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Dans les poubelles de Monaco
C’est un pays connu pour son faste, ses princesses et son casino, moins pour ses poubelles. Pourtant, c’est sur ce sujet que la Principauté de Monaco a décidé d’innover. Accompagnés par la plateforme technologique Provademse, des ingénieurs de la direction de l’aménagement urbain du gouvernement princier travaillent à l’élaboration de la prochaine usine de traitement de leurs déchets. Si, pour éviter une crise semblable à celle de leurs voisins corses, l’état prévient ses résidents grâce à des campagnes de sensibilisation au recyclage réalisées régulièrement, les quelques tonnes d’ordures ménagères restent un enjeu crucial pour le territoire. Loin de l’image dépeinte par les tabloïds, le Rocher dévoile un autre visage, entre impératifs économiques et priorité environnementale.
Derrière les strass et les paillettes
C’est au bord de la méditerranée, entre terre et mer qu’il s’étend sur 2 km2. S’il est connu pour son glamour, le deuxième plus petit État indépendant du monde, l’est moins pour son engagement environnemental. Pourtant, S.A.S le Prince Albert II a engagé la Principauté de Monaco à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 et à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 55 % à l’horizon 2030. Avec un arrière-grand-père océanographe, le descendant de la Maison Grimaldi hérite d’une histoire familiale et d’un crédo tournés vers la protection de la nature : mieux connaître son environnement, pour mieux le protéger.
Aujourd’hui, la petite ville-état qui compte environ 39 000 habitants est un véritable terrain d’expérimentations à ciel ouvert. Parmi les infrastructures urbaines destinées à la vie monégasque : l’usine de valorisation des déchets. Haute de douze étages, elle prend place en plein centre-ville au cœur du quartier Fontvieille : sans aucune odeur ni panache de fumée, la troisième génération d’usines fait presque face à la mer. Mais malgré ses nombreuses spécificités et ses 40 années d’existence, l’infrastructure de traitement thermique ne fait plus l'unanimité. Elle fait aujourd’hui l’objet d’un nouveau plan de gestion sur lequel travaillent Laurence Marty, cheffe de section et Gilles Cellario, directeur adjoint de l'aménagement urbain du gouvernement princier. Leur mission : mettre en place une nouvelle usine d’ici 2025 en accord avec l’ambition de neutralité carbone du pays.
La rencontre avec Provademse se fait naturellement, lorsque Jean-Louis Six rejoint la plateforme d’Insavalor il y a quatre ans. « Je travaillais avec Monaco à l’époque où j’étais au CEA. Naturellement, j’ai voulu leur présenter nos activités et leur offrir l’opportunité de s’appuyer sur notre neutralité et notre expertise pour leur projet. Nous avons organisé une rencontre avec Jacques Mehu, le fondateur et ancien directeur scientifique de Provademse », explique-t-il. « Monaco était déjà avant-gardiste en matière de traitement des déchets, notamment avec une des premières usines de valorisation énergétique d’Europe au début du 20e siècle. Lorsque nous avons rencontré Laurence et Gilles, j’ai su que l’histoire allait être exaltante. Nous devions les accompagner dans ce projet ambitieux de révolution du processus de traitement de leurs déchets », explique Jacques, aussi enseignant-chercheur désormais retraité, et encore passionné par le métier.
Copyright : Principauté de Monaco/Twitter
La valorisation des déchets : le cœur de métier de Provademse
« Dépollution et traitement », « nouvelles ressources d’énergie » et « nouvelles ressources matières » : derrière ces mots se cache le terrain de jeu de Provademse : quotidiennement, les équipes de la plateforme technologique travaillent avec les laboratoires de l’INSA Lyon et leurs partenaires industriels, à valoriser ce qui pourrait être le prochain eldorado. « Les déchets sont des produits d’une nouvelle économie car la question environnementale occupe une place grandissante dans notre société. Face à la raréfaction des matières premières comme le sable ou certaines matières vitales par exemple pour de nombreuses industries, le déchet commence à trouver ses lettres de noblesse. Dans le cas de Monaco, dont la densité de population est très forte, c’est une réelle question », explique Jean-Louis Six, l’actuel directeur de l’unique plateforme technologique française dédiée à la valorisation des déchets.
Alors que Provademse accompagnait les ingénieurs monégasques sur le lancement d’un appel à technologies pour la future centrale de traitement, un cas d’étude avait été lancé auprès des élèves-ingénieurs. Avec un cahier des charges très contraignant et une complexité urbanistique et financière affichée, les 5e années du département génie énergétique et environnement s’étaient vus participer à un challenge grandeur nature. Mais pour cette fois, la dimension environnementale du projet était considérée plus importante que la résolution technique, une première pour ces jeunes expérimentateurs. « Le projet est très ambitieux, et le premier appel que nous avions lancé auprès de grands groupes internationaux s’était révélé infructueux. Pour cet exercice, nous leur avions donné très concrètement les mêmes consignes qu’à ces entreprises ! Même si aucune solution à proprement parler ne s’est démarquée malgré leurs précisions techniques, ces étudiants nous ont apporté beaucoup plus. Ils nous ont offert de décaler notre regard sur la problématique et c’était ce dont nous avions besoin. En tant que professionnels, nous nous bridons naturellement, évitons les risques et cet échange avec ces esprits ouverts nous a permis de prendre les choses sous un autre angle », expliquent Laurence Marty et Gilles Cellario.
Expliquer l’ingénierie
Spécialiste de l’innovation technologique et motivée par le respect de l’environnement, la plateforme technologique a l’habitude d’accompagner ses partenaires à mettre en place des éco-stratégies à long terme. « Notre rôle est de faire le lien entre nos collègues des laboratoires de recherche et nos partenaires industriels. Nos experts élaborent des solutions pour traiter et valoriser les déchets qui nous sont confiés, et s’appuient sur nos moyens expérimentaux pour prouver leur efficacité et leur possible industrialisation. Mais je crois qu’avec le projet de Monaco, nous sommes allés plus loin que ça », ajoute Jean-Louis Six, directeur de Provademse.
Pour les partenaires monégasques, le lien s’est étendu au-delà de la recherche et de la technique. « Trouver des solutions technologiques est une chose, et faire comprendre la technique en est une autre. Le traitement des déchets est un sujet difficile et en tant que technicien, il est délicat faire accepter qu’il n’existe pas toujours de solution technique pour une ambition. Le sujet a besoin d’être traité avec pédagogie, de la prise de décision à l’utilisation quotidienne car il est facile de démotiver sur ce sujet, à force de contradictions. L’expertise de Provademse nous a aidés à être plus audibles face à des décisions politiques. Cette forme de dialogue social fait partie de notre métier d’ingénieur, et nous sous-estimons sa force trop souvent », ajoutent Laurence Marty et Gilles Cellario.
À l’heure actuelle, les urbanistes de la Principauté poursuivent l’exercice d’équilibre entre ambitions politiques et environnementales, toujours accompagnés par les équipes de la plateforme technologique villeurbannaise. Des prélèvements de caractérisation des déchets ménagers et assimilés de Monaco sont en cours ; en répondant à des protocoles d’analyse précis, ils offriront un panel des déchets jetés quotidiennement, dans le but d’affiner la solution technologique finale. La nouvelle usine de traitement des déchets devrait être mise en service en 2025. Fera-t-elle toujours face à la mer ?

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Laure Corriga, première femme à la tête d’INSAVALOR
Nicolas Penet ayant annoncé son départ, c’est Laure Corriga, directrice générale du directoire depuis 2018, qui prend les rênes d’INSAVALOR. Interview.
Vous avez été nommée présidente du directoire d’INSAVALOR par le Conseil de surveillance. C’est une surprise ou une réponse attendue ?
« Je fais partie du directoire d’INSAVALOR depuis dix ans et j’ai travaillé en étroite collaboration avec Nicolas Penet. Lorsqu’il nous a informés de son départ, j’avais annoncé mon souhait de prendre sa suite et de garder la même lignée. C’est un vrai engagement. Beaucoup de questions se sont posées quant à l’ampleur de ce poste, et c’est pour cela que nous insistons sur la structure que nous formons, un directoire, avec plus de monde en responsabilité et une grande répartition des tâches.
Nicolas Penet est irremplaçable, notre envie est de faire avancer INSAVALOR avec une vraie ambition pour cette structure. »
Y a-t-il d’autres changements dans l’équipe ?
« Oui, nous avons décidé d’intégrer deux personnes dans le directoire. Rodolphe Bernard devient directeur général après avoir été recruté comme chargé d’affaires en formation continue et être devenu notre directeur formation en 2018. Mathilde Bruyère devient membre du directoire, en charge du déploiement des activités Recherche & Développement / Valorisation d’INSAVALOR, elle est notre responsable Europe depuis 2013. »
Légende : au centre, Laure Corriga et Rodolphe Bernard, respectivement présidente et directeur général du directoire d’INSAVALOR, entourés à gauche de Michel Descombes et à droite de Mathilde Bruyère, membres du directoire.
INSAVALOR semble pouvoir compter sur des engagements fidèles, vous confirmez ?
« Oui. INSAVALOR, c’est avant tout une équipe, avec des salariés présents depuis longtemps, qui ressentent un véritable sentiment d’appartenance à un groupe, à l’INSA Lyon et au Groupe INSA. Nous menons des projets collectivement, en bénéficiant d’une forte cohésion d’équipe. »
Vous dites vous inscrire dans la continuité des actions entreprises avec Nicolas Penet, c’est-à-dire ?
« Trois gros projets nous tiennent à cœur. À commencer par notre positionnement au sein du Groupe INSA. À partir du 1er janvier 2020, nous étendons dans cette optique notre rayonnement et allons assurer la gestion des activités contractuelles R&D de l’INSA Toulouse.
Autre mission, la formation continue. Depuis plus de 30 ans, INSAVALOR développe son offre de formation continue pour accompagner les entreprises sur l’évolution de leurs métiers et favoriser la mobilité professionnelle de leurs collaborateurs. Nous souhaitons répondre à l’appel à projets lancé par le ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation pour l’action Sociétés universitaires et de recherche (SUR), avec l’objectif de valoriser encore plus nos activités de formation continue, certifiées ISO 9001.
Enfin, nous sommes toujours persuadés que l’Europe dans la Recherche offre un potentiel exceptionnel, qui engendre une augmentation des activités de recherche non négligeable. Notre rôle est d’aider les chercheurs à se positionner au niveau européen, et c’est bien notre valeur ajoutée. Il faut décharger les chercheurs d’une certaine lourdeur et les accompagner dans leur projet sur la globalité. Cela commence d’ailleurs en amont, en fléchant les appels à projets qui peuvent les intéresser. L’aspect lobbying et recherche de partenariats est un champ important de cette activité. »
Vous êtes une femme, nommée à la tête d’une filiale R&D, valorisation et formation continue qui fait figure d’exemple dans le monde de l’enseignement supérieur depuis 30 ans. Votre regard sur cet aspect de votre nomination ?
« Je suis très contente de cette décision, et de l’intégration d’une autre femme dans notre directoire. C’est la première fois dans l’histoire d’INSAVALOR et je trouve que c’est un vrai pas en avant, surtout dans le secteur d’activités des sciences dures. Nous obtenons ainsi la mixité et la parité. C’est un joli signe que nous fait notre communauté en nous faisant confiance. C’est encourageant pour l’avenir. »

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CO’Lab-entreprises - Valorisation des données
Intégré à l’événement Le ShaKer, CO’Lab-Entreprises est une action visant à resserrer les liens entre les entreprises du numérique et les laboratoires informatiques de la Région.
Le sujet de la Valorisation des données vous intéresse et vous souhaitez échanger sur l’intérêt d’une collaboration avec un laboratoire informatique ? Cet événement est fait pour vous !
Cet événement aura lieu le 19 octobre matin sur le campus Lyon Tech-la Doua, avec deux temps forts :
- une table-ronde : venez vous inspirer d’industriels ayant collaboré avec un laboratoire de recherche et posez-leur vos questions : concrètement, comment ça marche ?
- des rendez-vous individuels : prenez rendez-vous avec les experts dans votre domaine d’expertise, notamment regroupés dans l’offre DataValor, pour résoudre vos problématiques de valorisation de données.
Informations complémentaires
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Amphi René Char - 403 Rue des Humanités, 69100 Villeurbanne
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Propriété industrielle : l’INSA Lyon dépose son 200e brevet
L’INSA Lyon a franchi dernièrement la barre du 200e brevet. Ce résultat est le fruit d’une stratégie dynamique de propriété industrielle de l’école, confiée à sa filiale INSAVALOR. Focus sur deux exemples de dépôt de brevet : l’un en copropriété avec la start-up Addbike ; l’autre dans le cadre de recherches innovantes menées par le laboratoire IMP avec des potentiels d’application variés.
L’INSA Lyon mène sa politique de propriété industrielle par l’intermédiaire d’INSAVALOR, sa filiale de Recherche & Développement, Valorisation et Formation continue.
L’INSA Lyon procure aux chercheurs un environnement favorable pour s’engager dans des actions de recherche à vocation applicative en lien avec des problématiques industrielles. INSAVALOR accompagne les chercheurs dans le dépôt de brevets et facilite la collaboration avec les industriels sur ce sujet.
CAP SUR L’INNOVATION EN DEUX EXEMPLES !
Le cyclisme urbain : la technologie au service de nouvelles pratiques urbaines
Lancée en 2015, Addbike est une start-up cherchant à faire évoluer le cyclisme urbain. Sa première innovation permet de transformer en quelques minutes tous les vélos urbains ou VTT en triporteurs compacts et maniables. Ce produit répond à un besoin de praticité, de simplicité et d’économie. En effet, ce nouveau genre de triporteur s’adapte aux différents déplacements de la vie quotidienne et permet notamment de faciliter les transports de charges ou d'enfants.
Depuis son lancement, la société bénéficie de l’accompagnement du Centre Technique de l’Innovation MECA3D de l’INSA Lyon, pour la conception des premiers prototypes de l’Addbike. C’est notamment grâce à Pierre Salgas et Guy Carton, enseignants à l’INSA, que la start-up a pu faire naître son concept innovant reposant sur un système de parallélogramme déformable, intégrant un système d'amortisseurs par frottement sec : une géométrie et une conception qui favorisent le transport de charges dans de bonnes conditions.
Ainsi, Addbike a co-déposé avec l’INSA Lyon un premier brevet qui fait l’objet d’une extension internationale. L'INSA et sa filiale INSAVALOR continuent à accompagner AddBike dans ses réflexions autour de l'évolution de ses produits, qui sont commercialisés en septembre 2017.
Les liquides ioniques : des additifs pour améliorer les performances des matériaux
Les liquides ioniques sont des sels « fondus » qui sont, pour la plupart, liquides à température ambiante. En les utilisant en faibles quantités, les liquides ioniques permettent le développement de matériaux haute performance. Ils ont la particularité de représenter aussi une excellente alternative comme agent « vert ».
Le laboratoire IMP (Ingénierie des Matériaux Polymères) a démarré des recherches sur les liquides ioniques dès 2007. Avec des avancées significatives dans ce domaine, le laboratoire a été accompagné par INSAVALOR dans le dépôt de trois brevets, porteurs d’applications dans des secteurs variés : transports, adhésifs, emballages, agriculture…
Les deux premiers brevets concernent la formulation de résines époxy. Grâce à l’utilisation de liquides ioniques, ces résines disposent d'une qualité de robustesse renforcée (ténacité à la rupture), de propriétés hydrophobes (atténuant les phénomènes de corrosion) et une résistance au feu améliorée (avec un rôle de retardateur de flammes). Dans l’aéronautique par exemple, où l’utilisation de composite à base de fibre carbone ou de fibre de verre est très importante, ce « nouveau durcisseur, amorceur de polymérisation » constitue une réelle alternative aux amines conventionnelles soumises au règlement REACH.
Le troisième brevet s’applique à des résines époxy biodégradables et/ou biosourcées. Dans le domaine agricole, il permet par exemple d’envisager la réalisation de films biodégradables (en remplacement du polyéthylène) à la fois rigides et étirables. Des utilisations dans le domaine de l’emballage sont aussi envisagées.
- 200 familles de brevets, avec un nombre moyen de 20 dépôts par an
- 50% de brevets en copropriété avec des industriels