Formación

10 Dic
10/Dic/2025

Formación

Former autrement : le défi pédagogique des nouveaux bachelors de l’INSA Lyon

Avec l’ouverture de nouveaux bachelors professionnalisants au sein du Collège d’Ingénierie Lyon-Saint-Étienne, l’INSA Lyon voit ses pratiques pédagogiques s’enrichir. Ces formations Bac+3, conçues pour répondre aux besoins industriels émergents, accueillent un public plus diversifié et poussent les équipes à explorer d’autres façons d’enseigner.

« Former en trois ans des jeunes capables de prendre en charge une partie d’un projet industriel : c’est un vrai défi. Il y a nécessairement une adaptation pédagogique à avoir, et une remise en question de son enseignement », souligne Éric Sellin, professeur et à la genèse de la spécialité Infrastructures des réseaux électriques.  

À la rentrée 2025, l’INSA Lyon a ouvert de nouveaux bachelors professionnalisants, conçus avec les acteurs industriels du territoire pour répondre au besoin croissant de profils Bac+3 capables de soutenir les ingénieurs sur des projets techniques. Intégrés au Collège d’Ingénierie Lyon-Saint-Étienne aux côtés de l’ENTPE, de Centrale Lyon et de Mines Saint-Étienne, ces cursus en trois ans complètent l’International Bachelor déjà existant et s’ancrent dans les réalités des métiers émergents.

Repenser le point d’entrée dans les savoirs

Contrairement aux élèves inscrits dans le cycle ingénieur, les étudiants de bachelor arrivent avec des parcours plus variés, parfois technologiques, parfois généraux, mais toujours marqués par une attente forte de « faire ». Cette diversité de profils oblige à repenser les modes d’entrée dans les savoirs, à proposer davantage d’exemples, de mises en situation et d’accompagnements individualisés. 

« Avec le concept de bachelor, on change d’approche : on part du concret pour remonter vers les notions. C’est une façon d’enseigner les sciences souvent pratiquée dans les pays anglo-saxons », explique Catherine Gauthier, professeure et co-conceptrice des maquettes pédagogiques de ces nouveaux cursus. 

À cette hétérogénéité de parcours s’ajoute une grande diversité sociale, culturelle et géographique. Ce brassage, perçu comme une vraie richesse par les enseignants, nourrit la dynamique du groupe et rejoint pleinement l’humanisme qui fonde l’ADN de l’INSA Lyon. Il favorise l’entraide, la progression collective et une ouverture d’esprit particulièrement adaptée à des formations tournées vers les usages et les réalités industrielles.

« Ces bachelors ne sont pas une version “allégée” de la formation ingénieur INSA, insiste Catherine Gauthier. Ce sont des formations exigeantes, mais avec d’autres outils, d’autres rythmes, d’autres objectifs. »

Une pédagogie par projets 

Tout au long de la première année, un « projet fil rouge » sert de colonne vertébrale aux apprentissages : les notions vues en cours y trouvent immédiatement une application, et les étudiants peuvent mesurer leur progression de manière tangible.

« La maquette pédagogique a été pensée avec les professionnels pour répondre au mieux à leurs besoins et pour s’assurer que nos étudiants auront le bon profil pour s’intégrer et s’épanouir dans leur nouveau métier, explique Laurent Briançon, professeur et responsable de la spécialité Infrastructures des réseaux électriques. Nous avons aussi décidé de proposer des cours très appliqués, avec des projets qui regroupent plusieurs matières pour leur apprendre à travailler en équipe. »

L’idée est qu’ils puissent identifier un besoin, concevoir une solution et la tester en l’ajustant au fil du projet. Un cycle pratique qui correspond à leur manière d’apprendre et structure la montée en compétences des futurs apprentis. Une dynamique qui s’accompagne d’une immersion industrielle précoce, avec des visites d’entreprises organisées dès la première année.

Ambition interdisciplinaire

Cette démarche s’inscrit dans l’ambition profondément interdisciplinaire des bachelors. Le projet fil rouge oblige les enseignants à dépasser les frontières de leur discipline pour offrir une vision cohérente de la physique, des mathématiques, de l’informatique ou de la conception. 

L’équipe pédagogique s’efforce alors de tisser des liens concrets entre les cours : un professeur de mathématiques contacte par exemple ses collègues pour intégrer dans ses séquences les formules réellement utilisées en physique ou dans les autres matières.  « Le projet fil rouge est une clé : il crée de la cohérence et du sens pour ces étudiants très tournés vers l’action », précise Hugues de Sainte Foy, enseignant de Physique à l'INSA Lyon.

Véritable laboratoire pédagogique

Après une première année sous statut étudiant, tous les inscrits passent en apprentissage dès la deuxième année, devenant salariés de leur entreprise d’accueil. Cette immersion impose un rythme d’apprentissage plus continu : plutôt que des partiels concentrés, les enseignants privilégient un travail régulier, appuyé par de petites évaluations (type QCM) et des exercices courts à réaliser en autonomie.

« Je cherche à tester beaucoup de choses (travail en autonomie, projet, TD, outils logiciels...) afin d'adapter au mieux mon enseignement pour les années à venir, confirme Eric Sellin. Il y a beaucoup de feeling, de ressenti et d'échanges avec eux pour converger vers le bon contenu et les bonnes modalités pédagogiques. »

Ainsi, les bachelors demandent davantage de réactivité. Au-delà des ajustements de contenus, cette approche pédagogique sollicite un engagement renforcé des enseignants et une réelle capacité d’adaptation au quotidien. Elle impose une dynamique plus collaborative et directement connectée aux réalités du terrain. Un véritable laboratoire pédagogique, appelé à se transformer en continu pour accompagner l’évolution des besoins industriels et des pratiques de formation.