symptômes qui ont attiré l’attention du Dr. Michel Vincent, du laboratoire Minapath et Ana Maria Trunfio Sfarghiu, chercheure en biomécanique à l’INSA Lyon. « Avant de travailler sur ces dispositifs gynécologiques, je m’intéressais aux prothèses articulaires comme celles pour les hanches. J’étudiais les comportements bio-tribologiques des matériaux et les effets des particules d’usure sur l’organisme. Les membres de Minapath faisaient un travail similaire en pneumologie. Lorsque la problématique Essure® est parvenue à nous, nous avons cherché là où nous avions l’habitude : du côté de l’usure et des microparticules. Nous en avons découvert beaucoup plus », explique Ana Maria Trunfio Sfarghiu.


L’implant de contraception définitive (source : R.E.S.I.S.T)

L’implant Essure®, long de quelques centimètres, ressemble à un petit ressort. Une fois déployé à l’intérieur de la trompe, il n’a qu’un but : créer une inflammation pour boucher les trompes. « Pour que le dispositif fonctionne correctement, il devait endommager les tissus. L’implant devait engendrer une fibrose, c’est-à-dire un durcissement des tissus pour bloquer l’accès des ovules et des spermatozoïdes », précise la chercheure. Seulement voilà : si les tests préalables à la commercialisation avaient démontré que la fibrose entourant l’implant l’empêcherait de bouger, les équipes de l’entreprise pharmaceutique avaient omis d’étudier la tenue mécanique de la soudure du ressort en argent-étain : pourtant, après plusieurs mois de corrosion, elle s’en trouvait altérée. 

L’étain mis en cause
Une fois le dispositif inséré dans la trompe, la fibrose se forme autour de celui-ci. Dans le même temps, la soudure fixant le ressort sur son axe, se corrode engendrant une inflammation dans les trompes et les cornes utérines. C’est ici que se diffusent les particules d’étain, exposant le bassin et les organes alentours. « L’étain en lui-même est assez peu toxique pour l’organisme. En faible quantité on peut l'ingérer par l'alimentation et l'éliminer sans qu'il puisse rentrer en contact direct avec le sang. Mais lorsqu’il se retrouve associé à un atome de carbone, il devient de l’organoétain, qui est un neurotoxique. Cette transformation entraîne une réaction en cascade du système immunitaire qui peut le transmettre directement au cerveau. C’est cette substance qui semble expliquer les symptômes que présentent certaines patientes dont les organismes en sont intoxiqués ; les troubles sont très ressemblants aux symptômes d’intoxication à l’organoétain. » 
Les risques d’exposition à cette matière peuvent s’en trouver augmentés sous les contraintes mécaniques du muscle utérin. « Cela peut mener à une fracture de l’implant au niveau de la soudure et une expulsion de l’implant en dehors de la trompe, exposant d’autres viscères du bassin à ces particules métalliques d'étain et d'un acier composé de fer, de chrome et de nickel », ajoute le Dr. Michel Vincent, de la société Minapath.
Pour arriver à ce résultat, les chercheurs ont pu analyser des tissus utérins endommagés par des particules d’implant. « Nous avons la chance d’avoir accès à une salle blanche ISO 5 et plusieurs salles L2 dans lesquelles nous pouvons reproduire la réaction tissulaire aux contraintes mécaniques et particules engendrées par les implants. C’est un lieu qui ressemble à un bloc opératoire, avec un système de ventilation et d’outils mécaniques. Les tissus ainsi préparés et analysés par Minapath montraient des particules d’étain, même après l’explantation », ajoute Ana Maria. 

La grande industrie des dispositifs médicaux
Était-ce la première fois que ces implants étaient regardés à la lumière d’une lampe scialytique ? Contrairement aux médicaments, les produits issus de l’industrie des dispositifs médicaux peuvent être commercialisés sans essai clinique. Seul le marquage « CE » est exigé pour la mise sur le marché. Pour mettre en évidence les failles profondes du système européen de validation des dispositifs médicaux, des journalistes néerlandaises avaient réussi à faire reconnaître un filet de mandarine comme implant vaginal
5, en obtenant l’autorisation de mise sur le marché. « Nous savons qu’il y a des insuffisances de sécurité dans la commercialisation de ces produits. C’est assez difficile de rester sans rien dire. La législation concernant les dispositifs médicaux, c’est-à-dire, tout ce qui sert à soigner mais qui n’est pas un médicament, n’est pas assez stricte pour des éléments qui resteront dans le corps des patients, parfois à vie. Une nouvelle réglementation est entrée en vigueur en mai 2020, mais tout cela évolue lentement. » 
Pour la chercheure du LaMCoS, il est impératif de juger le bénéfice-risque pour chaque implant mis sur le marché. « L’implant qui ne s’use pas n’existe pas. Même si les dispositifs médicaux apportent beaucoup de progrès pour la santé, il faut s’avoir s’arrêter à un rapport bénéfice-risque bien maîtrisé. Par exemple, pour la prothèse de hanches, nous sommes capables de faire des tests mécaniques ex-vivo afin de pouvoir maîtriser les réactions biologiques aux particules d'usure ce qui certifie son fonctionnement sin vivo. Pour les dispositifs gynécologiques, cette certification n'est pas demandée. »
Pour l’implant Essure®, il y existait une alternative : la ligature des trompes. Quels avantages pour les femmes pour qui l’aventure s’est mal terminée ? Après la publication de deux articles scientifiques sur ces implants stérilisants, l’équipe envisage de continuer les recherches. « L’objectif serait de démontrer la création d’organoétain dans les tissus et de pouvoir proposer des traitements en cas de confirmation d’un syndrome de surcharge métallique. Pour le moment, nous sommes heureux que ces travaux aient permis de fournir les preuves scientifiques nécessaires à la reconnaissance des effets secondaires et du rôle de ces dispositifs. Les patientes et victimes américaines ont été indemnisées ; en France, il faut encore attendre la reconnaissance et l’indemnisation du préjudice », ajoutent les deux scientifiques. 

 

1 Laboratoire de Mécanique des Contacts et des Structures (INSA Lyon/CNRS/UdL).
2 Institut de Recherches sur la Catalyse et l'Environnement de Lyon (Université Claude Bernard Lyon1/CNRS).
3 Laboratoire de géologie (ENS Lyon/Université Claude Bernard Lyon 1/CNRS).

4 M. Catinon, E. Roux, A. Auroux, A.M. Trunfio-Sfarghiu, C. Lauro-Colleaux, E. Watkin, G. Sournies, M. Vincent, “Confirmation of the systematic presence of tin particles in fallopian tubes or uterine horns of Essure implant explanted patients: A study of 18 cases with the same pathological process” (2022).

 

5 « Implant files » : est une enquête coordonnée par le Consortium international des journalistes d’investigation, ICIJ, associant 250 journalistes issus de 59 médias internationaux. Publiée à partir du 25 novembre 2018, elle révèle un scandale sanitaire mondial concernant plusieurs types d'implants médicaux.

 

Pour aller plus loin sur le sujet : 
Podcasts « Les cœurs audacieux » -  Saison 1 / Épisode 3 - 12 mai 2021
 

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02 déc
02/déc/2021

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« En réduisant leur taille, nous réduisons aussi les risques qui pèsent sur les infrastructures sensibles »

Comment les mécaniciens peuvent-ils prédire le comportement d’un moteur d’avion en vol lorsqu’un oiseau s’y engouffre malencontreusement ? Pendant très longtemps, les physiciens décomposaient les mouvements complexes en phénomènes simples pour pouvoir les comprendre. Désormais, la complexité d’un mécanisme s’étudie grâce à la simulation numérique. 
Anthony Gravouil, enseignant-chercheur, a été récemment récompensé par le prix ONERA1 de l’Académie des Sciences pour ses travaux de modélisation des impacts extrêmes dans l’aéronautique et l’aérospatial, il détaille ses activités scientifiques menées au sein du LaMCos2

Quels sont ces phénomènes extrêmes que vous étudiez ?
J’étudie la science du mouvement et les phénomènes complexes qui y sont associés. Mon rôle est de décortiquer cette complexité afin de pouvoir la prédire grâce à des nouveaux procédés numériques qui permettent de mieux prendre en compte des échelles de temps très fines dans la modélisation d’impacts (endommagement, fissuration dynamique) et de leurs conséquences physiques sur les structures. Les enjeux auxquels notre recherche s’intéresse sont plus largement ceux de l’énergie et du transport car on comprend facilement qu’il est primordial de concevoir des éléments de sûreté les plus robustes et les plus fiables possibles, dès lors qu’ils entrent - par exemple - dans la composition d’une centrale nucléaire ou celle d’un moteur d’avion. Nous travaillons donc à prédire ce qui va se passer dès lors que ces éléments critiques subissent une sollicitation extrême, comme lorsqu’un oiseau s’engouffre malencontreusement dans un moteur d’avion en vol, ou qu’un atterrissage brutal vient altérer certains composants d’un appareil. Dans le cas de l’industrie énergétique, nous étudions également les dommages que peuvent subir des éléments de sûreté contenus dans des centrales nucléaires en cas de séisme ou d’impact lourd. Finalement, nous travaillons à comprendre tout ce qui se passe dans ces éléments de sûreté quand on se situe « au-delà » de leur bon fonctionnement.

 

 
Modélisation d'un impact d'oiseau sur moteur d'avion

 

Vous anticipez donc ce qu’il advient d’un équipement lorsqu’il sort de sa « zone de confort » ?
C’est tout à fait ça ! Pour être complet, nous nous intéressons aussi à ce que nous appelons les impacts « basse énergie ». S’ils sont plus courants, ils n’en sont pas moins importants et intéressants à modéliser. Par exemple, au cours d’une phase de contrôle ou de maintenance d’un système, il peut arriver qu’un outil tombe des mains d’un opérateur et endommage un élément de structure. Si en surface l’impact peut sembler insignifiant et invisible, il peut générer des dégradations dans les sous-couches du matériau et, plus tard, pourra s’avérer critique pendant que l’appareil est en fonctionnement.   

 


Impact basse énergie sur un panneau composite (thèse Chantrait 2014, collaboration LaMCoS/ONERA)

 

Vos travaux nécessitent donc d’entrer « au cœur des matériaux » et des équipements d’une certaine façon. Comment est-il possible d’accéder à un tel degré de précision ?
Les sciences pour l'ingénieur vivent depuis une quarantaine d’années, une véritable révolution avec l’avènement du numérique et des ordinateurs dotés d’une puissance de calcul extraordinaire. Au laboratoire, nos liens sont donc forts avec la science des données, la simulation, l’algorithmie, l’informatique et les mathématiques appliquées. Nous sommes désormais capables, à partir des grands principes de la physique, de décrire des phénomènes d’une grande complexité dans des modèles virtuels physiquement fondés. On peut donc aujourd’hui mener des expériences réelles sur les matériaux et conjointement faire la simulation en faisant fonctionner des avatars virtuels. Dans le cadre de nos recherches sur la modélisation des phénomènes extrêmes, on utilise donc la modélisation numérique, virtuelle, pour décrire le plus précisément possible « le réel » et ce qu’il advient concrètement lorsque des éléments de sûreté sont dégradés.

Vos travaux sont également très importants pour limiter les risques subis par les éléments de sûreté des centrales nucléaires. D’ailleurs, les dérèglements climatiques peuvent accroître les risques d’impacts extrêmes pour ces équipements. Que préconisez-vous pour limiter ces risques ?
Je pense que pour s’adapter à ces dérèglements, les équipements devront d’abord réduire leurs dimensions. En effet, pendant très longtemps nous avons développé d’importants systèmes énergétiques comme les grosses centrales nucléaires en France, dont la vocation était de pouvoir centraliser la production et la distribution d’énergie. Aujourd’hui nous nous tournons plutôt vers des « smart systems », des infrastructures intelligentes de production plus petites et mieux adaptées aux besoins locaux. Selon moi, nous n’avons plus besoin de fabriquer de gigantesques équipements, comme de grandes centrales énergétiques, ou de très gros avions dans le domaine aéronautique pour qu’ils soient efficaces. Finalement, en réduisant leur taille, nous réduisons aussi les risques qui pèsent sur les infrastructures sensibles : les phénomènes extrêmes sont ainsi mieux anticipés, et nous pouvons mieux surveiller les éléments de sûreté qui les composent.

Vous êtes également enseignant au département génie mécanique. Comment préparez-vous les futurs ingénieurs mécaniciens à aborder la question environnementale dans la discipline ?
Dans un domaine très spécifique tel que la mécanique, nous nous efforçons de transmettre à nos étudiants l’idée que les enjeux sociétaux, climatiques et écologiques les concernent directement. Les mécaniciens de demain sont ceux qui devront réfléchir à la consommation d’énergie qu’un système requiert pour être fabriqué, pour fonctionner et pour être recyclé. Nous souhaitons leur faire prendre conscience que c’est toute la chaîne de valeur d’un produit ou d’un équipement que l’on se doit de considérer. Il ne faut pas sous-estimer le pouvoir d’action des mécaniciens dans l’adaptation au changement climatique.

 

1 Centre Français de Recherche Aérospatiale
2 Laboratoire de Mécanique des Contacts et des Structures (INSA Lyon/CNRS)

 

 

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03 mar
03/mar/2021

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Les HCL et l’INSA Lyon : de la solidarité au brevet d’invention

C’est avec un peu de plastique fondu, un soupçon d’énergie créatrice et beaucoup de bonne volonté que la vague de solidarité des « makers anti-covid » insaliens du premier confinement vient de donner lieu un an plus tard, à un partenariat entre l’établissement et les Hospices Civils de Lyon. Désormais, les personnels soignants disposent d’une plateforme d’impression 3D qui leur permet de créer selon leurs besoins, les produits de protection nécessaires à leur quotidien. Valentin Ripard, ingénieur d’études au laboratoire LaMCos1, a participé à la naissance de la relation entre les deux institutions lyonnaises. Il raconte comment une initiative solidaire a pris une ampleur telle, qu’elle a engendré un dépôt de brevet et un partenariat.

La belle histoire qui unit l’INSA Lyon aux HCL remonte au printemps 2020, lorsque enseignants, étudiants et laboratoires avaient naturellement retroussé leurs manches pour produire des visières grâces à l’impression 3D. L’initiative rejoignait un élan national de solidarité, le mouvement des « makers » qui, confinés, mettaient à profit leurs temps et leurs énergies à soutenir les personnels soignants qui faisaient face à la pénurie d’équipements de protection individuelle. « Je crois qu’à cette période, nous avons réussi à capitaliser sur ce sentiment que beaucoup ont ressenti : celui de se sentir inutile et passif face à cette crise sans précédent. En tant qu’ingénieur, professeur, étudiant ou chercheur, nous avions des compétences sur la conception d’objets que nous voulions mettre au service du bien commun. La solidarité étant une valeur très prégnante à l’INSA, il n’a pas été difficile de trouver des volontaires pour s’engager dans la cause », explique Valentin Ripard, encore doctorant à l’époque. 

Alors que les machines de fabrication additive de la plateforme FIMI2  avaient trouvé place dans les domiciles des bénévoles insaliens et dessinaient de leurs fils fondus des visières destinées à protéger du virus, le réseau des « makers » insaliens devenait de plus en plus organisé : récolte des matières premières, fabrication, distribution… Chacun avait sa partition et la mélodie avait rapidement résonné dans les couloirs des hôpitaux des HCL, où les besoins étaient croissants. « Il faut se remémorer le contexte du quotidien du premier confinement : on circulait très peu et il n’y avait pas encore assez de masques pour tous. La moindre petite aide comptait énormément ! Alors, avec l’équipe, nous faisions le tour des besoins urgents, et nous adaptions nos produits, en développant des visières, des pousse-portes… Nous étions devenus une organisation très structurée et la collaboration avec les HCL devenait de plus en plus forte », ajoute l’ingénieur d’études. 

Alors que le déconfinement commençait à pointer le bout de son nez, les troupes bénévoles qui assuraient les impressions presque 20h/24h fatiguent. Au compteur : près de 12 000 visières produites durant le printemps 2020. L’idée d’une plateforme technologique émerge alors. « L’idée de monter une plateforme entièrement destinée aux besoins des HCL est venue d’amis restaurateurs lyonnais qui avaient d’ailleurs participé à fournir des repas aux étudiants aux côtés de la Fondation INSA Lyon. Grâce à des dons conséquents, notamment de mes collègues de la Fédération Française de Rugby qui ont lancé une cagnotte en ligne, nous avons décidé avec les HCL et le département FIMI, de faire de cette initiative quelque chose de durable », précise Valentin. Après avoir été hébergées dans des locaux prêtés par INSAVALOR, les machines sont déplacées au 1er juin 2020 dans un ancien self dans les bâtiments hospitaliers : la concrétisation de la collaboration entre l’INSA et les HCL prend forme.

C’est ainsi que le 2e CHU de France et la première école d’ingénieurs post-bac française s’allient dans la création de « Co’Lab 3D ». La plateforme d’impression 3D, désormais encadrée par une signature partenariale, permet aux personnels hospitaliers bénévoles de faire fonctionner les machines en autonomie. « Nous avons formé des bénévoles aux techniques basiques de l’impression 3D. C’est très bénéfique pour eux, car la plateforme permet de répondre rapidement, et en circuit court aux besoins qui émergent sur le terrain. Nous avons par exemple développé d’autres produits comme des bouchons-pinces qui facilitent le processus d’analyse des tests PCR. D’ailleurs, ce produit a fait l’objet d’un dépôt de brevet », ajoute modestement le docteur. 

Aujourd’hui, la collaboration se veut pérenne et vectrice de création. « Des étudiants ont réalisé leurs stages ouvriers l’été dernier sur la plateforme, deux stagiaires ingénieurs (5GM) et un projet de fin d’études y sont en cours de réalisation. Cette relation est une belle opportunité d’ouvrir notre communauté à un domaine qui sort un peu de nos spécialités habituelles et cela rend cette expérience encore plus enrichissante », conclut Valentin Ripard.

La passivité des premiers jours décrite par Valentin a ainsi laissé place au sentiment d’utilité chez les « makers » insaliens, qui ont réussi à construire en un temps record une structure efficace au service public. Main dans la main, bénévoles de l’INSA Lyon et bénévoles hospitaliers souhaitent continuer à faire fleurir de nouvelles idées pour protéger et faciliter le quotidien des personnels soignants.

Issue du mouvement LEACOM (Lyon Education Anti-Covid Makers), structurée au début de la pandémie de covid-19 et au sein duquel l’INSA Lyon était un élément moteur, Co’Lab 3D a bénéficié de nombreux dons financiers, matériel et humains. L’initiative a été soutenue et accompagnée par la Fondation INSA Lyon, le l'Institut Gaston Berger de Lyon, la filiale de valorisation de l’INSA Lyon INSAVALOR, et de nombreux autres donateurs.

[1] Laboratoire de Mécanique des Contacts et des Structures (INSA Lyon/CNRS/UdL)
[2] Formation Initiale aux Métiers d’Ingénieur

 

Pour aller plus loin sur le sujet : 
Podcasts « Les cœurs audacieux » -  Saison 1 / Épisode 3 - 12 mai 2021
 

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20 jan
20/jan/2021

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Innovation for Humanity : innover pour réparer l’humain

« À l’heure actuelle, des millions de personnes à travers le monde ont besoin d’une prothèse mais n’y ont pas accès en raison du coût matériel, du manque de ressources humaines expertes et de la difficulté à se déplacer dans un centre de santé. » Tel est le constat énoncé par Pierre Gallien, directeur innovation, impact & information d’Handicap International. 

La réadaptation physique et fonctionnelle est le premier sujet de recherche qui amorcera les collaborations scientifiques menées dans le cadre d’une alliance unissant le Groupe INSA et la Fédération Handicap International. Dans le cadre de la chaire de recherche et d’enseignement « Innovation for Humanity » lancée le 28 janvier prochain, les chercheurs de l’INSA auront pour objectif de répondre aux problématiques rencontrées par les équipes de l’organisation humanitaire. Abder Banoune et Jérôme Chevalier, tous deux impliqués dans cette chaire, expliquent comment la recherche peut participer à restaurer l’intégrité physique des personnes handicapées, avec une contrainte : celle de faire « avec ce qu’il y a sur place ». 

Abder BanouneDans le monde et selon l’Organisation Mondiale de la Santé, seulement 5% à 15% des personnes ayant besoin de technologie d’assistance (fauteuils, prothèses et orthèses, aides à la mobilité aides auditives et visuelles) y ont accès. Accompagner les personnes handicapées vers l’autonomie est le métier originel d’Handicap International, et malgré plus de 40 ans d’action, les défis humanitaires restent nombreux. Abder Banoune, spécialiste de la réadaptation physique au sein de l’ONG, explique. « L’une de nos missions fondamentales est d’accompagner des personnes victimes à récupérer une mobilité optimale. Nous intervenons principalement dans des pays frappés par des conflits, des catastrophes naturelles ou une extrême pauvreté et où l’accès à des prothèses ou des orthèses est rendu difficile. Aujourd’hui, pour rendre une prothèse disponible, nous avons besoin d’équipements lourds et d’équipes très qualifiées, ce qui est souvent incompatible avec les situations des pays dans lesquels nous intervenons. » 

Les promesses de l’impression 3D
 
Après des analyses de terrain, les équipes d’Handicap International ont réalisé le potentiel de l’impression 3D. Des projets pilotes ont démontré que cette technologie pouvait notamment répondre à une problématique logistique de taille. « Lorsqu’un patient a besoin d’un appareillage orthopédique, il doit se rendre dans un centre médical situé dans les grandes villes. S’il vit dans une zone rurale ou de montagne, l’accès au centre peut s’avérer compromis. L’impression 3D nous permet de nous rapprocher au plus près des personnes dans le besoin : avec un simple ordinateur et un scanner nous pouvons prendre les mesures physiologiques des patients et envoyer les données à un centre de fabrication dans les grandes villes. Mais pour ouvrir cette technologie à plus de personnes, nous avons ici besoin de la recherche », poursuit Abder.

Identifier des axes de recherche scientifique pour soigner plus de patients

Jerome ChevalierAu cours des derniers mois, les laboratoires et les équipes les plus pertinentes sur le sujet de l’impression 3D de prothèses et orthèses ont été sollicités. Parmi les laboratoires identifiés, l’IMP1, spécialiste des polymères ; le laboratoire MATEIS2, expert dans le domaine des propriétés mécaniques et de la durabilité des matériaux ; et le LaMCoS3, pour son expertise sur la conception et la fabrication additive. « Avec Christophe Garcia, également porteur de la chaire, nous avons pour mission de traduire la feuille de route transmise par Handicap International en projets de recherche. Après avoir identifié les besoins, nous allons transformer chaque sujet en projets de fin d’études et en thèses de doctorat. Il est essentiel d’impliquer les étudiants, d’une part car ils sont très demandeurs de ces sujets porteurs de sens et d’autre part parce qu’ils ont aussi de belles idées qui méritent d’être développées », dit Jérôme Chevalier, enseignant-chercheur adjoint à la direction de la recherche de l’INSA Lyon et porteur de la chaire. 

De l’optimisation de la prothèse imprimée…

Pour les chercheurs, la question est donc posée : comment optimiser l’impression 3D de prothèses et d’orthèses, pour soigner plus de patients dans le besoin ? De l’élaboration à la résistance des matériaux, en passant par la durabilité des composants ou l’optimisation des formes et des architectures, les challenges scientifiques sont nombreux. « D’abord, nous souhaiterions travailler à l’optimisation des prothèses en elles-mêmes. Aujourd’hui, elles sont fabriquées par thermoformage et avec des matériaux qui ne sont pas toujours disponibles dans les pays d’intervention d’Handicap International. La fabrication additive par impression 3D permet d’étudier de nouvelles possibilités de formes et d’évaluer l’utilisation de matières premières accessibles localement », explique Jérôme Chevalier également chercheur au laboratoire MATEIS.

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… à une imagerie médicale adaptée.

Dans un second temps, c’est la question de l’imagerie qui sera traitée par les équipes de chercheurs. « Pour fabriquer une prothèse de façon classique, il faut reproduire la partie du corps faisant défaut avec un moule de plâtre. Aujourd’hui, dans les pays d’intervention, ce matériau une fois utilisé, est directement jeté. Le recyclage des déchets induits par la fabrication de prothèses et d’orthèses est un vrai sujet. L’impression 3D limiterait la production de déchets, voire permettrait de réutiliser certains déchets plastiques. Nous pourrions aussi imaginer prendre les mesures physiologiques sur place, directement avec l’appareil photo d’un téléphone portable au lieu d’un scanner. À partir de cela, il n’y aurait plus besoin de plâtre. Pour arriver à cela, nos équipes devront travailler à la traduction de l’empreinte 3D en modèle pour les imprimantes », poursuit l’enseignant-chercheur. 

handicap_international Haiti

Quatre années pour la recherche au service de causes humanitaires

Alors que le premier volet de la chaire de recherche unissant l’INSA et Handicap International commence à prendre corps, « Innovation for Humanity » ne s’arrêtera pas en si bon chemin. Signée pour 4 ans minimum, la collaboration donnera lieu à des recherches sur l’utilisation de drones pour déminage, l’analyse d’images et de données et plus généralement l’apport des sciences numériques, avec pour même objectif de faire émerger des enjeux scientifiques aux problématiques rencontrées sur le terrain par les équipes de l’organisation internationale. « Le monde évolue, il doit en aller de même pour nos formations et notre recherche. L’humanitaire doit également profiter de nos recherches », conclut Jérôme Chevalier.

 

 

1 Laboratoire Ingénierie des Matériaux Polymères (CNRS / UdL / Lyon1 / UJM / INSA Lyon)
2 Matériaux : ingénierie et sciences (INSA Lyon/ CNRS / Lyon 1)
3 Laboratoire de Mécanique des Contacts et des Structures (INSA Lyon / CNRS / UdL)

 

Mots clés

07 mai
07/mai/2020

Formation

Le campus Auto’mobilités pour répondre aux enjeux de « l’après »

Dans une France confinée, une pause s’est imposée à la mobilité : des autoroutes tranquilles, peu de transports individuels roulant en centre-ville, un ciel bleu dénué d’avions… Pour le moment. À l’heure où le déconfinement s’annonce, le souvenir du bourdonnement des villes et de ses voitures nous revient progressivement en mémoire. Comment doit-on imaginer la mobilité de l’après-confinement ? Sébastien Morterolle, maître de conférences au département génie mécanique et chercheur au LaMCos1 mise sur l’électrification des véhicules. D’ailleurs, il fait partie du comité de pilotage du campus des métiers Auto’Mobilités. Explications.

L’Être nomade en quête du « zéro émission »
La mobilité est figée depuis 52 jours déjà. La réflexion date de plusieurs années pour les grandes villes du pays : envisager de nouveaux plans de mobilité pour leurs centres, entre impératifs environnementaux et normes européennes d’émissions de gaz à effet de serre. « Depuis des mois déjà, les villes accéléraient le mouvement vers le ‘zéro émission’ en envisageant des zones privilégiées, en souvenir des sanctions de la justice européenne sur le NO
2 notamment. Du côté des équipementiers automobiles, il fallait aussi changer son fusil d’épaule car depuis 2014, nos dirigeants européens avaient validé le règlement ‘Corporate Average Fuel Economy’ (CAFE) qui plafonne le rejet de CO2 des nouveaux véhicules à 95g/km, favorisant le développement des véhicules électriques dans les parcs automobiles. D’ailleurs, on peut apercevoir de plus en plus de voitures électriques dans les grandes villes et petit à petit, on voit des camions poids-lourds assurer des livraisons et le ramassage des déchets ménagers. Les enjeux de la mobilité sont plus que jamais d’actualité », introduit Sébastien Morterolle. 

Si les solutions alternatives au modèle vieillissant du « chacun sa voiture diesel ou essence » n’avaient pas fini de convaincre le plus réticent des consommateurs, la crise sanitaire aurait-elle accéléré une prise de conscience de l’hyper-mobilité à laquelle il était habitué ? « Il est peut-être trop tôt pour annoncer un tournant décisif à l’heure actuelle mais le confinement nous ayant immobilisés, je pense qu’une prise de conscience du côté des consommateurs a été amorcée plus rapidement qu’espéré. De plus, 2020 est une année charnière pour le véhicule électrique, grâce au dispositif de bonus européen », poursuit Sébastien.

Repenser les usages et les matériaux
Le 12 mars 2020, le Président de la République annonçait vouloir « tirer des leçons du moment que nous traversons, interroger le modèle de développement dans lequel s’est engagé notre monde depuis des décennies ». Le secteur de la mobilité n’a pas attendu cette injonction pour remettre en question son modèle, voyant planer au-dessus de sa tête l’enjeu environnemental, incompatible avec les milliards de moteurs à explosion encore endormis dans nos garages de conducteurs confinés. Entre différentes technologies émergentes, Sébastien, lui, travaille à l’hybridation des moteurs. « Les recherches au sein de laboratoires de l’INSA se concentrent sur l’électrification des véhicules et la gestion optimale de l’énergie, ainsi qu’au développement des batteries, de la pile à hydrogène et du véhicule connecté. Ce sont des technologies émergentes dont il faut parfaire le modèle. Parmi les enjeux de l’automobile électrique, le recyclage des batteries et la source de production de l’électricité sont deux grands aspects à traiter pour réellement réduire le coût écologique de ces véhicules. Autrement, on ne ferait que déplacer le problème. »

Selon Sébastien, repenser le véhicule et ses aspects techniques ne sont qu’une partie de l’iceberg. « Une fois le véhicule en lui-même repensé de façon plus ‘propre’, il faut s’atteler à l’offre de service qui l’accompagne. En développant des véhicules électriques, il faut penser un nouvel environnement qui permettra l’accès aux bornes de recharge. Un autre paramètre à envisager est celui de l’évolution des usages de déplacements : par exemple, le ‘free-floating’, un modèle d’autopartage en libre-service sans borne qui permettrait de réduire drastiquement l’usage de la voiture personnelle en ville se développe à vitesse grand V », poursuit Sébastien. 

Former les jeunes générations aux enjeux du futur de la mobilité
À nouvelle ère pour la mobilité, nouvelles compétences à développer pour les prochaines générations de professionnel du transport. Les besoins en maintenance électrique sur les véhicules et les bornes de recharges se faisant déjà sentir, les étudiants ont besoin de basculer vers ces nouvelles technologies pour entrer dans le monde du travail. Pour faire avancer la formation autour de ces nouveaux métiers de la mobilité, des établissements de formation, des laboratoires, des enseignants et des professionnels de l’automobile se sont réunis autour d’un important projet : le campus des métiers Auto’Mobilités. « Notre objectif est double : mettre en lien le monde universitaire académique avec les industriels tout en répondant aux enjeux de mutations technologiques et sociologiques de la mobilité. Le comité de pilotage, actif depuis trois ans, travaille à identifier les grands besoins de l’avenir de la mobilité, notamment électrique. Le campus a pour vocation de réfléchir aux nouvelles compétences à développer pour les futurs experts et mettre en place des actions pour orienter les jeunes vers ces futurs métiers », poursuit le maître de conférences.  

L’INSA Lyon : le lieu totem du campus
Le projet campus Auto’Mobilités a déjà bénéficié d’une subvention nationale comme Projet d’Investissement d’Avenir (PIA) pour financer un banc d’essai à rouleaux que les étudiants ont déjà expérimenté pour tester les véhicules. « L’idée du campus est de créer un lieu vitrine autour de « l’automobilité », toujours pour attirer les futurs étudiants et surtout, aménager un espace dédié qui renforcerait le sentiment d’appartenance au secteur qui n’attire plus beaucoup depuis quelques années. Pour donner corps au projet, nous souhaitons que l’INSA Lyon devienne le lieu totem de cette thématique car beaucoup d’acteurs insaliens travaillent sur la mobilité et de nombreuses formations sont « colorées » véhicule , comme la mécatronique. Nous plaçons beaucoup d’espoirs dans cette initiative, notamment avec la création d’un mastère spécialisé mention conception véhicule électrique dont les cours se dérouleraient dans nos murs, à l’INSA Lyon. En attendant la labellisation du projet dont la demande est en pause en raison de la crise sanitaire, et en attendant la mobilité du futur, restons encore un peu chez nous », conclut Sébastien Morterolle.

1 Laboratoire de Mécanique des Contacts et des Structures (INSA Lyon/CNRS)

 

Mots clés

20 nov
20/nov/2019

Recherche

Santé publique, environnement et tribologie 

Comment réduire les émissions de particules d’usure ? En observant par exemple le secteur du transport sous toutes les coutures, comme le font les tribologues, soucieux d’apporter des réponses à la problématique de la qualité de l’air, pour préserver la santé des personnes.

Record de pollution à New Delhi dimanche 3 novembre. Avec un taux de concentration de particules fines plus de trente-deux fois supérieur aux recommandations de l'OMS, la capitale indienne se fait le théâtre d’un triste constat. Entre la circulation automobile, les rejets industriels et les fumées de brûlis agricoles des régions voisines, New Delhi est asphyxiée et l’air pollué. 

« C'est loin de chez nous mais cela doit nous interpeller » lance Sylvie Descartes, chercheuse au laboratoire de Mécanique des Contacts et des Structures (LaMCoS) à l’INSA Lyon. « L’agglomération lyonnaise enregistre régulièrement des taux de pollution élevés et nous devons contribuer par notre recherche à ne pas arriver à de telles extrémités » complète-t-elle.

Prendre en compte de nombreux facteurs 
Mais pourquoi la qualité de l’air intéresse-t-elle cette scientifique de la tribologie ?
« C’est un indicateur déterminant sur la pollution de l’air aux particules fines ou ultrafines. Une part significative de cette pollution est due au transport » répond la chercheuse.

Contact des pneumatiques des véhicules qui roulent sur l’asphalte, frottement des plaquettes de frein serrées sur le disque lors du freinage, l'usure du revêtement des sols qui s’invite dans l’équation... Tout est question de tribologie et de flux de particules, particules qu’il faut savoir aussi collecter, analyser, étudier. « Notre métier, tribologue, est complexe parce qu’il a la particularité de devoir prendre en compte de nombreux facteurs : mécaniques, physico-chimiques, matériaux, thermiques ; facteurs interdépendants et interagissant, variables multi-échelles. Comment mesurer ces particules (taille du nanomètre au millimètre) et où ? En effet, une fois émises hors du contact, ces particules vont continuer d’évoluer selon l’environnement (interactions chimiques pour former de nouveaux constituants, photosensibilité, fragmentation, décomposition, agglomérats, …). Et dans ces cas, comment remonter le fil vers leur genèse dans le contact ? Comment les caractériser alors que toutes les normes ne sont pas mises en place ? Comment réduire leurs émissions ? Comment maîtriser l’usure en un mot ? » énumère-t-elle.

« Notre travail est de reconstruire une histoire » 
Si la démarche intellectuelle du chercheur est maîtrisée, ce sont les différents scénarios possibles qui multiplient les analyses. 
« Un patin de frein est par exemple composé de plusieurs constituants qui ont tous un rôle. Si pour réduire l'usure ou pour répondre à une nouvelle norme, on décide par exemple d’enlever un constituant jouant notamment un rôle de dissipation thermique dans le fonctionnement du frein, il faut trouver une solution permettant d’assurer la même fonction, en maîtrisant les causes et les conséquences de ce changement, tout en préservant l’efficacité et la sécurité du dispositif » explique Sylvie Descartes. 

Vaste mission pour les tribologues qui travaillent sur le sujet, aux prises avec des notions de mécanique, physique, chimie, voire même climatologiques. « Il faut savoir par exemple que quand il n’y a pas de vent, les particules restent concentrées au même endroit. Ce qui peut être très dangereux en cas de pollution atmosphérique, comme cela a été le cas à Londres, avec le Smog de 1952. Notre travail est de comprendre les différentes briques, les agencer et reconstruire une histoire » résume Sylvie, guidée par la volonté de traiter le problème à la source. 

Pour préserver la santé des personnes
Parce qu’en matière de particules fines/ultrafines, c’est bien de la santé de l’être humain dont il s’agit. Comment mesurer l’impact de ces particules sur le corps humain ? Comment savoir si les émissions de particules fines sont à l’origine de problèmes respiratoires, d’asthme ou pire ? 
« Des recherches sont menées également au LaMCoS en ce sens, en partenariat avec les hôpitaux notamment. L’histoire ne s’arrête jamais en matière de tribologie, et dans ce cas précis de la pollution de l’air, les tribologues doivent aussi tenter d’apporter des solutions pour limiter les émissions » achève-t-elle.

À Lyon, sur l’année qui vient de s’écouler, c’est au mois de février que le plus gros pic de pollution aux particules fines a été enregistré, avec 25,2 microgrammes de particules fines PM*2,5 par mètre cube d’air en moyenne journalière, quand l’Organisation mondiale pour la santé (OMS) recommande de ne pas dépasser les 25 microgrammes. 
D’autres polluants menacent la qualité de l’air, et ce de manière continue. Comme le dioxyde d’azote (NO2), un gaz polluant issu des moteurs diesel. La France, dans le collimateur de la Commission européenne à ce sujet, vient de se faire épingler par la justice européenne pour dépasser régulièrement le seuil limite de NO2. 24 agglomérations françaises sont concernées, dont Lyon.


Le 7e Congrès Mondial de Tribologie (WTC 2021) se déroulera à Lyon du 5 au 10 septembre 2021. Le lieu du congrès est le centre des congrès de Lyon, entre le Rhône et le Parc de la Tête d’Or, au cœur de la cité internationale.  Le WTC 2021 est organisé par deux laboratoires de recherche de la région, le Laboratoire de Mécanique des Contacts et des Structures (LaMCoS) à l’INSA Lyon, et le Laboratoire de Tribologie et Dynamique des Systèmes (LTDS) à l’ECL, avec l’appui de l’Association Française de Mécanique (AFM) et de l'International Tribology Council (ITC).
Pour plus d'informations, contacter le comité de pilotage du projet : Michel Belin, Philippe Kapsa, Philippe Vergne.
https://www.wtc2021.org/


Les particules fines sont des particules dont le diamètre est inférieur à 2,5 micromètres. Elles sont désignées sous le terme de PM 2,5 (d'après la terminologie anglaise particulate matter).

 

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16 sep
16/sep/2019

Recherche

Mecalam : une Jeune Entreprise Universitaire qui transfère les expertises du LaMCoS auprès des industriels

L’accord a été signé sur le Salon du Bourget le 19 juin dernier : le LaMCos, le groupe Safran et la Jeune Entreprise Universitaire Mecalam s’associent officiellement pour développer des outils de modélisation et de calcul dans le domaine de la mécanique du contact. Cette signature permettra d’industrialiser les codes numériques développés à l’occasion des collaborations déjà existantes entre le laboratoire de génie mécanique et l’industriel aéronautique. La clé de voûte ? Mecalam, une Jeune Entreprise Universitaire créée dans l’environnement de l’INSA Lyon.

Les premières pages de l’histoire de Mecalam s’écrivent lorsque deux enseignants-chercheurs du laboratoire LaMCoS, Jean-Pierre de Vaujany et Michèle Guingand, et deux docteurs-ingénieurs de l’INSA Lyon, François Besson et Joël Teixeira Alves, identifient un besoin chez leurs partenaires industriels.

« À travers nos collaborations avec les entreprises, nous avons constaté que certains secteurs industriels à haut potentiel technologique comme l’aéronautique, se heurtaient à un problème récurrent : en travaillant avec des engrenages exotiques ou très fins, les entreprises ne trouvaient pas de logiciels commerciaux capables de répondre à leurs besoins spécifiques. Le LaMCoS apportait un support scientifique solide, mais parfois, l’entreprise avait du mal à les intégrer dans leurs processus », explique François Besson, président de la jeune entreprise universitaire (JEU). 

Et c'est là que Mecalam intervient. Située dans les bureaux du Centre Entreprise et Innovation (CEI) d’INSAVALOR, Mecalam propose ses services de transfert scientifique. Dans le domaine de l’engrenage et des transmissions mécaniques, l’entreprise cherche à valoriser les nombreux codes de calculs créés à l’issue des travaux de recherche au sein du LaMCoS.

« Nous nous chargeons de livrer un logiciel accessible et sur-mesure à l’industriel en demande. De l’interfaçage de l’outil, à la documentation d’utilisation associée, nous travaillons la robustesse des codes informatiques pour garantir la meilleure fiabilité. Notre second rôle est d’assurer le suivi d’utilisation et d’exploitation de l’outil numérique. Nous agissons comme un « interprète » dans la relation laboratoire-industrie déjà existante, en rentabilisant et pérennisant l’investissement de la branche support scientifique », ajoute François Besson.

À l’occasion du Salon du Bourget organisé en juin dernier, le Jeune Entreprise Universitaire a pu officialiser ses relations avec le LaMCoS et le groupe Safran, partenaires de longue date. 

« Le LaMCoS et le Groupe Safran ont une histoire qui dure depuis quelques années déjà, et leurs travaux communs ont contribué à créer des supports scientifiques en quantité que nous nous devions de valoriser. L’accord signé vise à encadrer les activités de transfert scientifique tout en chapeautant les liens commerciaux et de propriété industrielle déjà existants. Le LaMCoS apporte une expertise scientifique, Safran, une expertise métier et produits et Mecalam développe sur cette base, des outils de calcul rapidement exploitables. C’est un contrat qui permet de passer rapidement du laboratoire de recherche académique à l’utilisation d’un nouvel outil opérationnel pour notre partenaire aéronautique », conclut François.

Informations complémentaires

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26 aoû
Du 26/08/2019
au 30/08/2019

Sciences & Société

17e édition de la conférence internationale triennale "Liquid and Amorphous Metals"

Conférence co-organisée par le CNRS, l'Université Claude Bernard Lyon 1 et l'INSA Lyon

The aim of the LAM conferences is to attract scientists working in the field of liquid and amorphous metals in order to discuss new advances and future directions in this intriguing field of condensed matter physics, chemistry and materials sciences.

This new edition will be the opportunity for broadening the purposes of the conference series to non-metallic materials, such as molecular glasses, polymers and colloids thus encouraging the interdisciplinary among different disordered materials fields, exploring universality of the observed properties, and stimulating novel discussions and collaborations among scientists from different communities. An accent will be given to breakthroughs and advances from cutting-edge large facilities as synchrotron radiation, neutrons and free-electron lasers facilities, for encouraging the community in exploring the potential of these advanced techniques for progressing in the understanding of liquid and amorphous materials.

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