INSA LYON

16 Dec
16/Dec/2020

INSA LYON

Hublo : un diplômé INSA réinvente le pressing 

Commerces dits « essentiels » pendant le confinement, les pressings font partie de ces commerces de proximité qui animent les centres villes et quartiers. Pourtant régulièrement sommée d’anti-écologique malgré les nombreuses tentatives de rendre la filière plus durable, l’activité peine à se renouveler et surtout, à minimiser son empreinte carbone. 

Stéphane Cohen est un ingénieur INSA diplômé de 1994. Après une vingtaine d’années au service de multinationales américaines, il revient à la vie locale et reprend deux pressings parisiens. Depuis 7 mois, Hublo propose ses services et promet de belles années de nouveauté aux artisans blanchisseurs. Entre machines et quelques kilos de linge, se profile le portrait d’un homme qui a décidé de mettre la technologie au service de l’environnement et du lien social. Interview.

En 2020, vous vous êtes lancé dans le grand défi de l’entrepreneuriat. Késako Hublo ?

Hublo est une entreprise de pressing dont l’objectif est simple : réduire l’empreinte carbone du nettoyage textile tout en soutenant l’économie de proximité. Pour le client, il s’agit de confier son linge à notre équipe de professionnels à travers l’application mobile dédiée ou déposer son linge en main propre, et on s’occupe de tout ! Une fois récolté et lavé grâce à des techniques de nettoyage écoresponsables, le linge est livré en triporteur électrique jusqu’à la porte du client s’il le souhaite. Il faut dire que l’activité de pressing traîne encore une image incompatible avec l’enjeu environnemental notamment à cause de certains solvants utilisés par le pressing traditionnel. Je veux proposer une transformation de l’activité tout en faisant de mon entreprise, une actrice du changement vers un monde plus vert et socialement responsable. 

Vous avez passé près de vingt années à travailler pour les plus grands noms de la tech mondiale. Vous ont-elles inspiré pour créer Hublo ? Ou êtes-vous au contraire vacciné contre leurs façons de voir le monde ?

Je crois que je n’ai gardé que deux choses. La première, c’est une vision. Après être passé par IBM, Motorola et Google, j’avais rejoint une entreprise un peu plus petite dont le patron était finalement quelqu’un de particulièrement humain, et cet homme m’a marqué. Sa vision était très éloignée des valeurs financières que j’avais connues auparavant. En créant Hublo, j’avais envie d’implémenter ce que j’avais appris de ce dernier directeur. La seconde chose que j’ai acquise de mon expérience, c’est l’outil technologique. Hublo est fondée sur une application et implémente des principes d'intelligence artificielle qui permettent d’optimiser les process, depuis le dépôt de linge, en passant par le lavage et le retour chez le client. Mais au-delà de ça, je souhaite utiliser cette IA pour exploiter les données produites par l’activité pressing pour une chose en particulier : minimiser l’empreinte carbone. Finalement, c’est peut-être ça dont j’ai surtout hérité de ces grosses entreprises : j’ai acquis la conviction que la technologie n’est pas une fin en soi, mais qu’elle doit être au service de valeurs sociétales. J’ai donc choisi que ma société soit au service de l’environnement, de l’être humain, et du développement de l'industrie et de l'artisanat français. Hublo est une société à mission : ces valeurs sont inscrites dans ses statuts.

En somme, vous souhaitez redonner un coup de jeune à un vieux métier grâce à la technologie ?

Le pressing est un métier qui a connu beaucoup d'évolutions jusqu’à l’arrivée des machines automatiques domestiques. Bien sûr, le temps de la lavandière qui frottait le linge dans les ruisseaux est dépassé, mais il reste encore beaucoup à faire en matière de responsabilité environnementale. En France, plus de 7 milliards de lessives domestiques sont lancées et 2,3 millions de machines à laver sont vendues chaque année. Les lessives utilisées ne sont pas toujours éco-compatibles, mais surtout, ce sont les microparticules plastiques déversées dans les océans car trop petites pour être filtrées par les stations d’épuration qui rendent l’impact conséquent. Avec Hublo, il s’agit tout d’abord de mutualiser les machines pour réduire le coût carbone par famille. Puis aussi, de faire prendre conscience à nos clients de l’impact de leurs cycles de nettoyage sur l’environnement grâce aux mesures que nous sommes capables de faire avec l’intelligence artificielle. Faire tourner son lave-linge est devenu quelque chose de si machinal qu’on ne s’imagine pas qu’un geste si simple puisse faire autant de dégâts sur la planète. En tant que « société à mission », je crois qu’il est plus que temps de faire passer ce message.

Vous faisiez le parallèle avec les lavandières dont les quotidiens étaient finalement remplis d’échanges sociaux. Le pressing fait partie de ces commerces de proximité qui favorisent le lien social. Est-ce quelque chose d’important pour vous ? 

C’est primordial, même. Je viens de ces grosses boîtes où j’avais rapidement perdu la valeur de proximité et de la force de l’échange local. En m’implantant sur le marché français, c’est une des valeurs que j’ai voulu continuer à cultiver avec les deux pressings. Ici, le lien social est vraiment partout car c’est un métier où la confiance est indispensable entre l’artisan et le client : les gens vous confient une part de leur intimité à travers le linge à laver. Aussi, je crois que si le confinement a révélé de nouvelles habitudes d’achats, notamment en rapprochant les français avec leurs commerçants de proximité, c’est aussi pour ce besoin de confiance et de convivialité. Ce lien est si étroit que parfois, les clients appellent leurs commerçants par leurs prénoms ! C’est important de continuer à le valoriser. Et vous, connaissez-vous le prénom de votre artisan de pressing ?