Formation
Ayoub Agourram, du Maroc au campus d’Oyonnax : parcours d’un doctorant engagé et passionné par l’économie circulaire
Originaire de Safi, au Maroc, Ayoub Agourram poursuit aujourd’hui sa thèse sur le campus d’Oyonnax de l’INSA Lyon. Ingénieur de formation et particulièrement sensible aux enjeux environnementaux, il consacre ses travaux à la valorisation de plastiques recyclés imparfaitement triés. À Oyonnax, au cœur de la Plastics mVallée, le jeune doctorant mène ses recherches avec détermination dans un cadre professionnel et personnel qu’il apprécie tout particulièrement, espérant faire avancer l’industrie des plastiques vers un avenir plus durable. Portrait.
Sur le campus d’Oyonnax de l’INSA Lyon, Ayoub Agourram savoure sa nouvelle vie de doctorant. Son arrivée il y a tout juste un an résonne aujourd’hui comme une petite revanche. « Je connaissais déjà l’INSA Lyon, j’avais candidaté pour y entrer juste après mon bac lorsque j’étais au Maroc et aujourd’hui ça y est, j’y suis ! », ironise-t-il. Un père entrepreneur, une mère professeure, Ayoub ne vient pas d’une famille d’ingénieurs, mais il a tout de même des frères et sœurs en études de médecine et un goût prononcé pour les sciences. Ses capacités en mathématiques et son bac international en sciences mathématiques sont des atouts qu’il souhaite valoriser. Malgré sa tentative manquée auprès de l’INSA Lyon, il entre en 2019 à l’École natéionale supérieure d’arts et métiers de Meknès, spécialité Génie mécanique, procédés de Fabrication Industrielle.
C’est là qu’il apprend les bases de la formation d’ingénieur. Puis en 2023, une opportunité s’ouvre à lui. « Dans le cadre de son réseau d’écoles partenaires, l’école m’a permis de venir en France et d’arriver à Aix-en-Provence. En 2023, j’intègre un double diplôme à l’École nationale supérieure des arts et métiers d’Aix-en-Provence et réalise un Master de recherche en sciences des matériaux et procédés de fabrication avancés. » Quelques mois plus tard, à la fin de ses études, Ayoub enchaîne et fait ses premiers pas dans le monde industriel en région Aquitaine avec un stage chez Arkema, au Groupement de Recherche de Lacq (GRL). Son sujet : le développement de résine thermoplastique liquide destinée à la fabrication des composites recyclables.
De l’industrie à la recherche
Le monde industriel, Ayoub Agourram, le connaît bien. Safi, sa ville d’origine au Maroc, ville côtière située entre El Jadida et Essaouira, représente un des plus grands pôles industriels du pays, notamment axé sur la transformation du phosphate, la production de céramique et l’industrie chimique. « J’avais fait un stage au sein du groupe OCP (anciennement Office chérifien des phosphates, l’un des principaux acteurs mondiaux de l’industrie des engrais), je connais les enjeux du monde industriel et je sais qu’il faut agir pour rendre les processus de fabrication plus durables », concède Ayoub avant d’ajouter : « la sensibilité environnementale a fait partie de mon éducation, c’est aussi pour cela que je m’intéresse à ces sujets ». Chez Arkema, l’étudiant découvre concrètement le rôle de la recherche et du développement dans la vie industrielle. Son avenir professionnel est tracé, ce sera la recherche au service de l’industrie. En 2024, Ayoub quitte la région Aquitaine, et rejoint le campus d’Oyonnax pour y débuter sa thèse intitulée : « Adaptation du procédé de bi-injection aux matières plastiques recyclées imparfaitement triées ».
Économiser les ressources
Au cœur de la Plastics Vallée, qui compte plus de 3000 entreprises dont 600 directement liées à la plasturgie, le projet du doctorant s’inscrit dans un contexte de soutien industriel et de recherche appelé Programme d’investissement d’avenir (PIA), qui encourage le développement de procédés innovants dans les filières de plasturgie et de l’économie circulaire. L’objectif de cette thèse : étudier un procédé permettant d’associer deux plastiques différents (souvent un plastique vierge et un plastique recyclé) dans un même moule, pour former une pièce. « Avec la bi-injection, on peut fabriquer des chaises, des poignées de voitures, des pare-chocs », explique le doctorant avant de poursuivre : « La bi-injection est déjà faisable dans l’industrie, mais les défis sont nombreux. Il faut d’abord bien identifier les matières recyclées que l’on souhaite réinjecter, ensuite, il faut caractériser les propriétés rhéologiques, mécaniques et thermiques des matériaux combinés et puis enfin, il faut que ces nouveaux plastiques soient robustes ». À la clé, des économies de plastique et de CO₂. Bien qu’il n’existe pas encore de données chiffrées pour le procédé d’injection où deux matériaux différents sont injectés dans le même moule pour former une seule pièce, des réductions de l’ordre de 20 à 30 % des émissions de CO₂ sont d’ores et déjà documentées pour le procédé d’injection avec recyclat (une seule matière).
Un campus sur-mesure
Pour surmonter ces défis techniques et industriels, Ayoub Agourram trouve sur le campus d’Oyonnax un cadre idéal pour développer ses recherches. « Quand je suis arrivé ici, j’ai été agréablement surpris par l’importante diversité scientifique et culturelle. Dans mon bureau, il y a d’autres doctorants et nous travaillons tous sur des sujets très variés, mais surtout, nous venons de pays différents » témoigne Ayoub. Et ce dernier d’insister : « Ici je suis bien encadré, par trois laboratoires, Ingénierie des Matériaux Polymères (IMP), Matériaux Ingénierie et Science (MatéIS) et le laboratoire de Mécanique des Contacts et des Structures (LaMCoS) et je dispose de tout le matériel nécessaire sur place pour mener mes recherches ». Dans cet environnement favorable, la proximité géographique permet également au doctorant de rencontrer régulièrement les industriels pour leur présenter les avancées de ses recherches. « J’encourage vraiment les étudiants à venir ici pour la qualité de l’enseignement, de l’encadrement, et le fait d’être au cœur des enjeux industriels. Et puis c’est une petite ville où l’on vit bien », conclut Ayoub Agourram. D’ici les prochaines années, après sa thèse, le doctorant espère que ses travaux auront permis des évolutions concrètes et se verrait bien faire carrière dans le milieu académique pour transmettre ses connaissances.