
INSA Lyon
Alumni Chair/INSA Lyon: INSA engineer, philosopher in action
Avec la chaire « Ingénieur INSA, philosophe en action. Penser et agir de manière responsable », l’INSA Lyon et son association d’Alumni, la Fondation INSA Lyon et la filiale de valorisation INSAVALOR, souhaitent interroger le rôle de l’ingénieur et nourrir la réflexion sur son évolution dans une société transformée par de grands enjeux.
Urgence climatique, « robolution », crise des représentations et des pratiques… Le monde d’aujourd’hui connaît de profonds bouleversements et commence à percevoir les impasses de nos systèmes socio-économiques. Les enjeux actuels sont de taille et pour pouvoir leur faire face, le monde doit se réinventer.
À la croisée de ce nouveau monde et de ses défis : l’ingénieur. Humaniste comme le souhaitaient les fondateurs de l’INSA Lyon, l’ingénieur INSA devait porter en lui la responsabilité sociétale de ses actes mais aussi de sa pensée. Cette représentation formulée à la fin des années 60, lors de la création du modèle INSA, n’a pas pris une ride aujourd’hui, jusqu'à trouver un écho très fort dans un contexte en pleine mutation.
Comment cet « ingénieur, philosophe en action » évolue-t-il dans notre société contemporaine ? Quelle sagesse peut-il développer face aux défis du temps, à une révolution numérique incontrôlée et incontrôlable, à un futur incertain et imprévu ? À quelles valeurs pourra-t-il se référer et quel idéal cherchera-t-il à véhiculer dans un monde où l’humanité peine à se projeter ? Comment parviendra-t-il à allier pensées et actes, attentes et satisfactions, besoins économiques et nécessités vitales ?
C’est pour tenter de répondre à ces questions, et pour redonner à l’humanisme de l’ingénieur INSA tout son sens dans une époque bouleversée, que l’INSA Lyon et l’Association Alumni INSA Lyon lancent la chaire « Ingénieur INSA, philosophe en action. Penser et agir de manière responsable ». Parce que le monde bouge, qu’il faut anticiper et se mettre en mouvement.
En savoir plus sur la chaire : https://chaires.insa-lyon.fr/chaire-institutionnelle-alumni-insa-lyon
Penser l’évolution du rôle et de la responsabilité des ingénieurs avec nos Alumni
Par Frédéric Fotiadu, directeur de l’INSA Lyon
L’INSA Lyon est engagé depuis deux ans dans une démarche Prospective, inspirée de la méthode élaborée par son père fondateur Gaston Berger. Ces travaux nous ont permis de mener une réflexion profonde sur les futurs possibles de notre établissement à l’horizon 2040, en envisageant divers scénarios, dont certains de rupture. La crise du Covid-19 nous a brutalement confrontés à ces hypothèses d’exception, qui, au début 2020, étaient encore considérées comme peu probables. Face aux enjeux résultant de ces circonstances, la question du rôle des ingénieurs, déjà au cœur dans notre démarche prospective, reste plus que jamais d’actualité.
Par la diversité des fonctions qu’elles et qu’ils occupent dans tous les domaines et secteurs d’activité, par l’infinie richesse de leurs parcours professionnels et de leurs expériences personnelles, les diplômés INSA constituent à la fois une extraordinaire source d’informations et d’inspiration, et une formidable caisse de résonance à ces questionnements. Ils sont aussi, par leur nombre, un puissant levier de transformation des entreprises et organisations de nos sociétés. Je suis donc particulièrement heureux et enthousiaste à l’idée de porter ensemble cette chaire Alumni INSA Lyon pour approfondir nos réflexions sur la place et la responsabilité de l’ingénieur dans le monde actuel et à venir.
Ce projet absolument passionnant va contribuer à resserrer les liens et renforcer les interactions entre notre établissement et son réseau d’Alumni. Il constitue également une très belle opportunité pour rapprocher de notre communauté de diplômés qui s’en étaient éloignés. Dans un monde en recherche de sens et de nouveaux repères, cette chaire est une invitation à nous mobiliser toutes et tous pour penser notre rôle au sein de la société sur la base de ce qui constitue l’essence même de l’INSA Lyon depuis sa création : le modèle d’ingénieur humaniste.
Cette « marque de fabrique INSA » repose précisément sur la capacité à s’ouvrir à d’autres disciplines, notamment les sciences humaines et sociales, pour saisir toute la pluralité du monde et s’interroger systématiquement sur l’impact sociétal et environnemental des technologies. C’est aussi l’ouverture au monde des arts, de la culture et du sport, pour nourrir notre réflexion et notre expérience d’autres formes de sensibilité, d’interactions, de pratiques, d’autres quêtes de la performance et de dépassement de soi. C’est enfin un véritable engagement citoyen en faveur de l’ouverture sociale et de toutes les formes de diversités pour construire un monde plus juste, inclusif, bienveillant et altruiste.
Formés selon ce modèle porté par l'INSA et nourris de ses valeurs fondamentales, nos diplômés sont particulièrement à même de percevoir la multitude de signaux forts ou faibles qui annoncent les mutations à venir. Ils ont la capacité à les penser non seulement sous l’angle de la technologie, mais aussi et surtout selon une approche intellectuelle globale. C’est précisément cette dynamique qui va être mise en œuvre au sein de la Chaire Alumni, au service de nos élèves, de nos enseignants-chercheurs, de nos partenaires et de la société d’une manière générale.
Il s’agira ici de toujours mieux nous préparer à affronter cet avenir incertain, complexe, bouleversé par le présent, en adoptant une vision systémique pour engager avec conscience et éthique les grandes transitions énergétiques, environnementales et écologiques, numériques, mais également sociales et sociétales, qui permettront de faire advenir un futur désirable.
Repositionner le rôle de l’ingénieur dans la société
Par Daniel Louis-André, ingénieur INSA génie électrique 1977 et président de l’association Alumni INSA Lyon
L’ingénieur INSA, femme ou homme, est attaché, peut-être plus aujourd’hui qu’hier, à toutes les valeurs portées par le modèle INSA. Si ses caractéristiques, tout comme son état d’esprit, n’ont pas été érodés par le temps, je pense que nous pouvons constater que l’ingénieur INSA a beaucoup évolué.
Avec tout d’abord, la dimension internationale qu’il a pu acquérir, dans l’entreprise, et dans la société au sens large. Partir en échange pendant ses études il y a quarante ans était le privilège de quelques-uns d’entre nous. Depuis, la mobilité est devenue obligatoire pour tous les étudiants, et les moyens de communication se sont considérablement développés, rendant l’internationalisation beaucoup plus simple à gérer.
Dans ce monde où tout s’est accéléré, nous constatons par ailleurs que l’ingénieur INSA est de plus en plus en quête de sens. L’engagement, l’adéquation aux valeurs de l’entreprise, l’utilité donnée au métier exercé sont des moteurs dans la recherche d’emploi, tout comme dans la conservation d’un poste. Le salaire ne suffit plus au bonheur. Le modèle de société de ces dernières décennies ne fait plus rêver, il est même décrié. La société doit se transformer.
Dans ma spécialité génie électrique, les ingénieurs ont conscience d’être complètement au cœur de la transformation du modèle énergétique. Dans cette course vers la mobilité faible émission, les jeunes ont conscience d’un enjeu majeur : leur impact sur l’évolution des modes de vie pour faire baisser les consommations d’énergie.
Le volet environnemental et la place de l’humain sont devenus primordiaux.
Dans la projection de l'industrie du futur, de l’usine 4.0, au milieu du big data, des objets connectés, de l’ultra-technologie, il y a cette voie vers l’innovation à domicile, les circuits courts, les modèles personnalisés.
De manière plus globale, on va donc demander à l’ingénieur d’être toujours plus créatif. On va lui demander de trouver l’équilibre entre l’expertise qu’il va pouvoir développer en regard des technologies de pointe, et la nécessité de travailler avec une démarche plus large pour mieux intégrer la dimension environnementale sur l’ensemble du cycle de production, et replacer l’humain, tel qu’il doit l’être, au cœur des processus.
L’ingénieur de demain doit tenir ce rôle, avoir cette vision globale, développer cette approche systémique et exercer plus que jamais son sens critique. Il doit avoir la faculté de s’interroger au-delà de son « patrimoine » de compétences, quitte à remettre en cause les approches qui semblent évidentes.
J’aimerais enfin personnellement que l’ingénieur ait un rôle plus important dans la cité, par sa connaissance générale et son savoir-faire, alors qu’il a aujourd’hui peu d’impact. C’est peut-être ce qu’il faut transmettre à nos jeunes : apprendre à ne pas être passifs, face à des systèmes qui les enferment sur des modèles. Il faut repositionner le rôle de l’ingénieur, et mon optimisme me conduit à penser que c’est possible.
Mais pour parvenir à développer de nouvelles approches qui répondent à la fois à la quête de sens de l’ingénieur, et à la nécessité de repositionner son rôle dans la société, il faut s’interroger sur l’art et la manière.
Comment un ingénieur INSA doit se comporter au sein de l’entreprise pour jouer son rôle ? Comment cet ingénieur de demain va parvenir à jouer un rôle important dans son entreprise tout en exerçant son regard critique ? Comment pourra-t-il être à l’initiative du changement sans être perçu comme celui qui veut tout révolutionner ? Les notions de savoir-être et de compréhension du monde de l’entreprise sont ici fondamentales, et doivent guider la formation des élèves, au-delà bien-sûr des bases scientifiques qu’il faut conserver.
Je suis Président des Alumni depuis mars 2019 et, depuis, je suis régulièrement au contact des élèves et des diplômés INSA. Avec cette chaire, nous souhaitons apporter des réponses à leurs préoccupations, notamment au regard des enjeux sociétaux et environnementaux. Et nous allons pouvoir le faire ensemble, avec l’école et la Fondation INSA Lyon.
Cette dimension tripartite est pour moi indispensable au succès de ce projet, comme de beaucoup d’autres. En tant qu’Alumni, nous allons pouvoir faire le lien entre ceux qui pensent la formation à l’INSA Lyon, les ingénieurs en activité et ceux en devenir.
Nous souhaitons faire de cette chaire un terrain concret d’échange d’idées et d’expériences, qui produise des résultats tangibles pour tous les acteurs : École et enseignants, ingénieurs en activité, entreprises.
Promouvoir le modèle d’ingénieur humaniste
Par Laure Corriga, présidente du directoire d’INSAVALOR
Nous soutenons cette chaire originale qui a toute légitimé pour exister, parce qu’elle colle à l’ADN de l’INSA Lyon. S’interroger sur le rôle de l’ingénieur fait partie des fondements de l’école, et c’est important de partager la réflexion avec notre écosystème, aux côtés des Alumni et de la Fondation INSA Lyon.
Pour moi, un ingénieur, c’est quelqu’un qui, face à des enjeux, des problèmes variés, apporte des solutions techniques et organisationnelles en prenant conscience des impacts et parties-prenantes qui l’entourent. Sa grande qualité, c’est son adaptabilité. Aujourd’hui, dans un contexte où les enjeux économiques, sociétaux et environnementaux sont plus visibles, l’ingénieur devient un acteur dont le rôle devrait être plus grand, avec une place dans la société plus prépondérante. Son regard devrait être essentiel, nourri par cette démarche projet dont il a l’enseignement et la maîtrise.
Le rôle de l’ingénieur évolue parce que la société évolue. Dans un monde qui devient plus automatisé, l’ingénieur sera forcé de changer, de prendre en considération de nouveaux paramètres. Au-delà de l’innovation technologique, il devra mesurer l’impact de ses décisions sur le plan sociétal et environnemental, voir plus loin, inventer de nouveaux modèles, en faisant notamment appel à sa créativité. Il devra vivre avec le changement mais aussi l’initier. Il va évoluer dans un contexte plus internationalisé, avec des collaborations aux réponses moins immédiates.
L’INSA éveille ses élèves en ce sens, et souhaite leur apporter les connaissances et les compétences nécessaires. De cette chaire, j’aimerais qu’il ressorte une sorte de label d’ingénieurs humanistes, qui permettrait de témoigner du parcours INSA et de la démarche globale acquise au fil de l’enseignement.
INSAVALOR peut, sur un plan très opérationnel, apporter sa contribution au travail de la chaire sur les aspects de formation continue et développer des modules de formation en cohérence avec la démarche philosophique portée par cette chaire. De plus, en tant qu’acteur de terrain, nous allons pouvoir être récipiendaire des attentes des entreprises et être témoin de leurs changements. Certaines d’entre elles ont déjà entrepris une réflexion fondamentale et ont compris qu’elles devaient prendre leur essor avec de nouvelles générations plus engagées. D’autres travaillent leur marque employeur et vont, a priori, dans cette direction.
Renforcer le lien entre les différentes générations d'ingénieurs en plaçant au cœur des échanges la philosophie-même du métier
Jean Guénard, ingénieur INSA génie civil 8e promotion et président de la Fondation INSA LyonL’environnement de l’ingénieur a évolué, depuis la création de l’INSA en 1957. Pour son co-fondateur, Gaston Berger, l’Homme était alors au centre de toutes les préoccupations. Aujourd’hui, plus de soixante ans plus tard, nous constatons que les élèves défendent une autre position : la Terre est désormais placée au centre de leurs préoccupations. Cette notion de « Terre en danger », qui n’était réservée qu’à quelques élites un peu marginalisées de l’époque, est devenue omniprésente aujourd’hui. Les notions de frugalité, réparation, économies, reviennent sur le devant de la scène et l’ingénieur humaniste a cette prise de conscience que les ressources de la terre ne sont pas inépuisables. L’ingénieur, qui doit dorénavant s’astreindre à ne pas penser qu’à lui-même, doit apporter sa contribution à l’évolution sociale, économique, intellectuelle et culturelle au monde qui l’entoure, et dans l’organisation du travail.
J’attends donc de cette chaire, avec beaucoup d’intérêt, une redéfinition concrète et actuelle de la notion d’ingénieur humaniste, où l’on se réfère à l’homme mais aussi à la Terre. Mais pour moi, l’ingénieur de demain n’est pas, hormis sur cet aspect environnemental, si différent de ce qu’il était hier. Avec une technique excellente, et une expertise pointue de sa spécialité, il présente une formation solide et une ouverture au-delà de son champ d’expertise, doublée d’une culture générale qui doit être la plus large possible.
Pour moi, un ingénieur, c’est celui qui s’intéresse à ce qui se passe autour de lui, et qui met ses compétences au service de ses valeurs. Des valeurs avec lesquelles il est en accord, dès sa formation sur les bancs de l’INSA. Ces valeurs fortes, l’école les portaient quand j’étais moi-même étudiant. Je fais partie de ceux qui ont eu accès à cette formation d’excellence, étant pourtant éloigné du monde de l’enseignement supérieur. Mes parents, agriculteurs puis épiciers, au Creusot, me soutenaient dans ma scolarité, plutôt satisfaisante. Grâce à eux, j’ai pu rentrer à l’INSA, puis bénéficier d’une bourse d’études dès ma deuxième année. À l’époque, je ne savais pas que je réussirais le pari fou d’aboutir dans une carrière riche de dizaines d’ouvrages d’art, de génie civil, de souterrains, de voies ferrées ou routières, de ports ou d’ouvrages maritimes à la construction d’un ouvrage unique : le viaduc de Millau. Chance ? Intuition ? Culot ? Ambition ? Sans doute un peu de tout cela, mais surtout un goût et une pratique développée de la motivation des équipes.
Seul, je ne suis rien. Ensemble, tout, absolument tout, est possible.
J’avais commencé comme conducteur de travaux et gravi les échelons chez EMCC puis chez Eiffage, jusqu’à en devenir Président de la branche Infrastructures. Dans ma spécialité, le génie civil, nous concevons, nous construisons, et nous pouvons suivre la réalisation. C’est un domaine où nous pouvons nous projeter. Aujourd’hui, le besoin de nouvelles infrastructures n’est plus aussi fort, l’heure est au renouvèlement du patrimoine, et à l’entretien préventif des bâtis. Il faut faire avec l’existant, un véritable défi pour les ingénieurs de ma spécialité. Grâce à cette chaire, impulsée par les Alumni, le lien entre les différentes générations d'ingénieurs va pouvoir être renforcé, en plaçant au cœur des échanges la philosophie-même du métier. Et, je l’espère à nouveau, faire en sorte que l’impensable ne soit pas impossible.

Recherche
Maude Portigliatti : « L’ingénieur est au cœur des mutations sociétales »
Au lycée, elle s’imaginait chercheure. Aujourd’hui, c’est l’avenir de la mobilité et du pneumatique qu’elle doit imaginer. Après cinq années passées à l’INSA Lyon et un diplôme d’ingénieure en Sciences et Génie des Matériaux en poche, elle rejoignait le laboratoire de Pierre Gilles de Gennes au Collège de France pour entamer un doctorat. Le surlendemain de sa soutenance de thèse, elle intégrait les équipes de recherche et développement d’une grande entreprise. Rencontre avec Maude Portigliatti, aujourd’hui Directrice de la recherche avancée du Groupe Michelin.
S’il y a un souvenir qui surgit à Maude lorsqu’on lui demande de revenir sur ses années à l’INSA Lyon, c’est le mot expérimentation. « Mon premier projet de travaux pratiques était la conception d’un lanceur de pigeons d’argile. Pourquoi cet outil, je n’en ai plus la moindre idée, mais c’est un objet qui m’a marquée ! Il s’agissait seulement de nous faire pratiquer le croquis technique, jouer de la fraiseuse ou du tournevis, mais c’était une des premières fois où il m’était possible de donner naissance à ce que j’avais en tête. C’est aussi pour cette raison que j’ai choisi le monde de la recherche. L’expérimentation fait grandir et d’ailleurs, je crois que c’est ce qu’on a toujours fait sur le campus. Ça grouillait, il y avait toujours beaucoup de rythme et de projets étudiants. Vingt-cinq ans plus tard, ça ne m’a pas l’air si différent ! »
Pas si différent, à quelque chose près. « Je sens énormément de conviction personnelle dans les paroles des étudiants que j’ai rencontrés ces dernières années, souvent très concernés par la dimension environnementale de leur futur métier. C’est très porteur car la plupart des mutations sociétales ont été accompagnées par des mutations techniques. L’ingénieur étant au cœur de ces environnements, il a entre ses mains les clés pour amorcer un réel changement », observe Maude.
Depuis 2019, Maude Portigliatti est en charge de la recherche avancée du Groupe Michelin. Elle mène ses équipes, tous domaines confondus, à développer les pneus et les matériaux de demain, voire des innovations bien au-delà du pneu. « Qu’ils soient sans air ou connectés, les pneus sur lesquels nous travaillons demandent de la recherche sur les matériaux et les matières premières mais également sur les procédés de fabrication. Nous sommes aujourd’hui très focalisés sur le biosourcing et le recyclage des produits et nous ne faisons aucune conception sans analyser les conséquences de nos choix sur l'environnement. Depuis une vingtaine d’années, nos laboratoires travaillent à l’élaboration d’une pile à combustible qui permettrait une avancée considérable en matière de mobilité automobile, notamment sur l’absence de rejets de polluants. Pour que nos produits aient une chance de survie dans les dix ou quinze prochaines années, il faut qu’ils répondent au virage environnemental, indiscutable aujourd’hui. »
Si la science et la technique la fascinent depuis son adolescence, c’est pour les possibilités qu’elles permettent d’explorer. Pour Maude Portigliatti, être ingénieure et chercheure, c’est à la fois avoir la capacité d’imaginer des choses nouvelles et surtout, pouvoir les mettre en œuvre. Et pour s’aventurer dans le champ de tous les possibles, la recette ne nécessiterait que deux ingrédients : curiosité et ténacité. « Penser et faire des produits capables de s’intégrer techniquement et sociétalement dans un futur qui nous est partiellement inconnu n’est pas toujours chose facile car il faut parfois itérer 30 ou 40 fois avant de voir l’idée concrétisée. J’ai acquis la conviction que pour innover, c’est-à-dire offrir à nos clients un bénéfice qui n’existait pas avant, ce qu’il fallait finalement, c’était une idée "pas trop stupide" et beaucoup de ténacité. Se tromper, rebondir et recommencer ne doit pas être un frein à l’action. En recherche, cette fois-ci n’est peut-être pas la bonne, mais la prochaine peut changer le cours des choses. »
Et pour pouvoir agir, il faut œuvrer dans le sens de ce que l’on croit.
« Faire de la recherche, c’est faire des paris. Je suis quelqu’un qui aime prendre des risques, mais parfois il peut s’avérer que l’on se trompe de route. Et pour retrouver son chemin, il faut d’abord apprendre à se faire confiance. C’est l'un de mes rares côtés fleur bleue, mais j’ai toujours un petit mot utilisé souvent par François Michelin, le petit-fils du fondateur de l’entreprise, qui disait ‘Devenez ce que vous êtes’. Ce que je mets derrière cette citation, c’est qu’il est nécessaire de développer sa personnalité et ses convictions, d’abord. Devenir ingénieur ou chercheur viendra ensuite. Quand on fait ce que l’on aime, on peut soulever des montagnes », conclut Maude Portigliatti.

Entreprises
Julien Honnart : « ma start-up est née à l’INSA quand j’étais étudiant »
C'est au cours de sa formation que Julien Honnart, fondateur et président de Klaxit, a l'idée qui lui permettra de créer son entreprise. Aujourd’hui à la tête d’une équipe de 35 personnes, cet ingénieur INSA diplômé en 2011 du département Télécommunications, Services et Usages, Julien a le sens du service et la curiosité de ceux qui voyagent. Portrait.
C’est au cours de sa 4e année d’études à l’INSA Lyon que l’idée de connecter la voiture à internet germe dans l’esprit de Julien Honnart. « La voiture était à l'époque un objet non connecté à Internet, avec peu de services associés. Avec mes camarades de l’époque, en groupe de travail, on a imaginé un boîtier connecté à la voiture et relié à internet proposant des services sur plateforme web », explique l’ingénieur.
Covoiturage pour limiter les émissions de gaz à effet de serre, éco-conduite pour faire des économies de carburant, assurance au kilomètre ou encore diagnostic voiture pour trouver le garagiste le moins cher… Le groupe ingénieux termine alors premier d’un concours d’innovation, sur le vote d’un jury composé d’enseignants et d’industriels. « On a obtenu une reconnaissance des industriels qui nous engageaient à poursuivre sur ce projet prometteur », précise Julien.
L’inspiration californienne
Quelques mois plus tard, toujours étudiant, Julien prend la direction des États-Unis pour un stage à San Francisco, dans la Silicon Valley. Il découvre alors un univers extrêmement connecté, et un objet qui suscite un engouement sans précédent : le smartphone.
« Beaucoup de gens avaient le premier iPhone, ce qui n'était pas du tout le cas en France. Le boîtier qui nous mettait en dépendance des constructeurs automobiles, tout le monde allait l'avoir dans sa poche ! De quoi m’amener à challenger ce projet qui était devenu le mien, et à créer une application pour mobile en proposant l'un des services imaginés à l'INSA : le covoiturage sur les trajets quotidiens. En plus de la dimension écologique, qui est un prérequis de base pour moi, l’idée me plaisait de mettre en relation des gens qui ne se seraient jamais croisés sans mon offre de service », se rappelle Julien.
De retour en France, il développe le premier prototype de l’application au cours de son passage dans la filière entrepreneuriale de l’INSA Lyon, accessible en 5e année. Il trouve alors le nom de son appli : WayzUp. Mais à la même époque, une autre application que Google va racheter se fait une bonne place sur le marché, le GPS Waze.
La naissance de Klaxit
Tout juste sorti de l’INSA, le jeune homme entre à HEC pour compléter sa formation par un master, avant de se lancer dans la création de sa société. WayzUp naît pour devenir Klaxit après 7 ans d’existence. « J’aimais beaucoup le nom que j’avais trouvé et j’ai dû prendre la décision difficile de l’abandonner ! Waze up sera finalement rebaptisé Klaxit au début de l’année 2018 », indique Julien. Le symbole du klaxon orange qui suivait le projet depuis le début, que les covoitureurs se faisaient passer au fil des trajets, est devenu l’emblème de cette application qui permet aujourd’hui à une équipe de 35 personnes de développer le covoiturage. « Notre objectif est de déployer Klaxit partout en France, pour développer le plus grand réseau de covoiturage domicile-travail. Depuis 2019, on l’a lancé dans une dizaine de nouvelles villes et avons signé en juillet le rachat d'iDVROOM, filiale covoiturage de la SNCF, faisant de nous le leader européen du secteur. Le covoiturage est une vraie solution que nous proposons aux métropoles de prendre en considération. Nous sommes en train de préparer une nouvelle levée de fonds et, pour l’anecdote, nous déployons Klaxit sur le campus de l’INSA, là où le concept est né », conclut Julien Honnart.
©Klaxit

Vie de campus
À la confluence de l’art et de la science
Jeune franco-malgache récemment diplômé INSA, Laurent Lille n’a jamais voulu choisir entre ses études et sa passion pour la danse. Rencontre avec cet ingénieur-danseur.
La danse, une échappatoire
Depuis le plus jeune âge, je côtoyais le monde de la danse underground urbaine à Madagascar. J’ai rencontré des danseurs qui dansaient sans miroir, parfois dans des endroits incongrus, de manière très intuitive et naturelle. À cette époque, j’étais novice en danse. C’est en pratiquant aux côtés de ces danseurs de rue que j’ai compris que la danse était un moyen de me révéler. Il n’était pas question que j’arrête la danse une fois mes études supérieures commencées. Le modèle INSA me permettait de poursuivre ma passion. En effet, je pouvais choisir d’intégrer la section spécialisée ou des associations étudiantes de danse tout en effectuant mes études d’ingénieur. C’était le combo parfait !
La mécanique à l’INSA
Après mes deux premières années d’études en filière Asinsa, j’ai choisi le département Génie Mécanique (GM) car pour moi c’est celui où la volonté d’innover et d’aller voir plus loin était la plus développée. La danse est pour moi un art qui permet de se confronter à ses limites. GM nous pousse à aller plus loin. Je trouve des similitudes entre les deux approches, particulièrement tournées vers le dépassement de soi. Avec mes camarades, nous avons eu l’opportunité de travailler sur des projets alliant la mécanique et l’artistique. Nous avons notamment conçu un plafond modulable composé de miroirs ressemblant à un origami grandeur nature pour un spectacle, à la confluence de l’art et de la science, où des robots dansaient dessous.
J’ai persévéré dans les deux domaines, pour être toujours plus performant sans jamais faire le choix de l’un au détriment de l’autre. La mécanique est partout, dans nos mouvements aussi, et c’est en l’étudiant que j’ai commencé à remettre en question ma façon de danser. J’ai eu une excellente expérience au sein de l’association de danse RAGDA mais je restais en quête de davantage de challenge dans la danse. J’ai donc créé de fil en aiguille, avec un groupe de copains, un crew que l’on a appelé INSANITY, en l’honneur d’une chorégraphie qui portait ce nom.
Vivre avec deux passions
Quand j’ai terminé l’INSA je suis parti en Corée du Sud pour approfondir le management en intégrant un mastère spécialisé. À mon retour en France un an plus tard, j’ai décroché un travail chez Assystem, une entreprise de conseil en ingénierie, où je mène à bien des projets sur du long terme. En ce moment, j’effectue une mission pour une entreprise d’équipementier automobile qui fait essentiellement des directions assistées. Je suis en lien avec la recherche et le développement en analyse, matériaux, technique et suivi de projet : c’est très intéressant. Je suis très investi dans mon travail et je trouve du temps pour danser car ça fait partie de mon équilibre. Je suis d’ailleurs toujours leader d’INSANITY et nous participons à des concours professionnels ou semi-pro.
Mon conseil aux insaliens
Il ne faut pas essayer de se surpasser que dans un seul domaine. Mes années à l’INSA m’ont appris que la persévérance était la clé de la réussite. On ne doit se fermer aucune porte ni se fermer aux autres. Il faut chercher l’unité dans la diversité tout en essayant de voir au-delà des frontières et sortir la tête du guidon !
Au nombre de 13 pour l’année 2019, ils exercent différents types de danse : moderne, hip-hop, breakdance, mais aussi waacking, lyrical ou Krump tout en s'inspirant également de disciplines sportives et artistiques annexes comme de la gymnastique, des arts martiaux, des arts du cirque etc.
Récemment INSANITY Dance Crew a remporté la médaille d'argent au concours Free to Dance en catégorie adultes. Ce concours est ouvert aux compagnies professionnelles, semi-professionnelles et aux académies de danse spécialisées.
Podcasts « Les cœurs audacieux » - Saison 1 / Épisode 5 - 10 juin 2021

Formation
Damien Guerrier, en charge de l’innovation d’un grand groupe à seulement 23 ans
L’ascension a été très rapide. Damien Guerrier, ingénieur INSA Lyon Génie Industriel 2018, a les pieds sur terre et la tête dans les étoiles : à peine diplômé et déjà Innovation Business Manager d’une grande entreprise de conseil créée par des ingénieurs INSA : Amaris. Rencontre avec ce jeune ingénieur de 23 ans qui n’a pas froid aux yeux.
Difficile d’imaginer que ce jeune cadre faisait son entrée il y a six ans seulement, à l’INSA Lyon.
« Mes professeurs de lycée m’avaient tellement parlé de l’INSA que j’avais l’impression de connaître l’école par cœur avant d’y avoir mis les pieds. Je ne savais pas vraiment ce qu’était le métier d’ingénieur, mais j’aimais les maths et la physique. Quand j’ai découvert l’écosystème associatif et l’énergie qui se dégageait des insaliens lors des journées portes ouvertes, j’ai tout mis en œuvre pour intégrer l’école. J’ai intégré le premier cycle en AMERINSA, puis j’ai rejoint le département Génie Industriel. Plus j’avançais dans le cursus, plus j’aimais la dimension managériale du métier d’ingénieur. En m’engageant dans la vie associative étudiante, j’ai vécu des situations de stress et de joie très fortes, mais j’ai surtout énormément appris en m’ouvrant aux autres. Avant l’INSA, j’étais quelqu’un d’introverti et timide, et maintenant, je me retrouve face à des décisionnaires qui palpent plusieurs millions
d’euros ! »
L’histoire de Damien et de l'entreprise Amaris débute lorsqu’il est contacté via le réseau social professionnel LinkedIn par son futur directeur, lui proposant un stage managérial au sein de la société lyonnaise.
« J’étais en échange au Portugal lorsque j’ai passé les entretiens en visio-conférence. À l’époque, j’avais besoin de peaufiner mon projet professionnel et je ne connaissais pas le secteur du conseil. Ça a été une véritable révélation ! J’ai signé avec les bureaux de Lyon sans même avoir rencontré les équipes. J’ai débuté comme stagiaire manager et je suis aujourd’hui en charge du développement des activités innovation du groupe. Les choses sont allées très vite pour moi et je ne pensais pas pouvoir accéder à ce poste, dont je rêvais, si rapidement. »
Pour Damien, manager rime avec confiance.
« Amaris fait confiance aux gens et je crois que c’est pour cela que je me suis senti rapidement en phase avec les valeurs de l’entreprise. Je me plais dans mon rôle d’ingénieur manager car on peut construire avec les personnes. J’accompagne des équipes de chercheurs de la naissance de leurs idées jusqu’au produit. Et puisque chacun a quelque chose à raconter, une histoire à vivre, je suis fier de pouvoir être en mesure d’aider mes collaborateurs à aller là où ils souhaitent aller. En tant qu’ingénieur INSA, on a cette double force, d’être à la fois très technique et d’avoir le sens de l’humain. »
Lever le voile sur l’innovation, un vaste chantier qui n’effraie pas le jeune diplômé.
« C’est un projet où il y a tout à construire. On part de zéro et à l’échelle du groupe il faut pouvoir se positionner comme une société innovante. Est-ce que ça n’est pas trop de responsabilités ? J’en redemande tous les jours ! Je crois qu’il ne faut pas avoir peur d’oser, garder confiance en soi et ne jamais se dire que nos épaules ne sont pas faites pour ça. On est capable de tout ce que l’on souhaite réaliser. Alors oui parfois j’ai un peu peur, car on me laisse des cartes à jouer pour construire quelque chose qui peut vite être gigantesque, mais dans deux ans, soit le pari sera perdant, soit je pourrais me retourner et me dire ‘c’est moi qui l’ai fait’. »

Formation
Isabelle Huynh souhaite réenchanter l’industrie grâce à l’ingénierie positive
Éveiller les consciences. Voilà la mission que s’est donnée Isabelle Huynh, diplômée en Génie Mécanique 2014 de l’INSA Lyon. Après deux ans en tant qu’ingénieure produit dans une entreprise, la jeune femme part en quête de sens pour répondre à la question suivante : « Comment utiliser mes compétences à des fins justes en alignant mon métier avec mes convictions intimes ? ». Après six mois de voyage autour du monde à découvrir « des solutions techniques qui améliorent la vie des personnes », elle créé l’association « La Clavette1 » et s’applique à diffuser le concept d’ingénierie positive. Portrait.
Copyright Jean Fotso 2016
De l’amour de l’objet
« Déjà très jeune, j’étais attirée par le métier d’ingénieur et le pouvoir de création qui lui est lié. Être ingénieur c’est d’abord imaginer toutes les solutions possibles pour pouvoir construire son objet. Je trouve le côté technique de la conception fascinant et beau : je peux rester des heures devant une pièce mécanique sans m’en lasser. Et l’objet n’est pas nécessairement hautement technologique. Une lampe faite à partir d’une bouteille de plastique et d’une petite LED, c’est génial et très ingénieux ! »
Puis, le doute s’installe
« Je travaillais pour une entreprise de fabrication de machines à café en capsules, soit une des innovations les moins écolos de ces dernières années. À la pause déjeuner, je me faisais remarquer si je mangeais une tomate en plein mois de décembre ou si mon Tupperware n’était pas en verre, et le paradoxe s’est révélé : comment pouvions-nous, ingénieurs, être si incohérents entre nos valeurs personnelles et l’exercice de notre métier ?
Et puis le projet « implémenter le Bluetooth pour pouvoir lancer son café depuis son lit » a été la goutte de trop pour moi : si c’est ce qu’on entendait par innovation, ça serait sans moi. J’ai démissionné quelques mois après cette prise de conscience. »
User de sa matière grise à bon escient
« En tant qu’ingénieur et en tant que citoyen, notre intelligence a une certaine valeur. La première question à se poser est : à quoi veux-je la dédier ? À créer des objets inutiles ? Ou concevoir des produits qui améliorent réellement la vie des personnes de façon durable et bienveillante ? Dans la plupart des industries, la vision est encore très concentrée sur l’économique et on ne prend que très rarement en compte l’impact sur la société. Je travaillais sur des produits de grande consommation où le marketing nous dictait le cahier des charges et nous n’avions que peu de marge de manœuvre. Aujourd’hui, les ingénieurs sont un peu plus sollicités sur des points décisionnels stratégiques mais ça n’est pas toujours le cas. Et il était hors de question pour moi de continuer à dire : ‘je n’ai pas le choix’. »
L’ingénierie positive : de la quête personnelle à l’impact social
« Je savais que mes collègues n’étaient pas des cas isolés de professionnels dont le métier n’est pas en accord avec leurs idées personnelles. Cependant, il n’y avait pas de réponse si on se demandait comment mêler technique et impact social. Alors pour partager et diffuser les réflexions de ma quête de sens, j’ai créé « La Clavette ». Son nom fait écho à une pièce qui a pour fonction de lier en rotation deux éléments mécaniques. Et la métaphore est la suivante : ce qui m’intéresse, c’est être à la jonction, faire le lien entre le monde technique et la société pour aider les projets qui ont du mal à embrayer. Je ne cherche pas à convaincre, mais surtout à montrer des « innovations frugales2 » et faire grandir une nouvelle approche en s’inspirant de l’ingéniosité des pays émergents. Alors que je me trouve en Équateur, j’ai besoin de passer à un autre niveau en termes d’impact. Je décide à mon retour en France de contacter les entreprises et les écoles. »
Sensibiliser, former, accélérer le changement
« L’association intervient auprès des écoles d’ingénieurs à travers des cours, des évènements où les étudiants travaillent sur des projets concrets et en faisant du lien avec des entrepreneurs sociaux. Elle s’emploie à trois missions : faire grandir l’esprit critique chez les élèves-ingénieurs, entretenir la capacité à se projeter dans le futur et développer une vision systémique du métier. Auprès des entreprises, il s’agit plus d’inspirer, de former et de faire comprendre qu’il n’y a pas que des hippies dans le monde de l’ingénierie sociale et solidaire ! L’ingénierie positive doit s’intégrer dans les stratégies d’entreprise et il faut d’ailleurs faire preuve d’ingéniosité pour combiner rentabilité et impact. C’est là que tout se joue. »
Son leitmotiv : mettre ses compétences au service de sa ligne idéologique
« Le métier d’ingénieur ouvre beaucoup de portes et c’est à nous de choisir celles que nous voulons ouvrir. Il y a énormément de liberté inhérente au métier, mais il y a aussi beaucoup de responsabilités. Garder un œil critique sur les choses, ne jamais être en déni sur le futur et rester conscient des impacts de nos travaux pour répondre à des enjeux de durabilité plutôt qu’au court terme relève du devoir. »
[1] Une clavette est une pièce mécanique liant un moteur à un système mécanique.
[2] L’innovation frugale, résumée par Navi Radju, est une démarche qui se retrouve dans les pays émergents consistant à « faire mieux avec moins » : le manque de ressource fait naître une créativité et une ingéniosité qui n’existent plus dans les pays occidentaux.
Información adicional

INSA Lyon
« Il ne faut pas baisser les bras, tout est possible ! »
Vahan Sarafian, ingénieur INSA et architecte Internet des Objets chez Spie ICS, a le sens des opportunités. Entre amour de son pays d’origine, l’Arménie, et la fierté d’être INSA, il gravit les échelons au sens propre comme au sens figuré, en témoigne son ascension de la plus haute montagne d’Arménie.
Quel a été votre parcours avant d’intégrer l’INSA Lyon ?
J’étais un élève plutôt moyen au lycée, mais j’avais l’ambition d’intégrer l’INSA Lyon. J’ai postulé sans grande conviction. Quand après mon baccalauréat, on m’a annoncé que je n’étais pas retenu, j’ai hésité entre la déception et le soulagement. Je savais que je n’aurais pas réussi comme il se doit mon parcours INSA avec mon dossier. J’ai préféré m’orienter sur un DUT spécialisé en Réseaux et Télécommunications à l’IUT de Valence. C’est en prenant exemple sur mon cousin Viken qui a intégré l’INSA après l’IUT que je me suis dit que moi aussi j’en avais le potentiel. Après deux ans de formation et un stage en tant que Technicien réseau en Arménie, je suis allé à la Journée Porte Ouverte de l'INSA Lyon pour rencontrer Hugues Benoit-Cattin, qui à l’époque était directeur du département Télécommunications, Services et Usages (TC). Il m’a conseillé d’avoir une très bonne lettre de motivation pour pouvoir prétendre aux entretiens d’admission en troisième année. J’ai terminé mon DUT vice-major de promo et avec une expérience à l’internationale. Cela m’a permis d’intégrer l’INSA sans entretien, et cette annonce a été une réelle réussite pour moi ! La morale est qu’il ne faut pas baisser les bras. Tout est possible !
Comment s’est déroulé votre parcours scolaire en TC ?
Après une semaine d’intégration où j’ai rencontré des personnes sympas qui sont d’ailleurs restées des amis, j’ai été confronté à un revers de médaille. J’avais été formé en IUT et je devais réapprendre à travailler afin de gérer la charge de travail à l’INSA. Avec mes amis de troisième année, on s’est épaulés en révisant ensemble. Après mon stage de 3TC que j’ai effectué dans un laboratoire de recherche en Crête, un de mes professeurs, d’origine arménienne, m'a proposé d'effectuer un échange en Arménie en 5TC. Le but était d’ouvrir un partenariat avec une école là-bas. Étant déjà engagé pour la filière Chine de TC afin d’effectuer un semestre à Shanghai, le projet ne s’est pas fait. J’ai vécu en Chine une expérience géniale mais en passant à côté de l’opportunité d’un échange avec une école arménienne, un pays qui me tient à cœur. Aujourd’hui, j’aimerais encourager les étudiants INSA à se tourner vers les petits pays. On est souvent guidés pour aller aux États-Unis ou en Asie, mais je pense qu’on peut tout aussi bien s’épanouir dans des écoles aussi prestigieuses dans de plus petits pays. Beaucoup d’amis INSA sont partis dans des universités européennes et en étaient très contents !
Et votre parcours professionnel ?
Pour ma dernière année au département TC, j’ai effectué un stage de 6 mois chez SPIE en tant qu’architecte junior. Cette expérience m’a été bénéfique et la direction m’a proposé un contrat pour rejoindre l’équipe lyonnaise alors que je n’étais pas encore diplômé. C’est une réelle chance et la formation INSA contribue à obtenir ce type de proposition. Je devais d’abord aller passer mon semestre à Shanghai mais avant même d’avoir terminé, j’avais déjà des contacts pour établir mon contrat chez SPIE. J’ai signé. C’est une super entreprise qui a plusieurs liens avec l’INSA. D’abord, la plupart de mes collègues sont des INSA TC. J’ai été formé par d’anciens étudiants de l’école et je vais à mon tour en former d’autres. De plus, je travaille sur un projet adossé à la Chaire Internet des Objets signé entre l’INSA et SPIE. Je suis donc en lien avec mes anciens professeurs. C’est un vrai plaisir de leur donner du travail !
Cet été, vous avez atteint le point culminant de l’Arménie. Un défi ou une envie ?
Une envie plutôt. Un ami guide de haute montagne m’a proposé l’ascension, et je l’ai accompagné tout simplement. J’ai ajouté un autre regard sur l’Arménie, et au-delà des frontières, j’ai fait le souhait que l’INSA Lyon, école dont je suis fier, puisse créer des partenariats avec les écoles et universités de mon pays d’origine.

Entreprises
Le goût des autres : un moteur pour Antonin Fauret
Quand un Ingénieur INSA invente pour les autres, cela donne un profil qui sort du lot. Rencontre avec Antonin Fauret, ingénieur diplômé INSA Lyon 2017 et créateur du Totemigo.
Qu’est-ce que le Totemigo ?
Le Totemigo est un outil avec un objectif simple, celui d’accélérer la rééducation des enfants atteints du trouble de la prononciation. C’est donc un objet qui a été imaginé et conçu afin d’être sensoriel, manipulable, il est aussi constitué de couleurs et d’images qui le rendent attractif pour les enfants.
Son nom est sorti lors d’une séance de créativité, il a tout de suite plu aux enfants à qui on l’a proposé. Le Totemigo est de forme hexagonale à faces carrées. Il ne sert pas forcément que pour la communication, l’objectif est qu’il convienne à plus : qu’il soit utile à tous les enfants, au-delà même de la Trisomie et des handicaps. En effet, l’outil est adaptatif : à la fois à l’enfant et à l’apprentissage. Logique, articulation, lecture, motricité… Rien ne lui résiste ! Les adultes peuvent créer eux-mêmes leurs scénarios sur un site web.
Comment est née l’idée ?
Pendant longtemps, je me suis occupé d’une petite fille trisomique qui s’appelle Emmanuelle. C’est la petite sœur d’un ami, elle avait des difficultés pour prononcer les mots correctement.
Quand j’ai quitté la région parisienne pour intégrer l’INSA Lyon en 2012, je ne savais pas encore que cela allait être moteur dans ce projet.
En septembre 2014, j’ai commencé à étudier au département Génie Mécanique Développement pour ensuite m’orienter vers la Filière Étudiant Entreprendre (FEE) en février 2017 aux côtés de deux autres étudiants INSA, Valéria Soalovei, qui venait du département Biosciences et Thibault Eymard, qui venait du département Génie Mécanique Conception. Eux aussi avaient été sensibilisés au handicap (association, membres de la famille…).
Pendant quatre mois, nous travaillons ensemble autour d’un projet avec le but premier de créer du lien. Très vite, notre idée se concrétise : on voulait aider les enfants dans leurs troubles de la prononciation pour éviter la dé-sociabilisation à l’école et accélérer l’apprentissage. Il fallait donc un objet qui soit interactif, ludique et lumineux : le Totemigo était né.
Est-ce que le Totemigo sera disponible sur le marché ?
Nous avons testé le Totemigo auprès d’un public de 300 personnes, composé d’orthophonistes, éducateurs spécialisés et d’enfants. La plupart des retours que nous avons reçu sont plus que positifs. Ça donne de l’espoir pour l’avenir !
Je travaille actuellement, et avec l’aide du département Génie Mécanique de l’INSA, à une deuxième version du Totemigo avec une sensorialité augmentée. Il s’appellera le Totemitech (« tech » pour technologie). Il sera notamment capable de réagir par des vibrations et de la lumière aux réponses des enfants.
Le 7 février prochain, nous lançons un financement participatif pour faire aboutir le projet, auquel chacun peut participer.
L’envie d’aider les enfants et plus globalement d’aider son prochain vous est venue comment ?
Dans la vie, il faut se donner un but. Le mien, c’est d’avoir un impact positif. J’ai donné des cours pour transmettre mon savoir, je me suis investi dans des associations pour donner de mon temps, j’ai déjà eu deux stagiaires à qui j’ai transmis des connaissances… Cette fois-ci je donne le sourire et de nouvelles capacités d’apprentissage à des enfants et ça, ça n’a pas de prix. Il y a une phrase toute bête qui dit « je sais pourquoi je me lève le matin » et je sais aujourd’hui pourquoi je suis debout tous les jours : pour aider des enfants handicapés. L’impact positif, c’est vraiment ce que je cherche !
TOTEMIGOS - Résumé des Scénarios from Antonin Fauret on Vimeo.
Podcasts « Les cœurs audacieux » - Saison 2 / Épisode 2 - 30 novembre 2021
Información adicional

INSA Lyon
Voyage sur l’Hermione : une aventure hors du temps pour deux diplômées
Deux ingénieures INSA Lyon s'apprêtent à vivre une fabuleuse expérience sur la frégate historique l'Hermione, portée par la motivation mais surtout par le cœur. Récit d'un beau projet, placé sous le signe de l'aventure et de l'amitié.
« Hello, je suis Léa Jarry, diplômée GEN 2017, je suis arrivée à l’INSA en 2012 avec l’envie d’apprendre pour pouvoir faire bouger les lignes, en matière de développement durable notamment. Mes années INSA m’ont apporté énormément de confiance, dans mes capacités d’adaptation et d’apprentissage, dans mes relations avec les autres aussi. Mes proches peuvent en témoigner, je me suis épanouie et affirmée pendant mes études. Sans cette expérience, je ne sais pas si j’aurais eu le cran et le grain de folie nécessaires pour me lancer dans l’aventure de l’Hermione. Pour moi, le voyage sur cette frégate porte une symbolique forte : c’est avec mon bagage de formation et de vécu sur ces cinq ans que je quitte Lyon, et l’horizon me paraît grand ouvert. Je trouve que ça fait une belle conclusion à mes années étudiantes, et une transition parfaite avec mon nouveau poste, dans le développement de projets éoliens. »
« Salut, moi c’est Apolline Pibarot, je suis diplômée GMPP 2017, arrivée à l’INSA en 2012 également. Je suis depuis toujours déterminée à réaliser mes rêves et tous les projets un peu fous qui ont une curieuse tendance à éclore dans ma tête. C’est un peu pour ça que j’avais choisi Le modèle INSA forme des gens qui n’hésitent pas à voir grand et à sortir des sentiers battus. Je n’ai pas eu peur de me lancer dans ce projet, malgré tout ce que je faisais déjà en parallèle. Cette expérience est incroyable et c’est une nouvelle orientation professionnelle, presque même une nouvelle vie que j’ai pu découvrir à bord. »
Leur citation
« Nous sommes le prolongement de ces passionnés qui ont œuvré pour la construction de ce navire, nous mettons également notre pierre à l’édifice. »
Leur histoire
Tout commence en septembre 2012 lorsqu’elles s’assoient l’une à côté de l’autre dans le bâtiment du premier cycle. Elles ont en commun l'envie de devenir ingénieures, et un appétit d'aventures et de nouveaux horizons. Pari gagnant avec leur filière ASINSA, qui leur permet dès la première année de partir pour un stage d'un mois au Japon.
Léa : « ASINSA c'est le début de tout. D'une formation complète qui m'a donné une vraie culture technique et une ouverture sur le monde, mais aussi de liens solides avec des amis formidables. Cinq ans après, on est toujours à se soutenir et à se pousser en avant les uns les autres. »
C’est durant leur premier cycle INSA qu’elles entendent parler du projet de l’Hermione. Cette magnifique idée, cette fabuleuse aventure, une épopée des temps modernes qui remplit leurs yeux d’étoiles et qu’elles rêvent de vivre à leur tour.
Léa : « J'avais été voir le chantier de l'Hermione quand j'étais petite, mais je me suis décidée quand j'ai lu un article d'une gabière qui allait partir pour les Etats-Unis. Il y avait du voyage et de l'aventure, un esprit d'équipe essentiel. Et il y avait une notion d'empowerment ! Je me rappelle m'être dit : ça c'est une femme forte. Je ne sais pas si j'oserais. Et en fait si, j'ai osé. »
Apolline : « L’Hermione, la première fois que j’en ai entendu parlé, a matérialisé, sous le signe de l’aventure, toutes les limites de notre manière de voyager aujourd’hui. Si on y regarde de plus près, le voyage maintenant revient à sauter dans un train ou un avion et dormir jusqu’à l’arrivée, qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il grêle. Trop facile donc… Sur cette frégate de légende, je souhaite redécouvrir notre relation au temps et l’effort du trajet plutôt que de le réduire à une simple formalité. »
Ce bateau a une histoire particulière. Construite en 1779 elle emmena à son bord le marquis de La Fayette lorsqu’il est parti soutenir l’indépendance des États-Unis d’Amérique. L’Hermione pouvait alors accueillir jusqu’à plus de 300 personnes ! Elle avait été créée à Rochefort, qui était à l’époque un arsenal Royal conçu par Colbert à la demande de Louis XIV. Malheureusement, avec la paix avec nos voisins anglais, le déclin de la marine à voile et la fermeture de l’arsenal de la marine, Rochefort tombe peu à peu dans l’oubli. En 1997, l’association Hermione-Lafayette, décide d’entreprendre un immense chantier : celui de reconstituer la frégate de l’Hermione à son identique de l’époque. Tout est mis en place pour que la construction se fasse au mieux. Les plans d’origines sont retrouvés, les mêmes matériaux sont utilisés et surtout les techniques de fabrications sont respectées. Le chantier rencontre un véritable succès et en 2015 est enfin organisé un premier voyage, identique à celui de 1779.
Le navire part ainsi de Rochefort pour rejoindre Boston.
Les médias suivent cette traversée et les retombées presse s’accumulent.

Léa et Apolline, elles, ont suivi l’opération de bout en bout. Et un jour, au détour d'une conversation, elles se décident : elles deviendront gabière sur l’Hermione !
« Ces femmes et ces hommes ont fait ce voyage avec des étoiles plein les yeux, nous voulions ces mêmes étoiles dans les nôtres. »
Mars 2017, les candidatures sont ouvertes, l'Hermione recrute de nouveaux gabiers pour son voyage en 2018, en Mer Méditerranée. Sur le papier, c'est assez simple. Il faut candidater à des sélections en envoyant un dossier de motivation.
Léa : « Dans les faits, l'association a reçu énormément de candidatures. On ne connaît pas le nombre exact, mais ça se chiffre à plusieurs centaines, dont les nôtres »
Apolline : « Un jour mes parents m’avaient demandé ce que je ferais si je n’étais pas prise sur l’Hermione. Je me souviens les avoir regardés en leur répondant sans ciller : je serai prise. Cela pouvait paraître orgueilleux, mais mon crédo est « quand je veux, je peux ! », et je voulais le réaliser, ce rêve ! »
Bingo ! Les deux jeunes filles sont retenues. Elles n’y croient pas, le rêve devient de plus en plus tangible. Elles vont pouvoir partager cette aventure comme elles avaient commencé leur aventure scolaire : ensemble. Malheureusement, tout ne se passe pas comme prévu… Si Apolline peut suivre la formation classique en trois jours, durant l'été 2017, Léa, elle, est en stage à La Réunion et ne peut faire l'aller-retour à temps. L’étudiante s’organise pour pouvoir intégrer une autre session de formation. Elle insiste et obtient in extremis une place dans une session de formation dédiée aux groupes de l’Organisation Internationale de la Francophonie, pour une durée de cinq jours.
Ce que la formation à l’INSA leur a apporté pour cette expérience
Léa : « L'INSA, c'est déjà beaucoup de vécu, en termes de relations humaines. J'y ai aussi développé des capacités d'adaptation et d'apprentissage qui me servent sur le navire. Enfin, tout le côté technique m'intéresse, j'ai été très intéressée par la partie moteur dans les cales, et aussi le système de désalinisation de l'eau. »
Apolline : « L'INSA m'a apporté les outils me permettant de comprendre facilement le gréement et le fonctionnement technique d’un bateau. C’est aussi beaucoup de vie associative à travers laquelle j’ai pu développer les qualités humaines qui me permettent de vivre pleinement ce projet aujourd’hui. »
Ce qu’elles souhaitent à l’Hermione pour l’avenir
Léa : « Le commandant du navire voudrait faire un tour du monde avec l’Hermione. Je souhaite de tout cœur que ça se réalise. Ce navire est fait pour les grandes aventures, pour créer des liens entre les gens et les mondes ! Je ne peux que souhaiter que ça continue. »
Apolline : « L’Hermione coûte très cher en navigation. J’espère que nous trouverons un mécène qui pourra nous soutenir et nous permettre de faire voile plus souvent et toujours plus loin ! »
Départ prévu pour 2018 !
Copyright photo : Djev Photograph
Podcasts « Les cœurs audacieux » - Saison 1 / Épisode 7 - 8 juillet 2021
Información adicional
