
Formation
Élèves-ingénieurs, ils créent un outil pour aider les PME à réduire leur impact environnemental lié au numérique
Allonger la durée de vie des équipements, réparer plutôt que racheter, adopter une politique d’achat responsable : les solutions à disposition des entreprises pour maîtriser leurs impacts liés à leur parc numérique existent. Si les grandes entreprises s’y attellent dans le cadre de démarches RSE1, les plus petites comme les PME peinent encore à prendre le virage, faute de moyens et parfois de prise de conscience. Bien souvent, l’étape essentielle de mesure s'avère laborieuse et rend difficile la mise en place de mesures efficaces.
Maxime Herry et Arthur-Mustapha Farwati, élèves-ingénieurs en 4e année de télécommunications, ont développé OPSIAN, un analyseur d’impact des Technologies de l’Information (IT). Open source2, le logiciel a pour but de sensibiliser le plus grand nombre d’organisations, les outiller et les pousser à agir pour réduire leur impact écologique en matière de numérique.
Un analyseur d’impact IT
Face aux conséquences écologiques non-négligeables induites par le numérique et une règlementation évolutive, les petites et moyennes entreprises ont souvent des difficultés à calculer l’impact de leur parc informatique. « La plupart des solutions existantes d’analyse sont des logiciels développés en interne au sein des grandes entreprises et qui restent inabordables pour des PME. Pour pousser ces petites et moyennes entreprises à agir pour réduire leur impact écologique en matière de numérique, nous avons développé ‘OPSIAN’, un analyseur d’impact IT open source », expliquent Maxime Herry et Arthur-Mustapha Farwati, élèves-ingénieurs au département télécommunications de l’INSA Lyon.
OPSIAN permet à l’utilisateur de prendre conscience de l’impact de son équipement,
de sa fabrication à sa fin de vie en passant par sa distribution et son usage.
Le projet, qui s’inscrit dans le cadre d’un module pédagogique intitulé « SPOC - Sustainable Proof Of Concept3 », répond à un appel d’offres émis par La Ruche Industrielle, un collectif d’entreprises et d’écoles du bassin lyonnais. « Il y avait le constat suivant : pour une PME, l’un des coûts écologiques les plus compliqués à quantifier est le numérique. Il n’existe pas encore d’étude à grande échelle des impacts de l’usage, ni d’outil qui contiennent ces informations. Notre ambition a été de créer un outil qui soit autant dédié à l’analyse qu’à la sensibilisation des entreprises et du grand public. Ainsi, il permet à l’utilisateur de prendre conscience de l’impact de son équipement, par exemple un ordinateur, sur divers critères comme le changement climatique, l’émission de particules fines ou encore l’acidification des océans », indique Maxime Herry.
Mesurer l’impact : une tâche pas si facile
À partir d’une interface minimaliste, les directions de services informatiques des PME peuvent ainsi obtenir des chiffres concrets quant à leur parc informatique et numérique. Émissions de radiations ionisantes, usage des ressources, impact carbone, changement climatique, particules fines et contribution à l’acidification des océans : six critères sont ainsi passés au crible pour générer vingt valeurs qualifiant l’impact. « Dans la majorité des cas, évaluer l’impact de la fabrication d’un équipement numérique est plutôt difficile, car les constructeurs ne sont pas astreints à communiquer toutes ces données aux consommateurs. Si c’est le cas, elles ne sont pas assez précises ou ne couvrent pas tous les critères. Ainsi, afin de disposer de données fiables, nous sommes contraints à attendre que des tests soient conduits par des organismes de référence pour l’usage et à se baser sur des modèles issus d’études pour la fabrication, la distribution et la fin de vie. Actuellement, nous utilisons les données du modèle NumEcoEval, un référentiel reconnu et supervisé par la Mission interministérielle du numérique responsable. Pour ces raisons, les résultats donnés par OPSIAN sont basés sur des modèles d’approximation. Mais la grande majorité du temps, cela se rapproche de la réalité. Mesurer, sensibiliser, préconiser et suivre sont les quatre missions d’OPSIAN », ajoute Arthur-Mustapha Farwati.
Améliorations et perspectives
Déjà disponible et en phase d’amélioration, OPSIAN se veut être ergonomique, accessible et transparent. Le duo d'étudiants en télécommunications présentera bientôt l’outil à leur commanditaire, la Ruche Industrielle, mais ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. « Nous souhaiterions proposer une application professionnelle pour permettre aux entreprises de disposer d’un véritable outil d’aide à la décision. Il nous faudra très certainement travailler plus précisément aux données d’impact de la fabrication à la fin de vie des équipements dont nous parlions plus haut. Nous allons également y intégrer un moteur d’intelligence artificielle pour que la plateforme puisse prendre en compte les nouveaux modèles récemment sortis sur le marché. La DSI de l’INSA Lyon sera notre bêta testeur et nous espérons qu’OPSIAN sera rapidement utile à de nombreux services informatiques des petites et moyennes entreprises. »
[1] Responsabilité sociétale des entreprises
[2] Logiciel dont le code source est librement accessible, modifiable et redistribuable
[2] Preuve de concept durable

Formation
Continuité pédagogique : les profs accompagnés dans leurs missions à l’INSA Lyon
Comment assurer la continuité pédagogique ? C’est l’une des premières questions qui s’est imposée lors de l’annonce du confinement, il y a deux mois et demi de cela. À l’INSA, campus de 6000 étudiants, ce sont 750 enseignants qui ont dû revoir leurs copies pour continuer d’assurer leurs cours, à distance, et malgré des techniques, pour certains, peu usuelles. Ils ont pu bénéficier de l’aide de toute une équipe dédiée à leurs problématiques : l’équipe ATENA.
« Comment réussir à donner des cours face à un écran ? Comment maintenir la motivation des élèves ? Comment gérer sa charge de travail personnelle ? Voilà quelques exemples de problématiques qui se sont présentées aux enseignants depuis le confinement », explique Fatma Saïd Touhami, conseillère pédagogique de l’équipe ATENA à l’INSA Lyon. Sur le pont depuis l’annonce du 15 mars dernier, la jeune femme a su prêter une oreille attentive à ses interlocuteurs, parfois pour de menus détails, parfois pour des questions plus fondamentales, dans un contexte de crise.
« Pour les aider, nous avons par exemple rapidement mis en place un atelier virtuel, le « rendez-vous des profs », qui leur a d’abord permis de partager leurs difficultés. Pour mes collègues et moi, c’est aussi à travers ces échanges que nous avons pu identifier les besoins des enseignants et leur apporter des solutions adaptées et spécifiques », précise Fatma.
Nouveau rythme, nouveaux espaces de travail collaboratifs, nouvelle façon d’enseigner… En quelques jours, il a fallu s’adapter. « En collaboration avec nos collègues d’OpenINSA, nous avons essayé de nombreux outils pour voir lesquels correspondraient le plus aux besoins des enseignants et des étudiants. Il a fallu les lister, tester leurs fonctionnalités, faire un bilan des points positifs et négatifs, monter nous-mêmes en compétences sur ces outils et ensuite former les utilisateurs. Assez rapidement, on a décidé de ne pas multiplier les outils pour n’en proposer aux enseignants que quelques-uns, efficaces, robustes et qui fonctionnent bien », se rappelle Clément Merle, ingénieur audiovisuel de l’équipe ATENA.
Les membres de l’équipe ATENA saluent la réactivité et le professionnalisme des enseignants de l’établissement qui ont su s’adapter en un temps record à de nouvelles pratiques et de nouveaux outils. « Avant le confinement, 160 enseignants utilisaient le médiacenter pour déposer leurs supports vidéo. Depuis, le nombre de vidéos a doublé et ce sont dorénavant 530 enseignants qui utilisent cette nouvelle plate-forme. Ils ont su réaliser des supports de qualité en utilisant toutes les fonctionnalités mises à leur disposition », explique Pascal Mirallès, responsable du pôle audiovisuel de l’équipe ATENA.
La problématique qui anime actuellement les équipes est celle de l’évaluation des étudiants à distance. « La plate-forme pédagogique Moodle est un outil essentiel pour répondre à cet objectif d’évaluation à distance. Nous avons présenté aux enseignants différentes modalités (tests QCM, oraux, dépôt de devoirs…) et ils ont pu choisir le format le plus adapté à leurs objectifs », expliquent Monica Davila et Alexis Robinet, ingénieurs pédagogiques à l’équipe ATENA, qui ont proposé aux enseignants des sessions de formation en visioconférence visant à leur faire découvrir ces différents modules d'évaluation proposés sur la plate-forme.
Côté étudiant, il a aussi fallu s’adapter, et s’y retrouver. Élève de première année, Adrien Desproges a testé pour la première fois le suivi des cours à distance. « Mes professeurs ont tous mis en place des outils différents pour répondre au mieux au besoin de leur matière. Certains outils étaient parfaitement adaptés à l'enseignement proposé, d'autres...plus compliqués », avoue le jeune homme, qui s’est retrouvé parfois en difficultés devant la pluralité des solutions utilisées. « L’efficacité du travail à distance s'est vraiment ressentie lorsque l'enseignement s'est adapté à la situation. Des séances bien planifiées, dont le contenu et le travail à fournir étaient clairement expliqués sont plus faciles à suivre », souligne Adrien, qui a pu constater que la solidarité avec ses camarades de promotion s’était renforcée face aux contraintes de cette période de confinement. « En travaux dirigés, nous manquons vite de repères sans interaction forte entre humains. La mise en place de système de "salles de conférences privées" sur Zoom pour travailler en groupe a été un grand plus. Le professeur peut même "circuler" parmi les groupes si nous avons des questions. Nous avons pu continuer de nous entraider avec mes amis, encore plus que d'habitude », indique-t-il.
Après le flou des premiers jours, ces méthodes d’enseignement ont été adoptées et maintenues pour durer, puisque le retour des élèves ne se fera pas avant septembre. L’utilisation de nouveaux outils, en état d’urgence, aura permis de tester l’efficacité des solutions, et de les « crash tester » grandeur nature. Mais même si la continuité pédagogique aura été permise grâce à ces propositions numériques, la question de l’intérêt du présentiel demeure.
« S'il est encore trop tôt pour faire un retour d'expérience global sur l'enseignement distanciel généralisé, j'ai pu échanger avec de nombreux et de nombreuses collègues qui ont vécu la continuité pédagogique de manière très diverse, et je pense que nous pourrons tirer des leçons de la multiplicité même de ces expériences », souligne Carine Goutaland, enseignante de sciences humaines et sociales et directrice adjointe du Centre des Humanités de l’INSA Lyon.
« L'enseignement à distance ne saurait se résumer à une transposition systématique du face à face pédagogique via des outils numériques. Pour nombre d'entre nous, enseignants, cette expérience, inédite par sa soudaineté et son ampleur, a aussi été l'occasion de repenser l'organisation et la temporalité de nos séquences pédagogiques, en essayant de donner plus de temps aux étudiants pour faire des recherches, s'approprier des contenus, réfléchir par eux-mêmes... C'est une réflexion que nous souhaitons poursuivre dans les mois qui viennent aux Humanités, notamment avec Thomas Le Guennic, notre référent pédagogique auprès d'ATENA, et Monica Davila, ingénieure pédagogique au sein de l’équipe ATENA et enseignante d’espagnol au Centre des Humanités, qui nous a apporté une aide précieuse dès le début du confinement en proposant un accompagnement personnalisé aux équipes enseignantes », ajoute Carine.
Dans cette crise sanitaire, le plan de continuité pédagogique de l’INSA Lyon n’aurait pas pu être mené sans l’aide de l’équipe ATENA. Forte de cette expérience, elle est déjà tournée vers le futur, prête à accompagner les enseignants pour la préparation de la prochaine rentrée mais aussi dans le vaste chantier d’évolution de la formation qu’a ouvert l’INSA Lyon. « Je suis fière de la mobilisation de mon équipe durant ces dernières semaines. Celle-ci a permis de rendre notre travail plus visible auprès des enseignants de l’établissement. Ils savent tous désormais qu’ils peuvent compter sur l’équipe ATENA pour les accompagner dans l’évolution de leurs pratiques et pour proposer une formation toujours plus adaptée aux défis que devront relever les ingénieur.e.s de demain », conclut Laurence Dupont, responsable de l’équipe ATENA.