
INSA Lyon
L’INSA Lyon classé 2e école d’ingénieurs sur Instagram
Les français n’ont jamais passé autant de temps sur les réseaux sociaux et la communauté insalienne ne semble pas faire exception. L’INSA Lyon, très présent dans la sphère digitale, a ouvert un compte Instagram il y a quelques années. Aujourd’hui, l’école se classe en 2e position des écoles d’ingénieurs les plus influentes sur la plateforme. Si l’importance de l’actualité peut sembler légère, l’engagement des insaliens sur le réseau semble révéler quelque chose de plus profond. Cap sur la planète Insta.
Une institution publique présente sur le « pire réseau social pour la santé mentale »
Très prisé par les 16-35 ans, Instagram est une plateforme de diffusion de photos, textes, vidéos, et une messagerie instantanée. Dans la sphère des réseaux sociaux, « Insta » serait le petit frère émotif de la bande, quand Facebook ou Twitter seraient les harangueurs dans la cour des grands. Basé sur la photographie, Instagram donne régulièrement à voir de belles images léchées qui laissent rêveur. C’est ce qui lui vaut d’être largement critiqué, quand il s’agit de pointer du doigt les impacts négatifs des réseaux sociaux sur le bien-être mental des jeunes internautes quotidiennement soumis à des images souvent retouchées.
Alors que fait une institution publique comme l’INSA Lyon sur Instagram ? La même chose que la plupart des instagrameurs : elle crée du lien avec sa communauté. Mais ici, pas de réalité « photoshopée ». La volonté est bien d’échanger en toute sincérité.
Quand on ne se voit plus, on peut toujours « liker et commenter »
Dès lors que le premier confinement avait été annoncé, la page Instagram de l’établissement avait remanié sa ligne éditoriale. « Si l’on ne peut plus se voir, essayons de ne pas se perdre de vue », tel était le parti-pris adopté à la mi-mars. Chaque semaine, les 6900 followers étaient invités à partager leurs ressentis sur la période si particulière, à réfléchir et s’exprimer sur des sujets de fond et à s’inspirer de la créativité des membres de la page. Trois rendez-vous qui tombaient sous le sens pour des internautes habitués au lien social digital. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : la communauté s’engage à 7% sur la page de l’INSA Lyon, alors que la moyenne du réseau social plafonne en général à 2,8%. Étudiants et alumni, mais aussi personnels de l’INSA et lycéens viennent chercher ici le lien avec l’établissement, comme ils gardent contact avec leurs amis durant les épisodes de confinement.
S’amarrer quand le monde entier navigue au radar
Alors que le dialogue est primordial pour affronter une situation si inattendue que celle vécue aujourd’hui, la page Instagram de l’école d’ingénieurs a réussi à mettre en lumière la solidarité et la bienveillance d’une communauté soudée. Heureuse de pouvoir partager ses idées, ses humeurs et ses inquiétudes, c’est entre les lignes des nombreux témoignages lisibles sur la page de l’école que se dessine un véritable portrait d’une génération sacrifiée qui s’interroge beaucoup dans cette période de flottement, où la bonne réponse n’existe pas mais où la solidarité et la bienveillance règnent en maîtresses.
L’INSA Lyon sur les réseaux sociaux
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Vie de campus
« Il n’y a rien de plus important que le lien, même pour ceux qui vont bien. »
Pour certains étudiants, ce deuxième confinement est une longue épreuve difficile à surmonter. Parmi la palette de ressentis, de l’inquiétude et de la tristesse à l’idée d’être enfermé et de ne plus voir ses proches. Parfois du stress, de la colère et même de la lassitude face à une situation au goût de déjà-vu. Et aussi, du soulagement, de pouvoir protéger ses proches d’un virus qui fait si peur. Comment la communauté insalienne s’organise pour faire face aux conséquences morales du confinement, à l’aube des fêtes de fin d’année ?
Dresser le bilan moral étudiant
Conscientes des risques que peut engendrer un confinement pour de jeunes étudiants, les équipes du service de médecine préventive des étudiants (SMPE) se sont naturellement organisées pour tendre la main aux insaliens qui en ressentent le besoin. « En allant à la rencontre des étudiants, nous avons réussi à détecter des situations mais surtout, nous avons réussi à distiller des petits conseils pour aider à surmonter cette période. Aller taper à la porte pour échanger, même quelques minutes, avec son voisin de turne dans le respect des gestes barrières, prendre le temps de faire quelques exercices de respiration ou simplement parler à quelqu’un et se sentir écouté... Des petites choses qui n’ont l’air de rien, mais qui apportent tout de même un peu de soutien », explique Céline Guerre, infirmière au SMPE de l’INSA Lyon.
Pour briser l’isolement, l’équipe de la SMPE s’est donné pour mission de rendre visite aux étudiants restés en résidence, en porte-à-porte. « Nous sommes allés à la rencontre des étudiants, qui n’osaient peut-être pas nous solliciter d’eux-mêmes. Beaucoup pensent au SMPE pour les problèmes médicaux, mais nous voulions faire passer le message que nous sommes présents pour les petits coups de mou et qu’ils peuvent simplement venir discuter s’ils en ressentent le besoin. La détresse psychologique n’est pas quelque chose à minimiser et nous sommes très vigilants concernant la santé des étudiants. C’est pour cela que nous nous sommes organisés, avec le médecin de prévention, les infirmières, les psychologues et l’assistance sociale du SMPE, en un relais bienveillant qui nous permet d’assurer une réelle continuité de l’accompagnement de l’étudiant. Il n’y a rien de plus important que le lien, même pour ceux qui vont bien », ajoute l’infirmière.
Une vie associative qui se réinvente
Une autre façon de garder le lien pour les étudiants restés sur le campus : la vie associative. Si chères au cœur des insaliens, les associations étudiantes n’ont pas cessé de réinventer leurs activités malgré le confinement. « Contrairement à ce que l’on aurait pu penser, ce début d’année a été marqué par un bel engagement associatif de la part des étudiants. Les évènements festifs se sont transformés, beaucoup en ligne, les associations techniques ont transformé leurs bureaux en ateliers de bricolage à la maison… Petites ou grandes, toutes se sont efforcées de faire vivre la vie de campus autrement ! Et je crois que cela traduit une forme de solidarité entre chacun de nous car la vie associative permet de se réunir autour d’un projet et d’avoir un but, pour avancer dans ce couloir un peu sombre qu’est le confinement », rassure Solène Batoche, responsable de la vie associative et étudiante en 4e année de génie énergétique et environnement.
Les fêtes de fin d’année approchant à grands pas, beaucoup sont conscients qu’elles n’auront pas la même saveur qu’autrefois. Pour certains étudiants, quand le retour au foyer familial se fait impossible en raison de la crise sanitaire, il faut se faire une raison de vivre les vacances de Noël sans grand exotisme, mais certainement pas seul.
Barbara Duroy est présidente de la fanfare de l’INSA Lyon, la Band’As. Pour elle et son orchestre, s’il est interdit de rassembler les gens, il faut au moins leur réchauffer le cœur. « Je crois que la musique a une force toute particulière quand il s’agit de dépasser les difficultés. C’est dans cet objectif que nous avons repris nos instruments avec la Band’As pour déambuler sur le campus », explique l’étudiante en 3e année du département biosciences. Armés de leurs masques et instruments, tout en respectant la distance de sécurité, les fanfaristes de l’INSA s’en sont allés jouer de la joie à leurs camarades, un peu surpris de cette présence sur un campus presque vide. « Ça nous a fait beaucoup de bien de voir les gens sourire et taper du pied au rythme de nos instruments. J’espère que nous pourrons réitérer l’expérience pendant les fêtes de Noël pour ceux restés dans leurs turnes », conclut Barbara.
Service de médecine préventive des étudiants (SMPE)
Bâtiment Camile Claudel – RDC
Tél. 04 72 43 81 10 - smpe@insa-lyon.fr
Du lundi au vendredi de 7h30 à 18h00
Cellule Appui Psychologique (CAP)
Rendez-vous individuels avec des psychologues-conseillères
Bâtiment Louis Neel
Tél. 04 72 43 74 50 - service.cap@insa-lyon.fr
Pour compléter le dispositif de soutien, le SMPE recommande les services d’écoute téléphonique et de chat :
Nightline Lyon
Service d’écoute nocturne gratuit pour les étudiants et étudiantes lyonnais
Tous les jours de 21h00 à 2h30 - Tél. 04 85 30 00 10
Institut Jean Bergeret
Ligne d’écoute et de soutien
Du lundi au samedi - Tél. 04 64 42 92 59

Vie de campus
Chroniques culturelles : des confinements ordinaires ?
À l’heure du déconfinement progressif, la question des conditions d’exercice du travail est plus que jamais au cœur de nos préoccupations. Cette réflexion est ici partagée avec Thomas Le Guennic, professeur agrégé de sciences économiques et sociales au Centre des Humanités de l'INSA Lyon et avec François-Régis Lacroix, ancien magistrat invité à l’INSA en janvier dernier.
Comme un miroir brandi à nous-même, le confinement aura été une période propice à l’introspection, au questionnement sur nos temps ordinaires. Comment ai-je envie de vivre ? Quel est le futur que je souhaite pour moi, pour la société, pour l’environnement, pour mes enfants ? Suis-je satisfait de mon travail ? Et c’est de travail dont nous allons parler aujourd’hui, à l’heure du déconfinement, au moment où de nombreuses personnes reprennent leur activité professionnelle.
Plus que jamais, l’épidémie de covid-19 a mis en lumière le rapport que nous entretenons individuellement et collectivement au travail. Nos modes de fonctionnement professionnels ont été chamboulés. Certains salariés vivent du chômage partiel. Des secteurs ploient sous le choc (culture, tourisme, restauration…). D’autres travailleurs ne sont pas restés chez eux. Ils ont redoublé d’efforts pour assurer les services essentiels à la population confinée (commerces, soins, transports, entretien, agriculture…). Et d’aucuns se sont aperçus que ces travailleurs étaient souvent peu qualifiés et que leur rémunération était inversement proportionnelle à leur utilité sociale. Ainsi, cette épidémie aura aussi souligné les inégalités professionnelles. Cette liste pourrait être allongée encore, tant le travail occupe une place centrale dans nos vies et nos sociétés.
De tous ces sujets, il en a été largement question à l’INSA, le 21 janvier dernier, lors de l’événement « C’est quoi ce travail ?! ». Cette journée était l’occasion de réfléchir à l’actualité du travail. Romancier, avocat, magistrat, poète : plusieurs grands témoins ont partagé leur expérience et leur expertise du sujet. L’un d’entre eux est François-Régis Lacroix, ancien magistrat, aujourd’hui actif dans le domaine de la défense des Droits de l’Homme. Interrogé sur la question du « travail confiné » il nous propose aujourd’hui un récit personnel, introspectif et poignant. Ce récit parlera à toutes et à tous : élèves, enseignants, chercheurs, personnel administratif, ingénieurs… Car ce texte est d’abord un témoignage sur un métier, sur son quotidien, sur un savoir-faire : celui de rendre la justice et, surtout, sur le goût de bien le faire. Il s’agit donc d’une réflexion éthique : qu’est-ce qui nous fait tenir debout ?
Mais ce récit aborde aussi ce qui peut nous faire tomber. En effet, François-Régis Lacroix évoque les conséquences désastreuses d’un type de management sans âme qui sévit actuellement dans les entreprises et les administrations. Un art de gouverner les hommes qui, au nom de la rentabilité, réduit l’autonomie des travailleurs, remet en cause leur savoir-faire et qui peut aussi les conduire à l’isolement. Un isolement physique, relationnel, mais aussi intime. Un isolement qui, comme un poison, vise le cœur : l’honneur, l’estime de soi.
Aussi, je lis ce témoignage comme une mise en garde. Le confinement n’est pas seulement ce moment inédit, requis par la crise sanitaire. Il y a d’autres confinements, plus ordinaires, plus sournois, qui ne font pas la une des journaux et qui ne s’abolissent pas par décrets. Ce sont ces situations d’isolement, au travail, en famille, ces moments où l’on perd pied et qui, sans que l’on y prenne garde, nous emmurent en nous-même. Mais si François-Régis Lacroix décrit cette mécanique de la claustration, il dessine aussi les voies de sortie, le chemin de la résilience : renouer le dialogue, rentrer en relation avec ses proches et se ressourcer dans les arts et la nature. Puisse le monde d’après s’en souvenir.
Substantiellement confiné, secondairement déconfit : expérience passée d'un juge en fin d'activité.
Texte inédit de François-Régis Lacroix, ancien magistrat, Président de la chambre sociale de la Cour d’appel de Chambéry entre 2011 et 2014, aujourd’hui actif dans le domaine de la défense des Droits de l’Homme.
Récit en deux feuilletons
Partie 1
J'ai eu 60 ans au début de l'été 2011 ; il me restait alors cinq années d'activité professionnelle avant de prendre ma retraite. Depuis mon premier poste, rejoint le 1er février 1978, j'avais beaucoup aimé, sans jamais aucun regret ni aucune réserve, exercer les fonctions de juge qui m'avaient été confiées au sein de juridictions de première instance dans cinq villes différentes successivement : j'ai eu la chance de pouvoir continûment suivre mon inclination naturelle qui me portait à rester simplement l'un des artisans de la justice quotidienne, celle vers laquelle se tournent pour faire arbitrer leurs différends les créanciers et leurs débiteurs, les locataires et propriétaires, les salariés et leurs employeurs, mais aussi les entrepreneurs et donneurs d'ouvrage, les consommateurs et professionnels vendeurs de biens ou prestataires de services, les voisins propriétaires d'immeubles ou de terrains limitrophes ou copropriétaires dans un même immeuble, et encore les auteurs et victimes de dommages etc.
J'appréciais beaucoup, qui favorisait plus immédiatement une bonne approche de ce type de contentieux, le temps des audiences, par définition le temps d'une écoute en public des demandes et des contestations, des récits et des arguments exposés par chacune des parties et/ou par leur avocat alternativement et contradictoirement, mais aussi, à l'initiative du juge, le moment des échanges et des questionnements, propices à un affinement de la compréhension de toutes les données du litige ; j'en éprouvais la satisfaction d'un travail en commun, dont chaque acteur prenait sa part en toute humanité, pourvu que la tonalité de mes interventions restât empreinte d'une totale impartialité. J'avais pris goût, au surplus, à la pratique de mesures d'instruction dont je me réservais la mise en œuvre dans les locaux du tribunal ou à l'extérieur : vérifications personnelles sur les lieux d'habitation ou de travail, sur le terrain ou dans un immeuble, avec le concours d'un technicien le cas échéant, ou encore enquêtes combinant l'audition des parties et de témoins, ce qui avait l'immense avantage d'élargir considérablement le champ de vision sur les multiples aspects de ces contentieux au bénéfices des lumières apportées par des recherches diversifiées.
Préparées ainsi, les décisions étaient susceptibles d'être mieux admises par toutes les parties, qui étaient assurées d'avoir bénéficié d'un examen en détail des données du litige et de la prise en considération de leurs arguments, mais qu'il fallait aussi s'appliquer à convaincre du bien-fondé d'une condamnation ou d'un rejet de leurs prétentions par une motivation inspirée tout aussi bien par la préoccupation primordiale de statuer conformément au Droit que par l'intérêt pratique manifesté pour des solutions équitables ; cet exercice, en lui-même périlleux, procure néanmoins une vive stimulation intellectuelle, tant le Droit a le grand avantage d'être flexible, comme l'a souligné très justement le très respecté Professeur Carbonnier.

Vie de campus
Président du Bureau des Élèves, il s’organise pour aider les confinés sur le campus
Geoffroy Vancauwenberghe vit certainement l’un des mandats de président de BdE des plus délicats à assumer. Entre sauvetage d’association et aide aux étudiants restés confinés sur le campus, il doit faire preuve de sang-froid et de diplomatie. Récit.
Après le tumulte des premiers jours, Geoffroy Vancauwenberghe souffle un peu. Du haut de ses 20 ans et de son 1,90 m, il observe avec recul la période agitée qu’il vient de traverser. Même si elle est n’est pas terminée, cette vague de confinement a laissé des traces indélébiles dans sa jeune vie, peut-être plus qu’il ne peut encore le constater.
Propulsé président du Bureau des Élèves de l’INSA Lyon en début de semestre dernier, il avait endossé ses responsabilités avec sagesse, conscient des enjeux de l’année à relever et surtout désireux de pouvoir soutenir une jeune équipe à la tête de l’un des plus gros BdE de France, tant par ses effectifs de membres actifs que par son enveloppe financière.
L’année se déroulait sans accroc pour cet élève-ingénieur de 4e année au département génie mécanique. Pour assurer ses fonctions associatives, Geoffroy bénéficiait d’un aménagement de scolarité afin de mener à bien son engagement bénévole et ses études.
Le calendrier estudiantin suivait son cours, avec en ligne de mire le Gala de l’INSA Lyon et d’autres gros événements chers aux cœurs insaliens. Jusqu’à ce début du mois de mars. Et l’arrivée pernicieuse de ce virus dont tout le monde parle.
Geoffroy n’est pas serein. Il doit gérer une situation d’une ampleur inédite et la tâche s’annonce très compliquée. Chaque jour voit son lot de nouveaux problèmes arriver et le met à l’épreuve. Il doit être fin et diplomate en toutes circonstances, pour tenter d’avancer le mieux possible dans cette nébuleuse dont personne ne peut le tirer. À cela s’ajoute le suivi des cours et les soucis personnels rendant ces premiers jours très éprouvants pour le jeune homme, qui n’en est qu’au début de son périple.
Le danger sanitaire est tel qu’un premier décret ministériel annonce l’interdiction des rassemblements au-delà de 1000 personnes. Un vrai coup de massue pour l’équipe organisatrice du Gala, prévu le samedi 14 mars à la Sucrière, le lendemain de la cérémonie de remise de diplômes, elle-même organisée à la Cité Centre des Congrès et devant rassembler près de 3000 personnes.
Défaite, l’équipe encaisse la nouvelle de l’annulation à cinq jours de l’événement, après de longs et laborieux mois de préparation. Ce ne sera que le début d’une série de déceptions. Progressivement, la situation sanitaire du pays poursuit sa dégradation et les décisions s’enchaînent, impactant d’autres événements portés par des associations insaliennes sur le campus.
Commence alors avec toute l’équipe d’étudiants membres du BdE un conséquent travail de réflexion pour apporter des solutions aux problématiques posées à l’association. Il s’agit désormais de la maintenir hors de l’eau après avoir essuyé de nombreux revers, tant sur le plan financier qu’humain. Pleinement impliqué dans ce sauvetage associatif, Geoffroy ne compte plus les jours à répondre aux questions, trouver des solutions, essayer de ne pas baisser les bras dans un contexte exacerbé par le traitement médiatique et la réalité du terrain. La situation sanitaire du pays affole jusqu’à l’annonce de fermeture des établissement scolaires puis celle des commerces, et enfin le confinement, que Geoffroy vit comme la suite logique des actions appliquées.
Il est en réunion de crise avec le conseil d’administration du Bureau des Élèves quand la décision tombe. Déjà à pied d’œuvre pour palier cette éventualité, Geoffroy et son équipe ont pris quelques décisions pour se préparer à cette isolation imposée du campus.
Et pendant que la grande majorité des usagers du site sont priés de ne pas revenir, d’autres, eux, s’apprêtent à ne pas pouvoir le quitter.
Ils seraient environ 700 étudiants à ne pas avoir pris le large à l’annonce du Président Macron, 700 à manger, dormir et vivre sur un campus en grande partie déserté. En lien avec le directeur de l’INSA Lyon, Frédéric Fotiadu, et le directeur général des services, Frédéric Desprès, restés eux aussi sur le site, il est convenu de maintenir partiellement le fonctionnement de la Maison des Élèves, pour assurer quelques services vitaux aux confinés. Les élèves du BdE s’organisent pour mettre en place des permanences. Ils ont récupéré auprès de la direction des restaurants de l’INSA toutes les denrées qui ne seront pas écoulées pour cause de confinement. Ils ont aussi contacté la Croix-Rouge pour récupérer des denrées alimentaires supplémentaires, prévues pour des évènements annulés.
Outre la laverie, c’est la COOP, l’épicerie des étudiants, qui sera ainsi maintenue ouverte, afin de permettre l’approvisionnement en nourriture sans que les élèves ne quittent l’enceinte du campus.
En favorisant cette ouverture, la Maison des Élèves devient le théâtre des impressions de chacun des confinés, français ou étrangers. Connue pour sa vie associative foisonnante, l’INSA l’est tout autant pour son esprit de solidarité, en plein exercice de son expression en ces temps mouvementés.
Dans ce contexte exceptionnel inédit, Geoffroy ne se sent pas seul. S’il travaille main dans la main avec la direction de l’école, il vit en situation de confinement avec ses amis proches, également membres du BdE, avec qui il partage ses problématiques du quotidien. Face aux doutes auxquels ils ont été confrontés, ils ont pu faire appel à l’expérience de leurs aînés, anciens présidents et membres du BdE, pour leur prêter conseil. Aujourd’hui, la situation in-situ est maîtrisée et opérationnelle. Geoffroy et son équipe peuvent prendre un peu de recul. Et se rendre compte que, malgré la dangerosité de la situation, ils viennent d’acquérir une expérience de haut vol très formatrice. Face à cet épisode de tensions et de prises extrêmes de décisions, ils ont gagné en compétences et en connaissance de soi. Gage que l’engagement associatif auquel ils croyaient en intégrant le réseau INSA leur a apporté autant, si ce n’est plus, que les heures qu’ils ont arrêté de compter depuis qu’on leur a dit que le coronavirus rôdait là.

Formation
Main dans la main, étudiants et professeurs assurent la continuité pédagogique
Jeudi 12 mars 2020 au soir. 24,5 millions de téléspectateurs pendus aux lèvres du Président de la République Française.
« Dès lundi, et jusqu’à nouvel ordre, les crèches, les écoles, les collèges, les lycées et les universités seront fermés ». Pour certains, cette annonce a été, peut-être, synonyme d’incertitudes et craintes. Songeant à l’ampleur que représentait la tâche imposée d’une organisation pour assurer la continuité pédagogique, beaucoup auraient eu le vertige.
Pour les futurs ingénieurs du département Télécommunications, Services et Usages (TC) de l’INSA Lyon, cette allocution a finalement donné naissance à un bel esprit de cohésion. Adèle Prouvost, en 3e année TC, raconte comment l’équipage étudiant a assuré à la manœuvre d’un nouvel environnement pédagogique, à partir d’un logiciel bien connu des communautés de jeu vidéo en réseau.
Rien ne sert de courir, il faut partir à point
Dès le jeudi soir, les élèves-ingénieurs du département Télécommunications, Services et Usages de l’INSA Lyon s’organisaient. Situation de crise ? Même pas peur. « Le directeur du département nous avait conseillé de préparer nos machines pour travailler depuis chez nous dès le jeudi. Entre nous, étudiants, nous utilisons beaucoup les outils de messagerie instantanée pour dialoguer quotidiennement, alors un petit groupe de travail s’est constitué de façon assez naturelle afin de trouver le meilleur outil qui permettrait d’assurer la continuité des cours. On a commencé à travailler sur l’outil pour le proposer à nos professeurs, sans vraiment savoir s’ils seraient d’accord. La plupart ont rapidement accepté et les plus résistants se sont finalement rapidement laissés tenter », explique Adèle Prouvost.
Une coordination assurée en un temps éclair
Conçue initialement pour les communautés de joueurs en ligne, Discord est une plateforme qui permet à ses utilisateurs de passer des appels vidéo, audio et envoyer des messages écrits via un système de messagerie instantanée. Utilisé par 250 millions d’utilisateurs uniques, c’est un outil qui a fait ses preuves en matière d’efficacité. « Nous avions besoin d’un logiciel robuste en termes de son et de dépôt de fichiers. Nous connaissions Discord grâce à l’utilisation que l’on en fait en jouant en réseau. Il ne nous restait plus qu’à organiser les ‘channels’, l’équivalent de classes virtuelles selon les différents cours du département Télécommunications. Nous avons pris le temps d’échanger avec nos professeurs sur la prise en main de l’outil avant de le déployer à tous les utilisateurs. Comme on le fait dans une vraie classe, chacun peut accéder aux cours auxquels il est inscrit. Le cours se déroule en live : le professeur est filmé et nous pouvons lui poser des questions via un « chat ». Chaque utilisateur a accès à un canal oral et écrit », indique Adèle.
Unir ses forces pour faire face à une situation sans précédent
Étudiants, équipe éducative et services administratifs : tous ont apporté leur pierre à l’édifice. « Grâce à la direction des services d’information, nous avons par exemple mis en place un système de prise de contrôle à distance des ordinateurs de TP du département. Presque tous nos cours se déroulent sur ce serveur et c’est très efficace ! Nous sommes assez fiers du résultat », conclut Adèle Prouvost.
Pour Stéphane Frénot, directeur du département TC, cette initiative étudiante montée en un temps éclair est une réussite. « Faire face à la situation n’était vraiment pas évident et nos futurs ingénieurs ont réussi à faire preuve d’une réactivité incroyable. Si nous avions eu quelques petites inquiétudes concernant l’aspect de confidentialité de l’outil qui est hébergé sur des serveurs américains et qui répondent donc à la législation américaine, une mise en garde au sujet de la sécurité des documents déposés sur la plateforme a été nécessaire. Une fois nos utilisateurs informés, c’est un outil qui nous a permis, dès le premier jour de confinement d’assurer nos cours sans aucune interruption de service. Il est important pour moi de saluer le rôle de chacun dans la traversée de cette épreuve. Tout le monde a su se serrer les coudes et c’est une belle preuve de ce que la cohésion est capable de produire », conclut Stéphane.

International
Confinement et mobilité internationale : elle se démène pour retrouver ses « petits »
Haridian Melgar Perez est sur le pont depuis l’annonce du confinement. Chargée des projets Amérique Latine à la direction des relations internationales, elle a redoublé d’engagement, tout comme ses collègues référents des autres zones géographiques, pour contacter chacun des étudiants français partis en échange, ainsi que les étudiants étrangers accueillis sur le campus ce semestre. Seuls, désemparés, ils n’ont souvent qu’elle pour les guider dans cette réalité obscure. Récit.
Dimanche 15 mars. La nouvelle tombe pour Haridian, elle ne retournera pas au travail le lendemain, et ce, pour une durée indéterminée. L’information, bien que précautionneuse, lui fait l’effet d’une douche froide, elle qui vendredi quittait son poste avec l’obligation de revenir après le week-end. Étonnée, elle ressent très vite du stress. En confinement ? Mais comment ? Pour combien de temps ? Beaucoup de questionnements se bousculent dans sa tête, tant d’ordre personnel que professionnel. Désormais dans l’impossibilité de pouvoir se rendre sur le campus, Haridian doit s’organiser rapidement. Chargée des projets Amérique Latine à la Direction des relations internationales de l’INSA Lyon, elle sait que sa tâche sera très ardue ces prochains jours, voire ces prochaines semaines. Elle va devoir faire face aux urgences et répondre aux innombrables questions des étudiants, des parents, des enseignants de départements de spécialité de l’INSA Lyon. Les étudiants en échange ou en double diplôme dont elle suit les dossiers sont actuellement au Mexique, en Colombie, au Brésil, en Argentine, au Chili ou en Uruguay. Elle suit également les parcours d’étudiants latino-américains en cours à l’INSA Lyon, en provenance de ces mêmes pays, et du Venezuela. Elle les appelle les IN et les OUT, dans le respect du jargon de son métier. Cinquante étudiants IN, dont 21 mexicains et 21 brésiliens sont recensés ce semestre sur le campus. Trente étudiants INSA sont en Amérique Latine à l’heure où elle se prépare à faire face à leurs inquiétudes. Une étape de plus à franchir au cours de cette saison 2019-2020, déjà marquée par un mouvement de grèves massives au Chili, obligeant beaucoup d’élèves-ingénieurs à rentrer en France.
Face à cette crise sanitaire inédite, Haridian sait qu’il va falloir s’armer de patience et d’abnégation. Pour tous ces étudiants, elle est le lien, le fil rouge, et sera parfois l’ange gardien. Tout comme certains autres de ses collègues, membres du pôle mobilité du service scolarité, référents internationaux dans les départements, enseignants et secrétaires, et enseignants responsables de zones géographiques. Concentrée, elle se met en ordre de marche, et établi la liste des priorités. Pour les OUT, elle s’attèle à rentrer en contact avec chacun d’entre eux, ainsi qu’avec les ambassades françaises de tous les pays avec lesquels l’INSA collabore. Son but ? Identifier toutes les problématiques : souci de santé, souhait de rentrer, vols annulés, frontières fermées, confinement sur place, et décisions prises en temps réel par les ambassades pour les citoyens français bloqués sur place. Les premières difficultés de recensement se présentent. Elle décide de créer elle-même son propre outil afin de pouvoir élaborer un suivi évolutif de l’état de tous les étudiants qu’elle suit, de leur situation et de leurs décisions. Pour répondre au besoin d’être en étroite connexion avec ses étudiants, elle va également se servir des applications de messagerie instantanée communément utilisées. Grâce à cela, elle parvient à être plus réactive dans certaines situations, comme offrir son aide et son écoute à ces étudiants coincés des heures durant dans les aéroports, dans l’attente de leur vol de retour. Elle réussit, en parallèle, à maintenir le contact avec quelques parents, inquiets et pour le moins perdus.
Pour les IN, les problématiques s’avèrent différentes. Étaient-il encore dans les résidences INSA ? En bonne santé ? Et si oui, avaient-ils tous les outils nécessaires au suivi des cours en ligne que les départements étaient en train de mettre en place à leur effet ? Haridian les contacte un à un. Elle apprend que certains d’entre eux ont décidé de rentrer au pays, et dresse la liste des questions inhérentes à leur décision : comment fait-on pour partir ? Doit-on payer le mois d’avril ? Peut-on revenir et avoir une chambre une fois la situation calmée ? Haridian fait le lien avec la Direction des résidences et la directrice de la vie de campus, qui lui apporte une aide précieuse et des réponses rapides. Elle recense également toutes celles et ceux qui ont décidé de rester à l’INSA. Comme pour les autres, elle se charge d’identifier les situations d’urgence, de rassurer, et d’engager le suivi de l’état de chacune et chacun des étudiants. Elle s’assure de la santé physique et psychologique de ces élèves désormais confinés dans les résidences du campus.
Les urgences se règlent, pas à pas. À l’INSA, l’ensemble des personnels impliqués à l’international s’est organisé très rapidement pour se coordonner et contacter tous les étudiants partis aux quatre coins du monde. Ils ont aussi contacté tous ceux qui ont choisi l’INSA pour leur échange académique. Une cartographie a pu être élaborée en un temps record, permettant à l’ensemble de l’équipe d’avoir un regard global sur la situation. La DRI a travaillé pour cela en collaboration avec différents personnels, des secrétaires de départements aux directeurs, de la direction générale des services à celle des restaurants, tout cela grâce à un formidable élan de solidarité.
Au fil des jours, Haridian maintient le lien avec tous ses étudiants. Elle reste en alerte, et les accompagne si nécessaire. Les situations évoluent, et les problématiques avec. Le temps est l’inconnu. Malgré cette instabilité de tous les instants, elle préfère rester optimiste. Consciente d’évoluer professionnellement dans un contexte exceptionnel, elle garde pour elle ses inquiétudes concernant les siens. Originaire d’Espagne, elle partage au fond d’elle-même les sentiments liés à toute forme d’expatriation.
Progressivement, avec ses collègues, elle reprend la pile des projets à venir. Si les événements continuent d’être annulés, un par un, sur le sol français, la DRI garde le cap sur la prochaine année académique. En octobre 2020 doit normalement se tenir le Forum Arfitec (Argentine France Ingénieurs TEChnologie) organisé par l’INSA Lyon, et les Journées Internationales 2020 durant lesquelles seront fêté les vingt ans de la filière Internationale Amerinsa.
En attendant, la vie continue, comme elle peut. Grâce aux réseaux sociaux, des initiatives émergent, comme l’organisation d’apéros virtuels faisant fi des frontières et du confinement. Pour tromper l’angoisse et surtout, suspendre le temps.