Ecole

09 Jun
09/Jun/2021

Recherche

« Il y avait un point que nous n’avions pas résolu : satisfaire la curiosité des enfants »

Le saviez-vous ? La nuit, toutes les cours d’écoles irradient ! Ils râpent quelques genoux innocents le jour et renvoient dans l’air la chaleur accumulée la nuit : les revêtements d’asphalte noir des cours d’écoles ont été le sujet d’étude d’Hervé Rivano, professeur des Universités et chef de l’équipe AGORA1 du laboratoire CITI2. En collaboration avec la Ville de Villeurbanne et l’école urbaine de Lyon, les chercheurs ont étudié le phénomène des ilots de chaleur urbains depuis les cours d’école. Hervé Rivano explique comment l’expérimentation pluridisciplinaire a fait naître un jeu d’éducation à la donnée à destination des enfants. « Ça va chauffer ! ».

Un kit pédagogique a été développé suite à une expérimentation scientifique dans les cours de deux écoles villeurbannaises. En quoi les travaux de recherche ont-ils consisté ? 

Tout a commencé en 2018 lorsque la Ville de Villeurbanne a entamé une réflexion sur la problématique des ilots de chaleurs et à la façon de réaménager les surfaces urbaines pour réduire leurs effets. Pour cela, la ville a expérimenté dans la cour de l’école Édouard-Herriot, un nouvel enrobé clair et poreux pour diminuer la température du revêtement et ajouté des espaces végétalisés pour favoriser l’ombre et l’évapotranspiration. Elle a ensuite fait appel à notre équipe, et avec l’aide de géographes de l’Université Lyon 3 nous avons mesuré l’impact de ces transformations graâce à des micro-capteurs thermiques. En couplant les résultats relevés avec des données historiques issues de mesures satellites, nous avons réussi à identifier les ilots de chaleurs dans le quartier de l’école et ses environs : globalement, le nouvel aménagement avait un impact. En pleine journée, on a mesuré un écart de presque 8°C sur la température au sol. Mais il restait toujours un point que nous n’avions pas encore résolu : satisfaire la curiosité des enfants de l’école pour lesquels notre présence dans leur cour n’est pas passée inaperçue. C’est ainsi qu’est né « Ça va chauffer ! ».

 

Crédits : Lou Herrmann

Se représenter le travail des chercheurs lorsque l’on a 10 ans est certainement une chose difficile. Comment le kit amène à la compréhension des notions que vous travaillez quotidiennement ? Quels ont été les objectifs pédagogiques ? 

Effectivement, la « donnée » était une chose très nébuleuse pour la plupart des élèves. Mais c’est en cela que l’expérience a été enrichissante. Dès la rentrée qui a suivi nos études, nous avons accompagné les enseignants volontaires pour leur permettre de sensibiliser leurs élèves à la donnée environnementale et numérique, et à l’impact des activités humaines sur l’écosystème. Grâce à l’association Fréquence Écoles, spécialisée dans l’éducation aux médias numériques, nous avons préalablement testé « Ça va chauffer ! » dans deux classes. Et le challenge a été relevé : les classes travaillent sur la donnée numérique sans jamais toucher un écran. Concrètement, le kit est un jeu de « datavisualisation tangible ». Plusieurs scénarios invitent à représenter les données, ici des températures chiffrées, en utilisant des éléments tangibles comme des lego ou des allumettes. Chaque équipe doit ensuite expliciter ses choix de représentation à la classe et il y a évidemment des choses très surprenantes qui ressortent. L’intérêt est de faire mobiliser des concepts mathématiques ou des symboliques dont ils n’ont pas conscience, et de s’apercevoir que leurs propres conceptions ne sont peut-être pas les mêmes que celles de leurs camarades.

Crédits : Ville de Villeurbanne

L’exercice est donc d’utilité scientifique et citoyenne. Pourquoi est-ce important de les sensibiliser à la data ? 

Je crois que c’est une volonté commune que nous avions avec Fréquence Écoles et l’École urbaine de Lyon, de donner les clés de compréhension aux citoyens pour qu’ils soient en capacité de vivre dans une société numérique. Un chiffre n’est pas une vérité absolue et objective, même s’il provient d’une machine, pour la simple et bonne raison que celle-ci a été paramétrée selon des choix humains, et que le chiffre peut aussi contenir des incertitudes de mesure. C’est une notion qui est parfois difficile à comprendre, pour petits et grands ! Et c’est ici que nos interventions ont été pertinentes car elles ont d’abord permis d’expliquer cela aux enfants, mais surtout, elles ont donné du grain à moudre sur la façon dont ces esprits plus ou moins vierges de préconceptions, appréhendent des concepts inconnus. L’explication par la représentation permet de faire abstraction de l’aspect quantitatif de la donnée, qui fait d’ailleurs souvent dire des bêtises aux journalistes par exemple. Les élèves se focalisaient surtout sur le côté qualitatif de la donnée. 

Crédits : Fréquences écoles

En tant qu’enseignant à des plus grands élèves, que retenez-vous de cette expérience ? 

Ce n’est pas tant sur la technique que j’ai appris, mais plutôt sur la capacité des jeunes esprits à créer et s’approprier des concepts de manière intuitive. En tant qu’enseignant, et être humain, on a tendance à imposer notre propre représentation en la transmettant à nos étudiants. Et lorsque vous envisagez la transmission du savoir autrement, avec ici une approche dite « par problèmes » comme nous l’expérimentons au département FIMI, les acquis sont différents. Avec « Ça va chauffer ! », on donne du grain à moudre aux élèves pour voir ce qu’ils en font. Résultat : la solution au problème s’impose à eux, et ils ont appris par eux-mêmes. C’est un super projet qui nous a fait comprendre plein de choses. J’espère qu’une fois mis en libre accès, le kit « Ça va chauffer ! » pourra irradier dans d’autres écoles. Et même s’il n’est qu’un ‘produit dérivé’ de nos recherches au sein du laboratoire CITI, il a répondu à un objectif personnel : apporter la connaissance jusqu’aux enfants car mon rôle de chercheur est aussi de contribuer à faire avancer la société avec mes recherches. 


Plus d’informations : 

1 AlGorithmes et Optimisation pour Réseaux Autonomes
 2 Centre d’innovation en télécommunications et intégration de services (INSA Lyon/INRIA)
 3 Formation Initiale aux Métiers d'Ingénieur

 

 

 

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18 Oct
18/Oct/2018

Formation

Ingénierie lumière-surfaces : la recherche avance !

Le 2 octobre à Saint-Etienne a été inaugurée l’École Universitaire de Recherche (EUR) Manutech-Sleight qui compte l’INSA Lyon parmi ses partenaires.
Nominée en octobre 2017 dans le cadre d’un appel à projets du Programme d’Investissements d’Avenir 3 (PIA3), l’EUR Manutech-Sleight, pour Surfaces Light EngIneerinG Health & Society, a pour ambition de devenir une référence internationale dans le domaine de l’ingénierie lumière-surfaces. 

« Nous espérons que l’EUR Manutech-Sleight servira de facilitateur pour de nouveaux projets de recherche et de formation car le financement de l’Agence Nationale de la Recherche (ANR) sur dix ans est une réelle chance de bâtir quelque chose sur le long terme à un niveau européen », indique Anne Tanguy, Présidente du Conseil Scientifique de l’EUR, Professeure à l’INSA Lyon et chercheure au laboratoire de mécanique le LaMCoS.

Optique-photonique, sciences des matériaux, mécanique, imagerie, informatique et bio-ingénierie, voilà les grands domaines couverts par cette nouvelle EUR, qui a pour objectif de stimuler des interactions scientifiques et académiques.

« On découvre de nouvelles activités de recherche, on noue des liens avec des chercheurs d’autres domaines et on s’aperçoit que les possibilités de projets collaboratifs sont nombreuses, indique Anne Tanguy. Manutech-Sleight nous permet ces échanges décomplexés autour de disciplines différentes ». 

Et les applications sont nombreuses : énergie, capteurs, biologie ou encore la santé.

« Les croisements de compétences donneront lieu à des applications industrielles concrètes et immédiates dans le domaine biomédical, notamment sur les prothèses inorganiques, l’assistance chirurgicale et la différenciation cellulaire » ajoute la Présidente du Conseil Scientifique.  

Un savoir-faire complémentaire
Pour atteindre ses ambitions et viser une meilleure compréhension de l’ingénierie lumière-surfaces, Manutech-Sleight a ainsi structuré son projet en trois axes de travail autour des processus de modification de surfaces, de l’analyse des propriétés de surfaces et du transfert technologique. 

« Il existe une complémentarité de compétences très riche parmi les partenaires de notre EUR, explique Anne Tanguy. L’INSA Lyon possède des savoir-faire internes en optique et analyse d’image, par exemple au LaMCos, un laboratoire de mécanique, qui avait déjà sur une petite activité en optique pour l’analyse de la réponse mécanique. Mais il n’existe pas de département dédié au sein de l’INSA Lyon. Lorsque l’on croise les disciplines, on obtient de nouvelles techniques innovantes qui peuvent faire avancer la recherche » précise-t-elle.

Treize partenaires académiques, industriels et chercheurs font partie de cette grande aventure et nourrissent une ambition pédagogique forte. Manutech-Sleight souhaite augmenter l’attractivité de formations d’excellence grâce à des diplômes internationaux interdisciplinaires intégrés et des systèmes de bourses pour les Masters concernés.

« L’EUR s’appuie sur six masters et formations d’ingénieurs, dont un diplôme INSA. Nous songeons à bâtir une formation conjointe en regroupant les compétences de chacun des partenaires. Je suis ravie que l’INSA Lyon soit autant impliqué dans les volets formation et recherche : le LaMCoS, les laboratoires Matéis et Creatis représentent l’apport recherche de la part de l’INSA Lyon et un quart des représentants du comité pédagogique est de l’INSA Lyon » ajoute Anne Tanguy. 

Dès le 8 janvier 2019, L’EUR Manutech-Sleight organisera des semaines scientifiques interdisciplinaires ouvertes à tous les partenaires.  

 

Les écoles universitaires de recherche
Sélectionnées par un jury international, les EUR sont des structures destinées à animer une communauté de chercheurs, d’enseignants-chercheurs et d’étudiants autour d’une même thématique scientifique. Depuis la rentrée 2018 en France, 29 Ecoles Universitaires de Recherche ont vu le jour grâce à un financement de l’ANR (Agence Nationale pour la Recherche). Leur vocation est de regrouper des laboratoires et centres de formation autour de projets pluridisciplinaires.
Manutech-Sleight, créée à l’initiative du laboratoire Hubert Curien de Saint-Etienne et coordonnée par l’Université de Lyon, rassemble 13 partenaires :
-    Université de Lyon
-    Université Jean Monnet
-    INSA Lyon
-    Mines de Saint-Etienne
-    Ecole Centrale de Lyon
-    Université Claude Bernard Lyon 1
-    ENISE
-    Institut d’Optique Graduate School
-    CNRS
-    Inserm
-    GIE Manutech-USD
-    HEF
-    Kéranova

Pour plus d’informations https://www.univ-st-etienne.fr/fr/tous-les-faits-marquants/annee-2018-2019/zoom-sur/lancement-eur-manutech-sleight.html
 

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16 Feb
16/Feb/2017

Vie de campus

Classic Racing School : une école de pilotage vintage montée par des étudiants !

Ils sont encore élèves-ingénieurs à l’INSA Lyon et lancent la première école de pilotage de voitures de courses vintage. Entre bonne étoile, rencontres déterminantes et signes du destin : retour sur l’aventure hors du commun que vivent Julien Chaffard et Morgan Pezzo.

Quand Morgan Pezzo débarque à l’INSA Lyon après un DUT Génie Mécanique, il est passionné d’automobile mais ne sait pas encore de quoi son avenir sera fait. En 3ème année au département Génie Mécanique de l’INSA Lyon, il se rapproche de la vie associative et choisit de rejoindre le PIC, Proto INSA Club, pour participer à la fabrication d’un engin à moteur à faible consommation d’essence et gagner des compétitions. C’est là qu’il fait réellement la connaissance de Julien Chaffard, de la même promotion que lui, et vice-président du PIC. Les deux étudiants s’apprécient et développent chacun leurs propres compétences, sans imaginer que quelques mois plus tard, elles feront une excellente combinaison.

La saison des stages arrive. Morgan part en Suisse chez Rolex, Julien rejoint AGS Formule 1 sur le circuit du Luc au Nord de Saint-Tropez. Entre luxe et belles carrosseries, les deux passionnés se jalousent tout en mesurant la qualité de leurs opportunités respectives.

« Sur un concours de circonstances, je me retrouve pendant ce stage à conduire des voitures et à les mettre au point pour les clients. L’écurie était remplie de Formule 1 rutilantes très attirantes pour les clients, et dans l’entrée, sur la gauche, étaient discrètement exposés 3 modèles de plus petites monoplaces anciennes, sur lesquelles les visiteurs finissaient toujours par s’attarder » raconte Julien.

Le jeune élève-ingénieur fait sa petite prospection et mesure un intérêt réel pour ces vieux engins à moteur, qui ont connu leurs heures de gloire dans les années 70.

« Je sens un engouement certain pour ces véhicules à la ligne épurée, de faible puissance, qui permettent la maîtrise et l’exploitation totale par leur propriétaire à faible coût d’entretien… Je suis séduit aussi » poursuit Julien.

Hasard ou coïncidence, il fait la connaissance sur le circuit de Bruno Gardien, un client intéressé par son parcours d’étudiant. Les hommes parlent rêve et écurie de courses et Bruno laisse sa carte à Julien, comme on jette une bouteille à la mer.

Les stages s’achèvent, Morgan reste à l’INSA Lyon et se lance dans le montage du premier salon des transports innovants tout en prenant la suite de Julien au PIC. Julien, lui, part pour l’année au Canada et découvre Entrepreneuriat Laval, l’un des premiers accélérateurs d’entreprises au monde. Quand Morgan explose le carnet d’adresses et ramène 12 sponsors au PIC, Julien développe sa culture entrepreneuriale et commence à croire à un projet d’école de pilotage de voitures anciennes, à l’image des modèles exposés sur son lieu de stage.

« L’idée avait germé à force d’en parler autour de moi et d’avoir des réactions très positives. Je décide de rappeler Bruno Gardien » explique Julien.

Les deux hommes pactisent et en excellent mentor, Bruno relit les plans d’affaires, corrige les premiers contrats, apprend à sa jeune pousse l’attitude d’un business man, et le met en garde contre les pièges du marché. Paré, Julien enchaîne les démarches et contacte constructeurs automobiles et circuits de course.

« Le constructeur Crosslé Car Company avait une vieille Formule Ford dans son usine d’Irlande du Nord, et le directeur du circuit de Charade, légendaire pour le sport automobile en France dans les années 70, est séduit par mon projet » confie Julien, qui, de retour du Canada en mai 2016, rencontre enfin tous les acteurs avec qui il échangeait à distance.

Depuis mars 2016, Morgan a décidé de le suivre dans l’aventure.

« J’ai accepté, parce que j’avais suivi toutes les étapes de sa réflexion. Je venais d’ailleurs de m’engager aux côtés de Vincent Beltoise, pilote de course et élève sportif de haut niveau à l’INSA pour m’occuper de ses partenaires et le suivre sur les circuits. Il aura en fait lui aussi un rôle à jouer dans l’aventure » ajoute Morgan.

Les deux insaliens s’envolent alors pour l’Irlande du Nord à la rencontre de Paul McMorran, directeur de Crosslé Car Company. Et là encore, le projet va prendre une autre dimension.

« On ne voulait pas juste acheter une voiture, on voulait lui expliquer pourquoi. Et on découvre qu’il possède encore tout le savoir-faire et l’outillage pour fabriquer ces anciennes voitures ! On lui propose un deal : on conserve le châssis, la ligne, l’esprit et les sensations de vieux modèles, mais on change le moteur pour que les normes de bruits des circuits soient respectées et on permet l’adaptabilité du pilote » précise Julien.

Avec Morgan, ils achètent la Crosslé 16F d’un ancien pilote irlandais, Tommy Reid, et passent une commande de 7 voitures neuves au PDG de Crosslé Car Company. C’est décidé : l’école de pilotage ouvrira ses portes en juin 2017.

« Une poignée de main a suffi. Paul McMorran ne nous a pas demandé d’acompte, a lancé la production et nous a proposé un échéancier. C’était incroyable ! » se souviennent les deux étudiants.

La Classic Racing School est sur les starting-blocks avec une offre de service très simple : des monoplaces rétro, des locaux aménagés au look vintage, et une vraie expérience haut de gamme aux airs de voyage dans les années 1970. Concernant les voitures, il s’agit là de proposer un produit plaisir à des clients passionnés qui leur permet d’accéder à un réseau de contacts et qui par la même occasion aident deux jeunes entrepreneurs passionnés d’automobile à monter leur école de pilotage.

« L’idée est de rendre un acheteur propriétaire d’un des 7 exemplaires de Crosslé uniques au monde, de stocker et assurer l’entretien de sa voiture sur le circuit de Charade, de lui organiser des journées circuit en totale prise en charge, et de proposer son véhicule à nos clients de l’école de pilotage, encadrés par des pilotes comme Vincent Beltoise ou des instructeurs » résume Julien.

4 acheteurs se sont déjà portés acquéreurs et pourront découvrir comme le grand public le modèle construit par Crosslé Car Company le jeudi 23 février 2017 à Londres, lors du festival Historic Motosport International 2017.

En attendant, Julien et Morgan ont obtenu le statut d’étudiant entrepreneur et bénéficient du soutien de l’incubateur lyonnais Beelys. Ils se consacrent à 100% à leur société depuis la fin du mois de janvier 2016 et font figure d’ambassadeurs de la filière créée sur la base de leur profil : la filière entrepreneuriat qui s’adresse aux étudiants créateurs d’entreprise pendant leurs études. Ils seront ingénieurs diplômés l’an prochain de l’INSA Lyon.

 

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