INSA Lyon

16 juin
16/juin/2025

INSA Lyon

Du code au compost : le parcours fertile de l’ingénieure Maud Tribaudeau

Rien ne semblait prédestiner Maud Tribaudeau à l’aventure entrepreneuriale que l’ingénieure vit aujourd’hui. Diplômée du département génie électrique à l’INSA Lyon et après un brillant début de carrière dans le domaine de la high-tech et le sport automobile, l’entrepreneure est aujourd’hui à la tête de la société Tripluch. La start-up en plein développement née à la croisée de la technologie, de l’écologie et de l’engagement social, accompagne des structures dans la gestion de leurs biodéchets.

Une quête de sens

Sans accompagnement, les bacs à compost peuvent facilement être délaissés.Deux ans en Formule 1 puis encore deux années chez Nokia dans les télécommunications. À sa sortie de l’INSA Lyon, Maud Tribaudeau enchaîne les contrats sans difficulté. Diplômée du département génie électrique, cette escrimeuse de haut niveau, passionnée de code et de haute technologie, se projette dans une carrière grandiose. Puis, progressivement s’opère une bascule, comme une quête de sens intellectuelle profondément ancrée qui ressurgit. « Durant mon dernier contrat, j’étais développeuse dans une petite entreprise dans laquelle je travaillais beaucoup seule et cela me pesait. J’avais alors négocié de travailler 3 jours par mois pour former les jeunes femmes au code. Mon état d’esprit, c'était de promouvoir la tech auprès des femmes ». Un cheminement largement nourri par son passage au sein de l’école d’ingénieur lyonnaise. « Mon parcours m’a poussé à m’investir dans le milieu associatif, à penser collectif, à me tourner vers les autres et à valoriser l’humain ». 

La fine fleur du compostage

Petit à petit, les événements s’enchaînent et Maud saisit sa chance et les opportunités. Un déménagement dans le sud de la France pour suivre son compagnon, la découverte de la pratique du compostage à domicile… « Et ses galères ! » Puis une rencontre déterminante. « Un jour, je participe à une conférence où je découvre le métier de maître-composteur. Ce sont des professionnels de la prévention et de la gestion de proximité des biodéchets et cela me donne des idées ». La future entrepreneuse voit aussi dans le cadre réglementaire une opportunité pour sa future entreprise. En 2020, la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) impose à tous les particuliers, entreprises et collectivités de trier leurs biodéchets à la source à partir du 1ᵉʳ janvier 2024. La société de Maud est dans les starting-blocks, il ne manque plus que l’étincelle. « Ma mère est Directrice dans un EPHAD et elle me parle de ses difficultés à trier les déchets ménagers de son établissement. C’est cette histoire de famille qui va finalement lancer ma société. Ma mère est ma première cliente en quelque sorte », sourit Maud Tribaudeau.  

Un accompagnement sur-mesure 

Tripluch fait se rencontrer les gens autour de la terre et du compostage.Ainsi, en janvier 2022 naît Tripluch, « l'outil pour composter bien entouré », comme l’indique son slogan. « J’ai compris qu’il y avait un vrai besoin de mise en relation entre structures concernées et professionnels du compost. Puis, j’ai identifié un autre besoin : le suivi. Sans accompagnement, les bacs à compost peuvent facilement être délaissés. C’est là qu’est née l’idée de développer un outil numérique ». Aujourd’hui, la société est en capacité de fournir un accompagnement de A à Z, de la recherche de matériel pour le compost, en passant par la mise en relation avec le maître-composteur jusqu’au suivi du compost via l’application numérique. À la clé pour les structures clientes, un gain financier et écologique. « Mes clients peuvent réduire leur taxe liée aux déchets ménagers, valoriser cette solution dans leur démarche RSE et bien sûr diminuer leur empreinte carbone ». Et pour cause, nos déchets organiques ou biodéchets sont composés à 80 % d'eau et sont aujourd’hui souvent enfouis ou incinérés, ce qui génère environ 800 000 tonnes de gaz à effet de serre par an. Chaque année, les ménages français génèrent 18 millions de tonnes de biodéchets, soit environ 83 kg de biodéchets résiduels par habitant et par an (déchets de cuisine et les déchets verts). 
Tripluch ne s’arrête pas à cette mission écologique. « Faire jardiner des personnes âgées et leur faire remettre les mains dans la terre, c'est extrêmement valorisant. Les gens se rencontrent, s’entraident, et passent moins de temps seuls », tient aussi à souligner Maud Tribaudeau. 

Des projets plein la tête 

Aujourd’hui, sa société basée dans le Var est accompagnée par l’Incubateur Provence Côte d’Azur. Depuis deux ans, l’ingénieure informatique poursuit son chemin et entend bien chercher d’autres opportunités locales, notamment auprès des collectivités. En juin prochain, elle verra naître la commercialisation de son application web. « La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) a le mérite d’exister mais de nombreux freins demeurent pour que tout le monde agisse. L’accompagnement, surtout la pédagogie dans mon cas, c’est la clé. J'ai encore du travail ! », explique Maud Tribaudeau. 

En parallèle, la jeune trentenaire, continue à enseigner le code une fois par semaine. « J’ai des idées plein la tête », s’enthousiasme Maud Tribaudeau. « Cette activité complémentaire m’apporte de la stabilité financière et cela est cohérent avec les valeurs de Tripluch et ma vision des choses : celle de promouvoir une tech utile, inclusive, humaine et accessible ». Ces valeurs, Maud aime les transmettre et n’oublie jamais de faire un passage par l’INSA Lyon pour revoir ses professeurs et contribuer à des projets avec des élèves. « J’aimerais dire aux futurs ingénieurs de garder ces valeurs humanistes qui nous ont été inculquées et d’explorer les possibilités larges que nous donne le statut d’ingénieur ». Et l’entrepreneuse de conclure « j’ai la conviction qu’un ingénieur n’est pas destiné à travailler dans un seul domaine. Ces dernières années, j’ai exploré de nombreuses problématiques et exercé plusieurs métiers. Je me sens accomplie et parfaitement alignée. »