Nanotechnologie

19 fév
19/fév/2024

Recherche

La micro-sieste : le secret de survie des manchots dévoilé par le système Oneiros de l’INL

Aussi grand qu’une pièce de monnaie, le système de monitoring du sommeil « Oneiros », développé au sein de l’Institut des Nanotechnologies de Lyon(INL), a révélé la stratégie des manchots à jugulaire de l’Antarctique pour veiller sur leurs nids : des milliers d'assoupissements ultra-courts qui permettent aux oiseaux de bénéficier de 11 heures de sommeil, tout en protégeant les œufs de la colonie. L’expérimentation, récemment mise sous les feux des projecteurs du journal scientifique « Science», a été rendue possible grâce au développement d’un appareil d’électrophysiologie de pointe dont Bertrand Massot, enseignant-chercheur à l’INSA Lyon et au laboratoire INL avait la charge. Des enjeux électroniques, à l’optimisation de stockage, en passant par l’anticipation des conditions climatiques sur le continent blanc, il explique l’aboutissement de dix années de recherche.

La quête d'un système miniaturisé pour étudier le sommeil animal
La collaboration entre Bertrand Massot et Paul-Antoine Libourel, chercheur au Centre National en Neurosciences de Lyon, a débuté en 2013. « Paul-Antoine s’intéresse à l’évolution animale à travers le sommeil. Alors qu’il cherchait à réaliser des mesures de sommeil sur des reptiles en captivité à l’aide de systèmes assez lourds et encombrants, il nous avait sollicité pour alléger ces derniers », introduit Bertrand Massot. 
Après plusieurs tentatives fructueuses en animalerie, l’équipe de chercheurs souhaite aller plus loin, et surtout, au plus près de la condition naturelle des animaux étudiés. « En animalerie, on peut considérer que le sommeil est biaisé car dans la nature, l’animal est entouré de ses pairs mais fait aussi face à la prédation. Autant de facteurs qui peuvent influer les cycles de repos. C’est comme ça que nous avons commencé à réfléchir un système miniaturisé. L’objectif était de taille : dans un objet aussi gros qu'un morceau de sucre, il nous fallait intégrer 32 canaux d’électrophysiologie, dont tous les signaux électriques d’un corps, l’activité physique et l’activité métabolique comme la température corporelle, la fréquence cardiaque ou l’électroencéphalographie par exemple ». 
Pendant près de 5 ans, l’équipe cherche le meilleur compromis technique entre la taille, le stockage et la consommation. « Ma recherche consiste à trouver la bonne architecture électronique, en miniature. À l’INL, nous avons l’habitude de travailler sur le corps humain. L’étude animale en conditions naturelles pose d’autres enjeux car nous ne savons pas tout des habitudes de nos sujets d’étude », explique le chercheur de l’INSA Lyon.

 


Le système Oneiros développé au sein de l’INL, 
aussi grand qu’un morceau de sucre.

 

Le défi ultime : surveiller le sommeil des manchots en Antarctique
Après plusieurs phases de tests en conditions écologiques auprès de différentes populations animales, le système « Oneiros » connaît son ultime challenge : recueillir des données de sommeil sur des manchots à jugulaire en Antarctique. « Les manchots vivent entre la banquise et la mer ; il fallait donc que le système miniature résiste jusqu’à 10 bars car ces oiseaux peuvent nager jusqu’à 100 mètres sous l’eau pour chercher leur nourriture. »  
C’est ainsi que l’appareil, qui tire son nom d’Oneiroi, divinité grecque des rêves, s’est mis au chevet des manchots à jugulaire. « Ces oiseaux ont une épaisseur de gras très importante, ce qui a permis de les équiper sans les gêner pour l’étude. Des électrodes ont été placées sur leurs têtes. Sur leur dos, on peut apercevoir des systèmes électroniques : le GPS et le système Oneiros. » 
Pendant plusieurs jours, la dizaine d’oiseaux observée a révélé ses habitudes d’éveil et de sommeil, offrant un regard inédit sur leur vie hypnique. 
Oiseaux nicheurs, les manchots vivent en colonie. Pendant la période d’incubation, la communauté protège ses œufs, en formant des rondes de plusieurs milliers de membres. « Les oiseaux en bord de la colonie sont les plus vulnérables à la prédation. Ils restent des jours entiers debout, sans avoir l’air de dormir. Ce sont eux que nous avons équipés pour comprendre leur stratégie de sommeil. Ils ont montré qu’en fractionnant leur repos en des milliers de siestes de quelques secondes, ils parvenaient à dormir 11 heures, tout en protégeant leurs pairs », explique Bertrand Massot.

 


Équipés du système Oneiros, les manchots partent en mer.

 

Les surprenantes habitudes de sommeil des manchots révélées
En observant les cycles de sommeil des manchots grâce au système Oneiros, les oiseaux révèlent donc une stratégie surprenante pour faire face aux rigueurs de la vie en Antarctique. Ces résultats, s’ajoutent aux observations des scientifiques du Korea Polar Research Institute (KOPRI) qui étudient cette colonie depuis plusieurs années. Dans un contexte de changement climatique rapide, ces découvertes pourraient bien éclairer la voie vers une meilleure préservation de ces espèces vulnérables et emblématiques du continent blanc. « Ces oiseaux, qui vivent en couple, se répartissent la chasse à tour de rôle. Dans un couple, si un membre quitte la colonie pour aller chasser en mer, l’autre reste pour protéger les œufs. Nos données ont aussi pu confirmer qu’ils dormaient en mer. Le micro-sommeil est une découverte en soi car il donne des éléments sur les comportements vitaux des manchots, notamment sur leur capacité à faire face à la prédation. En tant que nanoéletronicien, c’est assez grisant de se dire que ce petit système électronique, dont la miniaturisation relève d’un long travail de recherche, soit capable de révéler des informations aussi utiles qu’étonnantes ! », conclut Bertrand Massot. 

 


Pour protéger leurs pairs, les manchots à jugulaire de l’Antarctique usent
de plusieurs milliers de micro-siestes par jour.

 

[1] CNRS/Université de Lyon/CPE Lyon/Université Lyon 1/Centrale Lyon/INSA Lyon
[2] P.-A. Libourel, W. Y. Lee, I. Achin, H. Chung, J. Kim, B. Massot, and N. C. Rattenborg. Nesting chinstrap penguins accrue large quantities of sleep through seconds-long microsleeps. Science382,1026-1031(2023)

 

Mots clés

27 nov
Du 27/11/2019
au 04/12/2019

Sciences & Société

IN SITU : la semaine de l'innovation de l'Université de Lyon

IN-SITU est une semaine d’événements dédiée à l’innovation et qui a pour objectif de mettre en valeur tous les services, structures et initiatives des établissements d'enseignement supérieur permettant aux acteurs socio-économiques d’innover en partenariat avec l’Université de Lyon.

Cette semaine thématique regroupera plusieurs dizaines d’événements disséminés sur l’ensemble des campus des établissements de l’Université de Lyon, ainsi qu’un challenge d’innovation, un colloque scientifique, une remise des prix ou encore des campus tours.

Nous listons ici les évènements se déroulant sur le campus de la Doua - Villeurbanne où l'INSA Lyon est particulièrement impliqué.

Mercredi 27 novembre 2019

Jeudi 28 novembre 2019

Vendredi 29 novembre 2019

Mardi 2 décembre 2019

Mercredi 3 décembre 2019

Jeudi 4 décembre 2019

 

13 nov
Du 13/11/2019
au 15/11/2019

Sciences & Société

Journées Nationales des Nanofils semiconducteurs" (J2N)

Organisées par l’Institut des Nanotechnologies de Lyon (INL)

Prenant la suite des « Colloques Nanofils » organisés dans le cadre du GDR 2974 "Nanofils et Nanotubes Semiconducteurs" achevé en 2014, les J2N visent à créer un lieu d’échange et de coordination de la recherche sur la thématique des nanofils semiconducteurs couvrant à la fois les domaines de recherche fondamentale, appliquée, et technologique.

Au-delà de présentations scientifiques rapportant les derniers résultats majeurs de la recherche française sur le sujet, les J2N ont aussi pour vocation de faire émerger les thématiques récentes et pluridisciplinaires qui animent l’ensemble de la communauté et de tisser des liens concrets avec le milieu industriel.

Thématiques : 

  • Synthèse/Croissance/Modélisation: approches bottom-up ou top-down, MBE, (MO)CVD, (MO)VPE, dépôt en bain chimique,...
  • Propriétés des nanofils: structurales, optiques, électriques, mécaniques, thermiques,...
  • Applications: nanoélectronique, optoélectronique, photonique, énergie, santé, capteurs, environnement...

Avec la participation de :

  • Edith Bellet-Amalric (Institut Néel - Grenoble)
  • Alain Fave (INL - Villeurbanne)
  • Bruno Grandidier (IEMN - Villeneuve d'Ascq)
  • Jean-Christophe Harmand (C2N - Palaiseau)
  • Bassem Salem (LTM - Grenoble)
  • Nicolas Stein (Institut Jean Lamour - Nancy)

Informations complémentaires

Mots clés

28 nov
Du 28/11/2018
au 30/11/2018

Sciences & Société

Premier colloque du GDR NanOperando

Ces journées scientifiques ont pour but de réunir la communauté du GDR NanOperando et de présenter les derniers résultats autour des (nano)-matériaux évoluant dans leurs milieux naturels ou d’application.

Avec plus de 160 chercheurs impliqués dans le GDR, ce colloque espère réunir les physiciens, les chimistes, les biologistes et les géologues qui s’intéressent à la dynamique structurale des matériaux synthétiques ou biologiques dans un environnement liquide ou gazeux, en exploitant différentes techniques d’analyse in situ, operando (microscopie électronique, microscopie en champ proche ou rayonnement synchrotron) et des approches théoriques.

Les grandes lignes de ce colloque ont été définies avec pour objectif de proposer un programme scientifique interdisciplinaire.

Informations complémentaires

11 oct
Du 11/10/2018
au 12/10/2018

Sciences & Société

GDRe meeting on "Thermal Nanosciences and NanoEngineering"

Dernière réunion du Groupement de recherche européen (GDRE) sur les problèmes des transferts thermiques à l'échelle nanométrique ("Thermal Nanosciences and Nanoengineering") organisée par le thème Micro et NanoThermique (MiNT) du CETHIL.

Ce groupement réunit des chercheurs expérimentateurs, théoriciens et numériciens autour de la conduction thermique et du rayonnement thermique des nano-objets et matériaux nanostructurés. Ces études offrent des solutions pour une série d'applications pour la transition énergétique (récupération d'énergie par la thermoélectricité ou la conversion thermophotovoltaïque), l'électronique (refroidissement des composants par dissipation améliorée de la chaleur générée), la santé (traitement du cancer par hyperthermie localisée sur les cellules malignes), etc. Le premier GDR sur le sujet avait été créé très tôt en France, dès 2002.

60 participants se réuniront pour présenter les résultats des recherches, provenant de plus d'une dizaine de pays européens (notamment Allemagne, Angleterre, Suisse, Espagne, Finlande, et bien sûr la France) ou extra-européens comme le Japon.
De nouvelles modalités d'actions seront également discutées.
 

Informations complémentaires