IMP

20 déc
20/déc/2018

Recherche

Chimie : quand les réponses sont dans le Pastis...

Partir de l’effet Ouzo pour conclure sur l’importance de la carbonatation de l’eau dans les émulsions : c’est toute la réflexion qui a propulsé l’un de nos chercheurs INSA sur le devant de la scène. Retour sur une croisade scientifique qui a déjà fait l’objet de deux publications.

Quel est le lien entre François Ganachaud, chercheur au laboratoire IMP (Ingénierie des Matériaux Polymères à l’INSA Lyon, et le Pastis ? Et bien, c’est l’effet Ouzo ! Ou l’effet Pastis pour les plus chauvins. C’est plus précisément le phénomène selon lequel une émulsion se forme spontanément lorsqu’on verse de l’eau dans un Pastis : l’alcool se dilue dans l’eau, la boisson se trouble et prend sa fameuse coloration laiteuse. Mais ce qui intéresse les scientifiques, c’est la partie cachée de l’iceberg. En effet, dans le pastis, il y a certes beaucoup d’alcool mais aussi une petite quantité d’anéthol, l’huile essentielle extraite de l’anis. Or, si l’alcool peut se mélanger à l’eau et à l’huile, en revanche, l’eau et l’huile, elles ne se mélangent pas, elles sont « non miscibles ».

« Pour se séparer de l’eau, l’huile ne démixe pas comme une vinaigrette par exemple, mais elle se disperse en gouttelettes qui se forment spontanément et restent en suspension dans l’ensemble du mélange eau/alcool. On génère une émulsion, ce qui donne à la boisson son aspect laiteux » explique François Ganachaud.

Les mélanges eau/huile/alcool ainsi étudiés et l’observation de ces micro-émulsions spontanées ouvrent de nouveaux horizons dans de nombreuses applications, dans le domaine de la pharmacie ou des cosmétiques par exemple.

De l’effet Ouzo aux interfaces avec l’eau
C’est lors de l’étude de ce procédé que François Ganachaud a poussé plus loin la réflexion, l’amenant à participer à un débat vieux de quarante ans.  

« C’est une bagarre qui ne cesse de durer dans la communauté des physico-chimistes : la charge négative que l’on observe systématiquement aux interfaces entre l’eau et les composés hydrophobes » explique le chercheur.

Par « hydrophobe », comprenez « que l’eau ne mouille pas ». C’est par exemple l’huile, l’air, les lipides ou les polymères.

« C’est pour ça que la plupart des surfaces qui nous entourent (peau, cheveux, tissus, papier…) sont chargées négativement, mais on ne sait pas vraiment à cause de quoi » précise François Ganachaud. « Dans cette histoire, nous nous sommes intéressés à la chimie de l’eau, souvent très simplifiée. En particulier, dans l’eau, il y a des ions bicarbonates qui résultent de la carbonatation de l’eau et qui s’avèrent jouer un rôle plus important que l’on aurait pensé de prime abord. En effet, avec des chercheurs de plusieurs laboratoires*, nous avons découvert que la charge négative évoquée provenait de l’adsorption préférentielle de ces ions bicarbonates sur les surfaces. »

La fin de la bataille et le début de l’histoire ?
En allant à l’encontre de certaines croyances, François Ganachaud avoue qu’il s’attendait, à la publication de cette découverte il y a un an, à quelques droits de réponses bien sentis. Quelques mois plus tard et après une seconde publication sur le sujet, la découverte semble bénéficier d’une forme d’adhésion de la communauté scientifique.

« C’est une vision différente qui ouvre de nouvelles voies. On a par exemple compris comment se formait une émulsion dans un mélange huile/eau soumis à des cycles de gel et de dégel. Lors de la congélation, le dioxyde de carbone présent dans l’air est piégé avant de se transformer en ions bicarbonates, et les gouttelettes d’huile sont stabilisées par ces ions en se collant à leur surface. On imagine que la transformation de CO2 en bicarbonates par congélation de l’eau pourrait intéresser d’autres domaines d’études comme l’océanographie, notamment l’étude de la capture du CO2 par les océans aux pôles terrestres » conclut le chercheur.

 

*L’étude a été pilotée par le laboratoire IMP (CNRS/Université Jean Monnet de Saint-Étienne/Université Claude Bernard Lyon 1). Ces travaux ont également impliqué des chercheurs de l’Institut Charles Gerhardt Montpellier (CNRS/Université de Montpellier/ENSC Montpellier), du laboratoire Charles Coulomb (CNRS/Université de Montpellier) et de l’Institut Charles Sadron (CNRS).

Publications
X. Yan, A. Stocco, J. Bernard, F. Ganachaud
Freeze/Thaw-Induced Carbon Dioxide Trapping Promotes Emulsification of Oil in Water
Journal of Physical Chemical Letters – Octobre 2018
DOI: 10.1021/acs.jpclett.8b02919
 
X. Yan, M. Delgado, J. Aubry, O. Gribelin, A. Stocco, F. Boisson-Da Cruz, J. Bernard et F. Ganachaud
Central Role of Bicarbonate Anions in Charging Water/Hydrophobic Interfaces
Journal of Physical Chemistry Letters – Décembre 2017
DOI: 10.1021/acs.jpclett.7b02993

Photo (de gauche à droite) : Julien Bernard et François Ganachaud, chercheurs à l’IMP de l’INSA Lyon

 

Mots clés

06 juin
Du 06/06/2019
au 07/06/2019

Sciences & Société

Congrès National de spectroscopie diélectrique

Seconde édition pour ce colloque national sur la spectroscopie diélectrique et son utilisation pour la caractérisation des matériaux

Une attention particulière sera portée aux applications associées aux propriétés électriques et diélectriques.

Un temps important sera réservé à la discussion (communications de 20 minutes suivies de 10 minutes de questions/discussions) et une session faisant intervenir des partenaires industriels est envisagée.

Appel à communications en suivant ce format et en précisant la forme souhaitée de la communication (oral ou poster) à adresser avant fin décembre à sebastien.pruvost@insa-lyon.fr
17 oct
17/oct/2018

Recherche

Entre Lyon et Montréal, on discute innovations technologiques dans les avions !

1 630 avions à produire par an pendant 20 ans : voilà le chiffre avancé sur le marché du transport aérien, de quoi alimenter la compétitivité dans le domaine ! Pour apporter des réponses efficaces et innovantes aux constructeurs, trois jours de conférences sont programmés les 12, 13 et 14 novembre prochains à La Rotonde de l’INSA Lyon, dans le cadre des très réputés Entretiens Jacques Cartier. A l’INSA, on reçoit, mais surtout, on participe au débat.

« Nous travaillons depuis près de trente ans avec THALES Avionics, qui a sollicité l’INSA Lyon et plus particulièrement le Centre d’Énergétique et de Thermique de Lyon (CETHIL) sur la question du refroidissement des composants électroniques embarqués dans l’avion. À ces Entretiens Jacques Cartier, nous allons intervenir à deux voix avec Claude Sarno, qui est ingénieur INSA et qui travaille chez THALES depuis longtemps » explique Jocelyn Bonjour, Professeur à l’INSA Lyon.

Lui qui enseigne la thermodynamique et les transferts thermiques au Département Génie Énergétique et Environnement de l’INSA Lyon vient de laisser sa place de Directeur au CETHIL pour prendre celle directeur de l’École Doctorale MEGA de l’Université de Lyon (Mécanique, Énergétique, Génie Civil et Acoustique).
Toujours impliqué dans des activités de recherche, et plus précisément sur des travaux sur les caloducs, Jocelyn Bonjour a permis le développement de plusieurs projets de R&D pour l’avionique, notamment pour le management thermique d’électronique embarquée ou de réacteurs. Il est aussi président du Comité permanent international des caloducs (International Heat Pipe Conference).

« Le management thermique, c’est le terme scientifique pour parler de refroidissement. En effet, on ne peut pas détruire la chaleur, il faut donc l’extraire d’un endroit, la transporter, pour la rejeter à un autre endroit. Dans les avions, les besoins en management thermique peuvent se situer du côté des pilotes et de leurs ordinateurs de bord. Il y a 20 ans, ils utilisaient de simples cartes accessibles sur leur ordinateur de bord. Aujourd’hui, ce sont des empilements de composants électroniques qui produisent énormément de chaleur, qu’il faut pouvoir aller chercher pour l’évacuer » explique Jocelyn Bonjour. 

Jocelyn Bonjour

Vol Rio-Paris : le gel d’une sonde provoque l’accident mortel, un cas d’école pour le CETHIL et THALES Avionics

« Vous vous souvenez sans doute de ce grave accident d’avion entre Rio et Paris, en 2009, raconte le chercheur. C’est le gel d’une sonde, qu’on appelle tube de Pitot, qui a provoqué cette catastrophe. Le tube de Pitot, qui permet au pilote d’obtenir la mesure de l’avion dans l’air, a gelé en vol, ne permettant plus de jouer son rôle d’indicateur. Le pilote, désinformé, ne connaissait pas sa vitesse de vol et est malheureusement passé au-dessous de la vitesse critique. » 

Après cet accident, tous les avions sont rappelés pour être équipés d’une résistance électrique qui permet de générer de la chaleur et éviter le gel.

« Ce n’était pas une solution viable, car la résistance électrique consomme de l’électricité qui ne peut pas être stockée en quantité dans les avions. Avec THALES Avionics, nous avons développé un caloduc qui vient s’adapter sur le tube de Pitot, pour permettre cette fois-ci l’arrivée d’une chaleur inutile ailleurs mais essentielle ici pour éviter le gel » précise Jocelyn Bonjour.

Cette solution, dont les principes de fonctionnement ont été en partie découverts au CETHIL, commercialisée par THALES, est un bel exemple de collaboration scientifico-industrielle, répondant à un enjeu essentiel d’énergie dans le transport. 
Avec Airbus, la réflexion s’engage sur la question de la température des moteurs
Plus récemment, c’est à la société Airbus que le CETHIL a répondu concernant des problématiques liées aux moteurs d’avion. Une réflexion s’est engagée sur la réduction de la dilatation différentielle en homogénéisant la température sur le corps des moteurs. En clair, comment parvenir à une température homogène des moteurs d’avion quand ceux-ci surchauffent alors que le reste de l’avion est plongé dans l’air glacé, risquant ainsi de provoquer une rupture thermique ?

« Nous ne sommes pas des inventeurs, mais des chercheurs. Je dirais-même des découvreurs. Je travaille souvent avec des industriels qui viennent me voir avec des problématiques concrètes. Nous menons dans nos laboratoires des expériences pour comprendre ce qui se passe, et ensuite, nous en tirons parti pour proposer des solutions » conclut Jocelyn Bonjour. 

Des matériaux hautes performances au service de l’innovation aérospatiale
Avec Jean-François Gérard du laboratoire Ingénierie des Matériaux Polymères (IMP), ce sont les liquides ioniques combinés à des résines hautes performances qui seront au cœur du discours, offrant une nouvelle voie prometteuse pour le développement de nouvelles matrices de composites et/ou de formulations d’adhésifs structuraux à base d’époxydes aux caractéristiques non encore atteintes.

« Nous cherchons ici à pousser la performance des matériaux combinant différentes propriétés, résistance aux impacts et à la propagation de fissures voire auto-guérison, tenue au feu, protection contre la corrosion... Forts de notre connaissance de l’intérêt de tels matériaux pour différents secteurs industriels après avoir travaillé avec des sociétés comme Airbus, Ariane, Cytec ou Hexcel, un brevet a été déposé et une maturation se termine avec la SATT Pulsalys. Avec ces liquides ioniques, petites molécules additionnées dans des résines thermodurcissables, nous pouvons aussi accélérer la polymérisation et ainsi réduire les temps de cycle, c’est-à-dire de fabrication. Un gain de temps très intéressant dans un milieu concurrentiel comme l’aéronautique mais aussi l’automobile, friand de matériaux permettant l’allègement des véhicules » indique Jean-François Gérard, ancien Directeur de la Recherche à l’INSA Lyon, actuel Directeur Adjoint Scientifique de l’Institut de Chimie du CNRS à Paris et vice-président du Pôle de Compétitivité AXELERA Chimie, Matériaux et Environnement.

Jean-François Gérard

Des Entretiens historiques entre Lyon et le Québec
Pour ce Professeur expert dans le domaine des polymères, les relations tissées entre la France et le Québec sont historiques. Les échanges entre l’INSA Lyon et différentes entités québécoises dans le domaine de la recherche sont extrêmement anciens notamment avec l’Ecole Polytechnique de Montréal. Outre l’aspect purement scientifique, c’est-à-dire les thématiques communes d’intérêt, c’est aussi la même philosophie qui est partagée dans le cadre des Entretiens Jacques Cartier. À savoir, intégrer les questions liées aux sciences humaines et sociales à des sujets scientifiques, apporter un regard sociétal sur le développement scientifique et technologique, regard qui est une marque INSA.

 

Mots clés

12 nov
12/11/2018

Sciences & Société

Colloque Innovations Technologiques pour l'aérospatiale

Colloque organisé par le Carnot Ingénierie@Lyon & l'action Carnot filière AirCar, les Instituts Aérospatiaux de Montréal (IAM-MAI) et l'Aerospace Cluster) dans le cadre des Entretiens Jacques Cartier 2018.

Programme : 

8h30-8h40
Mot de bienvenue :
Eric Maurincomme, Directeur, INSA Lyon.

8h40-9h00
Introduction au colloque :

  • Christian Moreau, Président Instituts Aérospatiaux Montréal
  • Régis Dufour, Directeur Institut Carnot Ingénierie@Lyon
  • Christophe Ulrich, Président Aérospace Cluster
  • Suzanne Benoit, Présidente Directrice Générale AéroMontréal

9h00-9h30
L'avènement de la propulsion électrique en aviation, un changement majeur de paradigme.
David Rancourt, Assistant professeur, Université de Sherbrooke.

9h30-10h00
IPES, Maboratoire commun avec SAFRAN : Intégration de Puissance en Environnement Sévère.
Christian Vollaire, Professeur en génie électrique, AMPERE École Centrale de Lyon.

10h00-10h30
Contraintes et solutions dans les connecteurs des équipements électroniques embarqués.
Clément Favrat, Directeur de la filiale Canada, NICOMATIC.

10h30-11h00 : pause

11h00-11h30
Les défis des caloducs pour les équipements électroniques embarqués.
Jocelyn Bonjour, Professeur, INSA Lyon.

11h30-12h00
Internet des objets et le suivi de comportement futur : technologies innovantes pour les paliers intelligents.
Yoann Hébrard, Program manager, SKF Aerospace.

12h00-12h30
AIRCAR - programme des instituts Carnot au service des PME de la filière aéronautique.
Jacques Oubrier, Aerospace business development director, ONERA.

12H30-12H45 : SYNTHÈSE

12h45-14h00 : pause déjeuner

14h00-14h30
La fabrication et l'assemblage dans l'espace
Gwenaëlle Aridon, Ingénieur R&D, Airbus Defence & space

14h30-15h00
La fabrication additive métallique : l'importance de contrôler la métallurgie sous-jacente.
Mathieu Brochu, Directeur associé de l'entreprise REGAL, Professeur agrégé et président de recherche, Université McGill.

15h00-15h30
Modélisation virtuelle des procédés de fabrication avancée.
Augustin Gakwaya, Professeur titulaire, Université Laval.

15h30-16h00 : pause 

16h00-16h30
Évolution des matériaux et Technologies pour les structures aéronautiques en matériaux composites.
Henri Girardy, Business development manager, HEXCEL.

16h30-17h00
Les verrous en conception avec la Fabrication additive : challenges et opportunités.
François Corman, Directeur de l'ingénierie de fabrication, ZODIAC Avionics.

17h00-17h30
Les liquides ioniques : une nouvelle voie prometteuse pour le développement de réseaux époxydes à hautes performances
Jean-François Gérard, Directeur adjoint scientifique, IMP INSA Lyon.

17H30 : SYNTHÈSE ET CLÔTURE

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