
Vie de campus
Lutte contre la crise sanitaire : la solidarité s’organise
Les initiatives de dons avaient rapidement émergé, avant même que le confinement soit annoncé. Masques, blouses ou gants : les laboratoires ont spontanément fait état de leurs stocks pour distribuer leur matériel de protection individuelle aux personnels hospitaliers, démunis face à la pénurie de matériel indispensable à leur protection contre le Covid-19.
Depuis les laboratoires de recherche…
Laurent Kodjikian et Xavier Armoiry, praticiens hospitaliers et chercheurs au laboratoire MATEIS1, avaient tiré la sonnette d’alarme bien avant le début du confinement. « La lutte sanitaire n’en est qu’à ses balbutiements et nous sommes déjà en pénurie de certains matériels de protections individuelles médicales dans nos hôpitaux respectifs », avait prévenu Laurent. Rapidement, l’équipe du laboratoire de recherche s’est organisée pour fournir à l’Hôpital de la Croix-Rousse, en première ligne pour le combat contre le Covid-19, des masques, des gants, des blouses à usage unique et des sur-manches. « Ce sont des équipements que nous utilisons régulièrement au cours de nos manipulations en laboratoire. Nous ne pouvions pas rester sans rien faire face au tsunami qui s’annonçait », explique Jérôme Chevalier, chercheur et enseignant au département Sciences et Génie des Matériaux. L’initiative de collecte s’est organisée très rapidement pour faire face à l’urgence du besoin en matériel. « Cette collecte a rapidement pris de l’ampleur, avec la participation de laboratoires de la fédération INGELYSE et du Carnot Ingénierie@Lyon. C’est rapidement devenu un élan collectif impliquant plusieurs laboratoires et établissements », ajoute Jérôme.
…jusqu’au département FIMI,
L’élan de solidarité a soufflé jusqu’au département FIMI2 où deux techniciens de la plateforme de travaux pratiques de chimie, Hervé Humbert et Blanche Pasquier, ont confectionné du gel hydro-alcoolique dès le début du mois de mars. « Au début, il s’agissait surtout de le mettre à disposition des élèves dans les salles de TP. Une fois le confinement annoncé, j’ai été autorisé à venir sur le site pour vérifier la sécurité du matériel scientifique. J'en ai profité pour conditionner la cinquantaine de litres de gel et l’ajouter à la cargaison de MATEIS », indique Philippe Steyer, professeur de Chimie et responsable de la plateforme.
en passant par la Chine.
Même depuis la Chine, les Alumni INSA se sont mobilisés. Yahui Zhu, ingénieure INSA et Dan Ye, représentante de l’INSA à Shanghai, sont à l’origine de la collecte de 17 600 masques. Par solidarité pour leur pays de cœur qui fait face à une situation au goût de déjà-vu pour elles, Yahui et Dan se sont organisées pour la collecte et l’envoi de masques. « Nous étions dans la même situation que la France il y a seulement quelques mois. Nous savons à quel point les hôpitaux manquent cruellement de protections individuelles et il nous a semblé très important de leur venir en aide. C'est une période très dure et il est important de s’entraider », explique Dan Ye.
Tout est parti d’un message adressé à l’ancienne étudiante de l’INSA Lyon. « J’ai reçu plusieurs sollicitations sur les réseaux sociaux, d’étudiants et d’Alumni INSA Chinois, qui avaient eu écho de la situation sanitaire en France. En collaboration avec l’Ambassade de France à Shanghai, nous avons obtenu l’accord d’envoyer des masques de protections aux hôpitaux français grâce aux nombreux dons d’anciens étudiants Chinois de l’INSA, Sciences Politiques et de l’ESSEC. Nous avons essuyé quelques déboires avec la logistique et les problématiques administratives et la première livraison n’a pas pu encore avoir lieu, à notre grand désespoir. Mais nous sommes sur le pied de guerre pour faire partir notre cargaison de masques et de protection dans le prochain avion ! », ajoute Yahui.
De l’importance d’organiser les initiatives
Pour le moment, les donations en matériel de protection ont été faites en urgence aux Hospices Civils de Lyon (Hôpital de la Croix-Rousse et l’Hôpital Mère-Enfant) et au CHU de Saint-Étienne. De nombreuses initiatives ont rapidement suivi, comme celles de Centrale Lyon, l’Institut de Chimie de Lyon, l’Université Gustave Eiffel, l’Université Jean Monnet et Polytech-Lyon. « Les personnels hospitaliers ont accueilli notre livraison avec beaucoup d’émotion et de gratitude. ‘Au front’ contre la maladie, ils ont été très reconnaissants de la spontanéité du geste et nous savons que le matériel a été utilisé très rapidement. Ces premiers dons ont été une première étape et il est important qu’ils s’inscrivent dans la durée : ils se sont mis en place de façon plus ordonnée et coordonnée par les établissements qui organisent aujourd’hui’hui des collectes et des dons de plus grande envergure. L’action collective a fonctionné et elle peut encore le faire », appelle Jérôme Chevalier.
Merci aux laboratoires MATEIS, INL, Creatis, LMFA, LaMCoS, BF2i, Carmen et les départements FIMI, Génie Mécanique et Biosciences pour leurs dons de masques et matériel de protection.
1 Matériaux Ingénierie et Sciences (UMR 5510)
2 Formation Initiale aux Métiers d’Ingénieur

Formation
Ex-machina : les étudiants réinventant la lumière
D’un côté Pierre Soulages, le noir et la lumière. De l’autre Léonard de Vinci, la technique et l’imaginaire. Si les œuvres des deux artistes se partagent actuellement le Musée du Louvre à l’occasion de deux expositions anniversaires, elles se sont également rencontrées lors du projet « Ex-machina » mené par une trentaine d’étudiants d’arts-plastiques-études et théâtre-études en 2e année de Formation Initiale aux Métiers de l’Ingénieur de l'INSA Lyon. Au cœur de la machine, un peu de lumière, un peu de technique et beaucoup d’investissement étudiant.
Elle se déplace lentement sur un plateau rectangulaire tapissé de sable noir. La machine inspirée par Pierre Soulages et Léonard de Vinci ressemble au char d’assaut conique dessiné il y a 500 ans par le génie italien. Guidé par des capteurs de contact, l’engin autonome se déplace sur ses deux roues suivi d’un peigne-râteau en bois. Il laisse son empreinte sur le sable noir à la manière de Pierre Soulages qui fait naître des formes sur ses toiles « outre noir ». Les reliefs créés réfléchissent la lumière artificielle disposée de part et d’autre du plateau. À travers son chapeau de plexiglas qui laisse entrevoir son squelette coloré et lumineux, la machine semble dire aux spectateurs : la lumière est partout. Dans le noir, dans le relief, et dans la technique.
Lumières et matières
Camille Bouchinet, en 2e année de FIMI et arts-plastiques-études, explique le processus de création de cette machine baptisée par les étudiants « Luxie 44 ». « Le brief de départ était de fabriquer de la lumière. Avec tout ! Les matières, les formes, les couleurs… Nous avons fait émerger plusieurs idées en constituant des groupes de travail, pour finalement faire converger les meilleures idées. Tout le monde y a laissé sa patte, tant les 26 étudiants d’arts-plastiques-études que les quatre élèves de théâtre-études en option technique qui nous ont aidé à dessiner le dispositif lumineux. Le plus gros de notre travail a été d’exploiter les matières et les formes pour faire ressortir la lumière : depuis le mât central de la machine jusqu’au sable de fonderie qui laisse un relief et des reflets avec le passage du peigne-râteau. Il a également fallu travailler les rouages mécaniques, qui entraînent le mouvement de Luxie 44. C’était un projet technique qui rentrait en totale résonance avec notre formation d’ingénieur-artiste », explique l’étudiante.
Concevoir la lumière
L'écho pédagogique était important pour Emmanuel Cartillier, responsable de la section arts-plastiques-études et professeur de conception en FIMI. « Un des modules des cours de conception du premier cycle est la production d’un modèle volumique. J’ai profité de ce cours de travaux dirigés pour embarquer les étudiants dans le voyage. Tout devait être conçu et fabriqué à l’INSA, grâce notamment à la plateforme de production FIMITECH qui offre de grandes latitudes en matière de fabrication. Les étudiants se sont organisés en différents pôles : les spécialistes des roues, les spécialistes du râteau, ceux du bâti et de la motorisation. »
En collaboration avec l’École Nationale Supérieure des Arts et Techniques du Théâtre (ENSATT) et l’Université de Lyon (UDL), tous deux porteurs du projet « Les rêveries Lumineuses de Léonard », le groupe d’étudiants a ainsi rendu hommage à deux artistes qui auront marqué leur époque. « Au départ nous voulions, avec Cécile Beaugiraud du service culturel de l’INSA Lyon, rendre hommage à Pierre Soulages qui fête ses 100 ans cette fin d’année. La rencontre avec l’ENSATT et l’UDL a donné encore plus d’ampleur au projet : mêler deux hommages en un objet artistique et technique. Notamment grâce au travail mené en collaboration avec la direction artistique de l’ENSATT, les étudiants ont autant évolué sur leurs compétences techniques qu’artistiques. Ce projet est une vraie réussite », conclut l’enseignant.
Luxie 44 a déjà parcouru plus de 20 km depuis sa première exposition à la Fondation Bullukian à l’occasion de la Fête des Lumières 2019 devant presque 10 000 spectateurs. Elle continue son petit bonhomme de chemin à la galerie du centre des humanités de l’INSA Lyon jusqu’au 17 janvier 2020 et pourrait également voir du pays, jusqu’au Japon, où les étudiants se rendront dans le cadre d’un projet pédagogique.