INSA LYON

13 Abr
13/Abr/2021

INSA LYON

« Si on ne s’attaque pas à la question de l’égalité, on verra poindre une crise dans la crise. »

Le 22 avril prochain, l’INSA Lyon accueillera l’étape lyonnaise du « Grand Tour #NotreGénérationÉgalité » qui porte une ambition forte : favoriser l’égalité réelle dans une société plus inclusive, durable et respectueuse de chacune et chacun. Pour concrétiser cette ambition, le « Grand Tour » propose une quinzaine de rendez-vous consultatifs pour connecter les préoccupations de toutes et tous à l’action diplomatique du pays en vue du sommet initié par ONU Femmes, le Forum Génération Égalité. Et la communauté de l’INSA Lyon est sollicitée. Thomas Friang, fondateur et directeur général de l’Institut Open Diplomacy, explique la démarche qui se veut participative.

Une tribune publiée dans les pages du Monde, également co-signée par l’INSA Lyon, débute sur l’idée suivante : d’un point de vue législatif, l’égalité est « en bonne voie », mais la réalité est encore toute autre. Pourquoi les lois ne suffisent-elles pas à construire une société égalitaire ?

Ce que cette idée veut surtout dire, c’est que bâtir une société exemplaire est plus difficile que de faire une loi. Bien sûr, l’arsenal législatif renforce les moyens de lutter contre les inégalités et ont des répercussions très concrètes comme la loi Veil qui a permis la dépénalisation de l’avortement ou la loi Coppé-Zimmerman qui veille à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration par exemple. Ces lois existent et ont fait progresser l’égalité femmes-hommes, mais elles ne nous emmènent pas au dernier kilomètre. Ce qui prend du temps, c’est le développement d’une culture égalitaire qui n’adviendra que quand cet objectif sera partagé, non pas seulement par les pouvoirs publics, mais par la société toute entière, les entreprises et les associations autant que les collectivités publiques, par les hommes autant que par les femmes. On ne peut pas parvenir à une société égalitaire sans que chacun des acteurs ne soit impliqué dans la conception et la mise en œuvre de cette société plus juste. L’esprit et les moyens de la législation sont une chose, son appropriation par toutes les forces civiques en est une autre. Nous souhaitons passer des droits formels aux droits réels.

Le « Grand Tour » donne lieu à plusieurs grandes conférences et fera étape -virtuellement - à l’INSA Lyon le 22 avril prochain. Il convie la communauté insalienne à exprimer ses idées pour construire une société égalitaire. Ce que l’Institut Open Diplomacy nomme « la philosophie de la diplomatie participative » est donc une façon de passer du cadre législatif à une réalité plus égalitaire ? Pourquoi solliciter les établissements d’enseignement supérieur en particulier ? 

Effectivement, ces quinze rendez-vous citoyens prépareront « Le Forum Génération Égalité », un sommet initié par ONU Femmes que la France et le Mexique co-présideront en juin. Cela fait 26 ans que la « Plateforme d’action de Beijing » a été adoptée et a fixé un cadre normatif. Maintenant, il faut passer à l’action avec des engagements mesurables avec des effets prévisibles à 5 ans. Les établissements comme l’INSA Lyon sont des acteurs indispensables pour plusieurs raisons. D’abord, ces établissements sont des employeurs dont les politiques RH doivent être en phase avec l’égalité femmes-hommes. L’enseignement supérieur et la recherche sont globalement assez paritaires, même s’il y a encore beaucoup de progrès à faire à la tête des établissements. Ensuite, les écoles et universités forment des étudiants, qui sont des citoyens. Ils sont donc en capacité directe de contribuer à faire advenir « la génération égalité », car le passage à l’égalité réelle, c’est la génération qui arrive qui pourra l’atteindre. Enfin, la mission de partage de la science dans le débat public dans ces établissements est particulièrement intéressante pour contribuer à structurer le débat public. À l’INSA Lyon, l’Institut Gaston Berger va jouer un rôle très important, car l’égalité est l’une de ses raisons d’être, et travaille quotidiennement sur le sujet. Les évènements diplomatiques où la société civile est conviée sont finalement très rares et pourtant, ce que j’ai pu remarquer durant les trois premières étapes du Grand Tour, c'est que les contributions concrètes des étudiants, enseignants, chercheurs et personnels sont très écoutées par les parlementaires, présidents de Région et les ministres présents.

Après le Grand Tour, les propositions seront compilées et proposées lors du « Forum Génération Égalité », présidé par le président de la République, Emmanuel Macron : la diffusion des idées citoyennes aura donc une issue concrète. Quel est le plan, ensuite ?

Le « Grand Tour » débouchera en juin sur ce sommet initié par ONU Femmes que la France préside. À cette occasion seront lancées, avec plus de 60 États partenaires, des actions concrètes à l’échelle internationale, nourries des contributions des Françaises et des Français que nous aurons recueillies. Ce que j’observe déjà, c’est que le processus lui-même est très instructif. Lorsque nous tenons les conférences consultatives région par région, je vois des ministres prendre des notes. Cela signifie que les propositions citoyennes n’attendent pas le sommet onusien pour être diffusées. Les idées qui émergent des conférences impriment déjà les esprits. C’est d’ailleurs ce que prouve la démocratie participative : le pouvoir ne réside pas qu’entre les mains des politiques, mais bien entre toutes les mains de tous les acteurs du corps social. C’est l’esprit civique qui nous anime : fournir aux Françaises et Français tous les outils pour prendre conscience de leurs rôles respectifs dans ce combat culturel et passer à l’action.

« Génération Égalité ». Ne pourrait-on pas aussi la nommer « génération environnement », « génération biodiversité » ou « génération société numérique » ? Cela fait beaucoup pour les épaules d’une seule génération, non ?

C’est une question extraordinairement difficile qui est un problème de philosophie politique. De mon point de vue, il ne faut pas voir l’enjeu de l’égalité comme une tâche supplémentaire dans la « to-do list » des gouvernements. Ce que l’on remarque à chaque crise, et la crise sanitaire en est un exemple parlant, c’est que les inégalités sont toujours plus accentuées : parmi tous ceux qui souffrent, il y a toujours une partie de la population qui paye une facture plus élevée que le reste, et c’est souvent celle qui est déjà discriminée. Si on ne s’attaque pas à la question de l’égalité, qu’elle soit de genre, raciale ou sociale, on verra poindre une crise dans la crise. Et au final, la cohésion sociale, notre atout le plus précieux pour faire face à ces défis, sera elle-même affectée. Travailler sur l’égalité femmes-hommes, y compris par temps de pandémie ou de crise climatique est un paramètre majeur pour résoudre l’équation. Mieux, c’est une opportunité pour traiter plus intelligemment la crise, y apporter une réponse plus durable et efficace. 

 

Le Grand Tour #NotreGénérationÉgalité
L’INSA Lyon accueille l’étape régionale du Grand Tour #NotreGénérationÉgalité le jeudi 22 avril 2021. Cet événement se déroulera sous la forme d’une conférence consultative en ligne de 14h à 17h.
De nombreuses personnalités échangeront autour d’idées à mettre en place pour élaborer un programme d’actions concrètes et prendre des engagements sur les cinq prochaines années afin de faire progresser durablement l’égalité femmes-hommes dans le monde. Cette étape régionale sera marquée par la participation de M. Cédric O, Secrétaire d’État chargé de la transition numérique et des communications électroniques.
Inscription : https://www.open-diplomacy.eu/grand-tour-generation-egalite 

 

Pour aller plus loin sur le sujet : 
Podcasts « Les cœurs audacieux » -  Saison 1 / Épisode 6 - 24 juin 2021